»La médiocrité sera enterrée pour que ne fleurisse que la qualité »

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La Dépêche de Kabylie : Votre carrière artistique est un peu exceptionnelle… Pourquoi avez-vous choisi la Radio d’abord pour éditer vos albums par la suite ?

Hamid Medjahed : Ma carrière artistique était pour moi secondaire par rapport à ma carrière professionnelle hors artistique. Cela m’a permis de ne point compter sur la chanson pour vivre. Ceci donc, explique cela. Je veux dire par là que j’avais tous les moyens de faire de la musique pour le plaisir, avec sérieux et respect à ce noble Art tout en étant pointilleux sur les principes et de ne pas tomber dans le piège tel que la recherche du succès etc…Le choix de la Radio n’a absolument rien avoir avec l’édition de mes albums. C’est à la demande de l’ancien directeur de la Radio Chaîne II, en l’occurrence M. Zouheir Abdellatif (que je remercie au passage) que j’ai accepté de produire ma 1ère émission en 1982 qui avait pour titre  » L’Art entre hier et aujourd’hui  » où j’invitais les artistes pour débattre avec eux sur le sujet. (Une série de 42 émissions qui a vu défiler tous les grands artistes). En mars 1984, j’ai commencé à produire l’émission des  » Chanteurs de demain « , en lui apportant des changements importants dans le fond et la forme. Les résultats, vous les connaissez. En ce qui concerne la sortie de mes albums, c’est suite au piratage de mes chansons que — bien qu’elles n’existaient pas sur le marché car non éditées —, ces pirates ont réussi, grâce à des complicités au sein de la Radio, à se les procurer, les dupliquer et enfin les vendre sur les trottoirs. En dehors de l’aspect illégal de la chose, il faut comprendre que ces pirates ont prouvé qu’ils sont plus malins que certains éditeurs et savent ce que le public demande. La suite, il fallait donc les éditer, ce qui fût fait chez Maâtkas-Music que je salue au passage.

Un retour tonitruant, des tournées déjà effectuées, notamment en Kabylie, pourquoi avez-vous choisi cette période pour revenir avec autant d’engagement ?

Je n’ai rien choisi, j’ai toujours dit que l’artiste ne demande pas, il est sollicité. Ce n’est pas un retour mais des réponses à plusieurs sollicitations sérieuses qui m’enchantent et que j’accepte avec un grand plaisir car le public est toujours présent et sait faire la différence entre écouter et entendre.

Vous partagez la scène avec une autre icône de la chanson kabyle, Nouara, qui, elle aussi reprend la scène après plusieurs années d’absence, avec quel sentiment vous abordez vos entrées sur scène, lorsque l’on sait que le public vous réclame chaque fois ?

Un sentiment de défi à relever pour ne pas décevoir celles et ceux qui viennent nous voir et nous écouter. Un sentiment de fierté car notre public nous respecte beaucoup et répond toujours présent. Un public qui vient nous voir en famille et tous âges confondus. Ce public mérite tout notre respect.

Vous avez parlé, récemment, d’un nouvel album en duo avec Nouara : peut-on avoir plus d’informations ?

Un nouvel album de Nouara qui est en chantier depuis déjà deux (2) ans. Abdelmadjid Bali, l’auteur, moi-même, le compositeur et Nouara, l’interprète, travaillons lentement pour tenter d’y arriver sûrement. Ce n’est pas facile mais nous faisons le maximum sans fixer de rendez-vous car nous prenons le temps qu’il faut.

Dans quel style sera l’album ?

Zdeg-Rdeg ! Je plaisante, vous verrez après. Désolé de ne pas pouvoir vous en dire plus.

Vous avez, durant une longue période été l’animateur de la légendaire émission,  » Icennayen uzekka  » : quel bilan en tiriez-vous de ces années au service de la chanson ?

En 22 ans d’émission, celle-ci a quand même permis la découverte de presque 300 chanteuses et chanteurs de talents, très connus, connus et moins connus mais reconnus.

Quel regard portez-vous sur la chanson kabyle des décennies écoulées ?

Avant, les chanteuses et chanteurs ne se ressemblaient pas dans les styles et chaque interprète avait son style grâce à la création de genres différents.

Et sur celle d’aujourd’hui ?

Le contraire de ce qui est dit plus haut à quelques rares exceptions heureusement. L’or a beaucoup de valeur car il est rare à trouver, n’est-ce-pas ?

La chanson kabyle a-t-elle changé depuis ?

Il y a du bon et du mauvais. Avant, c’était la même chose et ce sera toujours ainsi.

Que dites-vous de la chanson rythmée ?

Elle a toujours existée.

Elle a et aura toujours sa place car il est interdit d’interdire mais l’important est de tenir dans la durée et celle-ci est une autre paire de manche !

Quelques unes de vos chansons ont été reprises par des jeunes artistes : que peut apporter une reprise à la chanson kabyle ?

Une reprise intelligente, c’est-à-dire enjolivée harmonieusement, est la bienvenue mais le contraire, ou s’éterniser indéfiniment sur les reprises, devient un signe de régression, voire une incapacité de créer. Personnellement, rien ne me dérange ni m’inquiète car la médiocrité sera enterrée pour ne fleurisse que la qualité.

Un mot pour conclure ?

Si ce n’est qu’un mot : Tanemmirt. Si c’est une phrase :  » Rien ne sert de courir, il faut partir à point « .

Propos recueillis par Mohamed Mouloud

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