Le réveil est brutal pour beaucoup de citoyens de la région de Maâtkas, de Souk El Tenine et de Mechtras. La réalité n’est pas du tout faite pour pérpetuer et pérenniser la joie générée par les Verts. Le rêve a pris fin avec l’élimination de l’Algérie en demi-finale de la Coupe d’Afrique des nations. Il faut reconnaître que pendant toute la durée de la CAN, les citoyens ne pensaient que foot sans se soucier du reste. La magie du football est unique. Le peuple en véritable nationaliste ne s’occupait que des gladiateurs du désert. Toute information qui les concerne est vite connue et largement commentée. Les Verts étaient sur toutes les bouches et dans tous les cœurs. Les gens ont oublié tout le reste. En somme, le Souk El Teninois, le Maâtkis, le Mechtrasois et tous les Algériens ont passé presque un mois entier à faire la fête, à manifester leur joie et à vivre dans la gaieté et la fraternité légendaire de ce grand peuple. Hélas une fois la compétition achevée, le réveil est douloureux. L’Algérien se retrouve dos au mur. Le quotidien, le marasme social et la cherté de la vie sont pires qu’avant. Les citoyens renouent avec la même misère et les mêmes problèmes. L’état des lieux ne s’est guère amélioré. Le pouvoir d’achat a baissé encore sensiblement. La protestation, les grèves et la grogne reprennent de plus belle. Hélas encore, la politique de la sourde oreille et la fuite en avant des pouvoirs publics sont les mêmes. Les citoyens qui étaient prêts à donner ce qu’ils avaient de plus cher pour ce pays, il y a à peine quelques jours, commencent à reconsidérer la situation et à revoir leur position. Les responsables concernés sont de nouveau à l’affiche, mais pas comme ils le souhaitent. Le marché s’enflamme, tous les produits sont intouchables pour une très grande partie des Algériens. Lâcher du lest et desserrer l’étau de ce qui étouffe les citoyens d’ici bas doivent être une priorité des plus haut responsables. Car au point au en sont les choses, le pourrissement est inévitable et cela n’augure rien de bon pour l’ensemble de la nation. Améliorer le pouvoir d’achat des travailleurs, stabiliser le marché et lutter énergiquement contre la spéculation sont à notre sens des actions qui peuvent diminuer sensiblement la tension qui est en train de monter dangereusement.
A Souk El Tenine, les prix flambent toujours
Durant notre virée effectuée hier au marché de Souk El Tenine le constat n’est pas encourageant. Les clients ne font que tourner autour des différents étalages. C’est cher ! fulminent-ils. A Mechtras c’est l’entente totale. Les marchands pratiquent les mêmes prix ! A croire que les commerçants se sont entendus sur les prix à afficher. Le marché est bien régulé à la cherté au grand dam des ménages.
Fruits et légumes intouchables
Hormis la pomme de terre qui connaît une certaine stabilité puisque son prix oscille entre 40 et 50 DA le kilo, les autres produits demeurent chers. A commencer par le roi des légumes. L’oignon est ainsi cédé à 70 DA, la carotte à 40 DA, les fèves vertes à 60 DA. Les tomates sont affichées à 60 DA et les piments ne sont accessibles qu’a partir de 120 DA le kg. La laitue se vend à 65 DA, le chou-fleur, proposé il y a quelques semaines à 30 DA, est cédé à 70 DA le kilo. Les fruits de saison quant à eux défient toute logique. La clémentine, un produit, très prisé par les citoyens, a connu une hausse vertigineuse. 250 DA le kilo! L’orange est aussi chère entre 80 et 130, selon la qualité. Les pommes se vendent entre 80 et 160 DA. A signaler que celle qui sont vendues à 80 DA ne sont bonnes que pour les porcs.
Les viandes pas touche
Il faut dire que les citoyens ont mis une croix définitive sur ce produit pourtant indispensable pour une alimentation équilibrée. Un kilogramme de viande rouge est affiché à 750 DA, le kilo de bifteck est proposé à 1 200 DA. Le poulet connaît lui une certaine accalmie, cela ne veut pas dire qu’il est bon marché, puisque son prix s’est stabilisé à 260 DA. Les produits de rechange, d’il y a quelques mois, ont eux aussi flambé. La viande congelée, qui faut-il le préciser, n’a presque aucune valeur nutritive car elle nous vient d’Amérique latine et pour arriver chez nous, cela prend des mois. Et quand elle atterrit dans notre assiette par hasard vers peut être la fin du mois, elle ressemble a tout sauf à de la viande, aucun goût et aucun apport énergetique. Mais ce n’est pas pour autant que son prix va baisser. Le kilogramme de viande congelée rivalise de près avec celui entre 540 et 650 DA ! La dinde (carcasse et cuisse) se vend entre 210 et 300 DA le kilogramme, quant à l’escalope elle n’est permise qu’à hauteur de 650 DA. C’est dire que les prix sont excessifs.
Les citoyens vivent au crédit
Les citoyens et les pères de famille que nous avons approchés sont outrés et n’arrivent pas à comprendre ce qui se passe. Un père de famille du côté de Mechtras relèvera avec beaucoup de désolation : “Cette situation n’est pas acceptable, tout est cher. Allons-nous jeûner pendant toute l’années ? Avec mes 20 000 DA de malheur, je n’arrive pas à nourrir mes cinq enfants. Ce n’est plus possible de continuer comme cela.” Et d’enchaîner : “Nous ne parlons pas de manger de la viande et d’avoir des desserts, mais on ne peut tout de même pas se passer de la pomme de terre, de la carotte et des oignons. L’Etat doit intervenir.” Dda Chabane, un retraité, rencontré au marché de Souk El Tenine ajoutera dans le même sillage : “J’ai fait plusieurs fois le tour du marché, je n’ai presque rien acheté, c’est le feu. Avec ma maigre pension, je n’arrive pas à boucler le quart du mois. Inutile de vous apprendre que je vis au crédit.” Ce ne sont là que quelques témoignages réels du calvaire quotidien auquel font face bon nombre de pères de famille. Ils se privent ainsi de beaucoup de choses pour garantir le minimum vital à leur progéniture. Quant aux chômeurs et aux employés dans le cadre du filet social, c’est carrément l’enfer. La révision des salaires devient une urgence, si l’on veut éviter le chaos.
Hocine Taïb
