Faire face aux risques et catastrophes fait partie des actes de la gestion quotidienne auxquels sont astreins les pouvoirs publics. C’est un chapitre important de la bonne gouvernance d’autant plus que ces phénomènes appelés risques ou catastrophes se diversifient et se multiplient à une vitesse jusque-là inédite.
L’Algérie a initié en 2005 une législation plus rigoureuse inhérente aux catastrophes naturelles et aux risques majeurs. Ce qui était naguère un fatras de lois et instructions dispersées dans le temps et sur plusieurs documents a été synthétisé et renforcé par la loi de 2005 entrant dans le cadre du développement durable conçue et élaborée par le ministère de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement. Ce corpus législatif est censé servir et protéger la communauté tout entière dans l’ensemble de ses activités économiques, domestiques et industrielles. Elle tend aussi à réduire les coûts économiques liés aux dysfonctionnements et dérèglements des processus et dispositifs industriels et à réduire les dépenses de prise en charge d’éventuels pandémies pouvant affecter les populations ou les cheptels.
En 2008, le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales avait annoncé à partire de l’Université d’Oran, que la carte des risques majeurs et des catastrophes naturelles serait actualisée et mise à la disposition des administrations et techniciens. Cette carte est censée faire connaître les zones du territoire national potentiellement exposées à ce genre de risques en en définissant la nature exacte et permettra, par conséquent, une meilleure efficacité dans la stratégie d’intervention et une meilleure prise en charge des conséquences qui découlent de tels phénomènes.
Mieux encore, la carte des risques majeurs et des catastrophes naturelles aidera les décideurs dans l’établissement d’un schéma de prévention avant que l’événement survienne. À ce titre, le ministre de l’Intérieur, fait savoir aussi que ce précieux instrument accompagnera l’établissement de la loi de Finances du fait que son élaboration et son exploitation généreront nécessairement des dépenses budgétaires.
Le ministère de l’Intérieur a aussi fait état, en juillet 2009, de l’élaboration d’une carte des risques sismiques pour la partie nord du pays (côtes et Hauts Plateaux). Cet outil a été réalisé par des cadres algériens conjointement avec des ingénieurs et techniciens chinois dans le cadre de la coopération technique. » C’est une carte crédible et précise, fruit d’un travail important fait dans l’anonymat « , a tenu à préciser le ministre de l’Intérieur.
Outre la carte des risques majeurs et la carte des séismes, un autre outil important, un supercalculateur météorologique, a été installé à partir de 2009 pour prévoir les phénomènes météo et anticiper les actions d’intervention en cas de risques avérés sur les biens et les personnes.
Réceptacle des efforts de la collectivité
Dans la pyramide institutionnelle chargée de la mise en place des dispositifs de prévention et d’intervention dans les cas des risques majeurs, le ministère de l’Intérieur se trouve être le réceptacle, le point de jonction et le coordonnateur de tous les efforts de la collectivité et ce en vertu des missions réglementaires qui lui sont confiées par la Constitution pour la protection des biens et des personnes et de la multiplicité de ses démembrements à l’échelle du territoire (municipalités, daïras, unités de la Protection civile,…). C’est pourquoi la réalisation de la carte des risques l’intéresse au plus haut point.
Sur plusieurs plans, le ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales se trouve ainsi impliqué par la prévention et la gestion des risques majeurs ; autant dire qu’il est au cœur d’une problématique qui, dans ses prolongements et ses incidences, touche plusieurs autres départements ministériels, principalement l’Environnement et l’Aménagement du territoire, l’Agriculture, les Travaux publics, la Santé et la Défense nationale. Dans la plupart des schémas d’intervention, le département de l’Intérieur- directement ou à travers ses démembrements au niveau des wilayas, des daïras et des communes- assure la coordination des actions de sauvetage, du rétablissement des équipements et des infrastructures ainsi que l’action de communication (relations avec les médias), en plus de la mission assumée en ce sens par le porte-parole du gouvernement lorsque ce poste est pourvu.
Pour ces raisons et pour d’autres motifs encore, le processus de décentralisation territoriale et administrative, supposant subséquemment décentralisation et fluidification de la décision d’intervention en cas de catastrophe naturelle ou industrielle, revêt une évidente urgence.
En matière de prévention des risques majeurs, une chose paraît certaine : l’expérience à l’échelle mondiale a montré que ce genre de gestion relève surtout d’une culture, culture qui doit être perceptible aussi bien au niveau de l’administration, des Collectivités locales, des entreprises industrielles, des organisations de la société civile que de la vie domestique et des ménages. Le secteur des finances, concerné à plus d’un titre par les opérations d’assurance matérielle et corporelle, commence à peine à s’intéresser à un grand ‘’gisement’’ d’argent laissé longtemps en friche.
De modestes efforts du secteur des assurances traduit une certaine avancée dans la prise en charge des risques naturels et industriels même si l’engouement en la matière est loin d’égaler le niveau connu dans les pays industrialisés surtout pour ce qui est des contrats d’assurances privés et domestiques.
Une culture à instaurer
Les lois et règlements de l’urbanisme, de la construction, de l’aménagement du territoire font valoir dans les sociétés modernes leur conduite à suivre dans la gestion générale de la cité.
Ces règles- outre l’harmonie, l’esthétique et le cadre de vie général qu’elles essayent de promouvoir pour le bien de la communauté- s’imbriquent aux dispositifs liés à la protection des biens et des personnes contre toutes sortes d’agressions qu’elles viennent de la nature-laquelle n’a jamais fait de cadeaux à l’humanité- ou de la société elle-même lorsque les normes et la morale qu’elle s’est tracée se trouvent quelque part ébranlées ou biaisées.
Le dicton dit si bien que ‘’gérer, c’est prévoir’’, et dans ce cas précis, la prévision se traduit en système de prévention. Partout dans le monde, les coûts économiques (matérialisés en devis) prennent désormais en compte les impondérables liés aux risques sécuritaires, sanitaires, industriels et naturels.
Mieux, les banques qui financent les projets ne mobilisent les crédits qu’après avoir jaugé les différents aléas qui pèsent sur eux. De même, les compagnies d’assurances modulent les niveaux de garantie et les prestations de remboursement en fonction des risques auxquels sont exposés les personnes et les objets assurés (projets, marchandises, immeubles, unités industrielles, personnel des ateliers…).
Pour tout dire, c’est d’une culture de la gestion des risques et des assurances qu’il s’agit ici, culture qui, dans notre pays, commence à peine à pénétrer les structures administratives, les entreprises et les foyers.
L’Algérie, instruite par une série de calamités liées à sa géographie physique et à la gestion approximative de son économie, ne peut pas se permettre de continuer à gérer anarchiquement et dans la précipitation la survenue de catastrophes au prix de vies humaines et d’infrastructures économiques qui auraient pu être sauvées avec un minimum d’organisation des méthodes d’intervention. La loi définit le risque majeur comme étant ‘’une menace permanente du fait de catastrophes naturelles ou d’activités humaines liées au progrès technologiques et à l’usage accidentel qui pourrait être fait de certaines matières’’. Dorénavant, l’installation d’unités industrielles seront tributaires des études d’impact sur l’environnement comme cela se fait à travers tous les pays du monde. En outre, il est fait obligation aux industriels, aux agriculteurs et aux particuliers exerçant certaines activités spécifiques de contracter des assurances contre les catastrophes.
Où en sont les règles de prévention et les mécanismes d’intervention mis jusqu’à présent en Algérie ? Certains exemples, récents ou lointains, nous montrent que la préparation des pouvoirs publics et de la société aux éventuelles calamités naturelles ou industrielles est des plus aléatoires.
Outre des accidents domestiques ou industriels circonscrits dans un espace déterminé et ayant une envergure limitée, il y en a qui prennent des proportions plus dramatiques.
Ce sont les catastrophes naturelles liées au climat, aux incendies de forêts et aux mouvements telluriques (séismes). C’est le cas des inondations de Bab El Oued en novembre 2001 et de Ghardaïa en septembre 2008 qui ont constitué un drame pour deux villes et une épreuve pour la nation. Au cataclysme de la nature, se sont greffés les ‘’erreurs’’ et les lacunes de la prévention.
Une information diligente et bien véhiculée- par exemple par la radio, aujourd’hui captée par tous les véhicules- aurait pu contribuer à éviter au moins une partie des pertes humaines.
Amar Naït Messaoud
