Fatah Amrouche est inéluctablement la relève sûre de Chérif Kheddam, car non seulement il possède la reconnaissance de son idole mais aussi il a réussi à séduire le maître et à le convaincre par ses qualités musicales hors normes, de lui composer des chansons et même de le produire. Leur collaboration donne naissance à un album posthume intitulé Nebda sorti le mois d’avril dernier en Algérie.
Il est vrai que Fatah Amrouche, au delà de son don musical, est un garçon très timide, discret et plein de charme. Chose qui lui procure une image positive dans son style classique. Mais en écoutant son album, on ressent d’emblée la touche de Chérif Kheddam que Fatah assume entièrement avec bien entendu une touche juvénile, qui ne peut qu’apporter un plus ; celui de rapprocher les jeunes à ce style.
Né le 15 juin 1983 à El Flaye, à Sidi Aïch, situé à 45 km de Béjaïa, Fatah Amrouche apprend dès son jeune âge à jouer de la guitare et de la mandole.
Son talent se révèle pendant ses années de collège où son professeur de musique décèle en lui un brillant musicien.
En 2001, alors à peine âgé de 18 ans, Fatah décide de s’envoler vers la France, pour prendre son destin en main et s’offrir un avenir plus prometteur. A son arrivée, il saisit sa chance en faisant une entrée au conservatoire où il prend des cours de solfège et de luth (Oud), son instrument de prédilection. Ses influences musicales sont nombreuses tels que les chefs-d’oeuvres orientaux ou encore les grands noms de la chanson chaâbie et kabyle comme Dahmane El Harachi et Youcef Abjaoui. Mais surtout, fan de Chérif Kheddam, Fatah interprète depuis ses débuts le répertoire de son idole qu’il rencontrera par la suite. Tous les deux partagent, depuis, des moments de musique intenses et ne se quittent plus. C’est ainsi que son premier album se réalise aux côtés de son idole, qui le conseille et le dirige et même lui compose et le produit. Intitulé Nebda (Séparation), l’album est composé de 7 titres dont quelque-unes sont écrites ou composées par Chérif Kheddam à noter également la participation de sa fille dans l’interprétation féminine. Dans cet album, Fatah réserve une grande place pour la musique classique kabyle avec une très bonne maîtrise de l’instrument de prestige, qui est le luth (Oud) dont les sonorités envoûtantes se mêlent à des instruments acoustiques, piano, violon, contrebasse, kanouri flûte traversière et naï. Une musique habillée par des textes doux et bien structurés traitant des thèmes de la vie comme l’amour dans toutes ses formes Nebda, Zrigh Avava et Aaggu. L’interprétation des chansons est à la hauteur des aspirations avec une voix juste et douce qui ressemble beaucoup à celle de Chérif Kheddam dans sa jeunesse. En effet, en plus de s’inscrire dans la lignée des grands talents de la chanson kabyle en ayant la chance de travailler avec l’un de ses grands maîtres, Fatah lève la barre plus haut pour jouer dans la cour des grands, et se révèle un artiste complet dont l’objectif principal est d’offrir au public une musique de qualité mais aussi, en incorporant à la touche traditionnelle des orchestrations plus modernes, tenter d’attirer le regard des jeunes générations envers cette musique riche et intemporelle. Nebda de Fatah Amrouche n’est pas un album à raconter, c’est à écouter à tête reposée.
De Paris : Djillali Djerdi