Betatache Rezkia, la Fatma N’Soumer de la Soummam

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Une histoire transcrite par une élite d’héros et d’héroïnes, à travers des générations. Des hommes, mais aussi beaucoup de femmes avaient sacrifié leurs vies pour l’honneur et la liberté de cette patrie.A l’image de cette femme originaire du village Ath Mansour, relevant de la daïra de M’chedallah, tombée au champ d’honneur en 1958 criblée de balles par des sanguinaires de l’armée française, Betatache Rezkia, puisque c’est qu’il s’agit. Elle avait donné une leçon de patriotisme aux sanguinaires français, qui l’ont d’ailleurs, saluée après sa mort. Ces derniers se sont rendus compte qu’ils venaient de commettre un crime atroce contre une jeune maman qui venait de défendre son honneur propre, celui de sa tribu et de son pays. Mass El Hadj Hamadache Boukrif, fils de chahid et ex-directeur d’école à la retraite, auteur de plusieurs écrits sur l’histoire révolutionnaire de la région, nous relate l’histoire émouvante et très touchante de cette jeune martyre. Ecoutons le : “D’après le témoignage de ses proches, Rezkia qui est née en 1938 au village Ath Mansour, est issue d’une famille modeste. Comme toutes les jeunes filles kabyles de son époque, Rezkia a connu un mariage précoce, et menait une vie tranquille avec sa petite famille dont une petite fille jusqu’à ce petit matin crucial d’hiver de 1958. On racontait que les soldats français en patrouille dans le village avaient franchi violemment le seuil du domicile où habitaient Rezkia et sa mère. Accourue vers la cour, Rezkia a été surprise par la présence de deux soldats français, que, d’habitude, leur présence est synonyme du mal. Ebahie, Rezkia a vite compris le malheur qui la guette. Prise par la trouille, elle n’avait pas vraiment beaucoup d’issues. Alors, elle épia de près ces deux monstres, en songeant à sa petite fille qui pleurait au berceau.

« Alors, le commandant décida de passer à l’action en faisant sortir 20 jeunes de la foule qu’il menaça d’exécution dans les 20 minutes, si le tueur ne s’identifie pas. Les citoyens de ce village savent que ces sanguinaires qui avaient déjà auparavant exécuté froidement 16 personnes des leurs, devant la brigade de la gendarmerie coloniale de M’chedallah en 1956, peuvent aisément récidiver le massacre. Et le compte à rebours commença.Rezkia, la tête baissée, se trouve une nouvelle fois devant une impasse. Après avoir sauvé son honneur, elle est appelée à épargner la vie à une vingtaine de jeunes, tous des innocents, et, à éviter un bain de sang imminent pour son village. Elle ne sait pas si elle doit se taire, pour voir grandir sa fille, ou bien avouer et subir le pire. »

Leur intention malsaine s’est éclaircie d’avantage lorsque l’un d’eux ferma la porte de la cour. Mais ce qu’ignoraient ces deux soldats, c’est qu’il n’y a pas plus humiliant pour une femme kabyle que d’abîmer son honneur. Ce jour-là, l’architecture de la maison kabyle sauva l’honneur de cette pauvre femme. En effet, en examinant le lieu, Rezkia remarque une hache soigneusement déposée sur un bûcher, au coin de la cour. En reculant, elle fait avancer vers elle sa proie, qui reçoit un coup de hache de plein fouet sur sa tête et qui tomba dans les bras de son camarade qui l’évacue immédiatement. A ce moment précis, Rezkia prit se fille dans ses bras, après avoir, bien sûr, sali son visage, et regagna la masse de femmes qui étaient déjà dans la place publique. Pris de rage et de terreur, le commandant de cette opération de ratissage tente d’identifier le coupable parmi cette foule, en menaçant de détruire tout le village s’il le faut. Le silence et la peur régnèrent sur les lieux, et personne n’a rien vu. Alors, le commandant décida de passer à l’action en faisant sortir 20 jeunes de la foule qu’il menaça d’exécution dans les 20 minutes, si le tueur ne s’identifie pas. Les citoyens de ce village savent que ces sanguinaires qui avaient déjà auparavant exécuté froidement 16 personnes des leurs, devant la brigade de la gendarmerie coloniale de M’chedallah en 1956, peuvent aisément récidiver le massacre. Et le compte à rebours commença.Rezkia, la tête baissée, se trouve une nouvelle fois devant une impasse. Après avoir sauvé son honneur, elle est appelée à épargner la vie à une vingtaine de jeunes, tous des innocents, et, à éviter un bain de sang imminent pour son village. Elle ne sait pas si elle doit se taire, pour voir grandir sa fille, ou bien avouer et subir le pire. Sa mère qui était à ses côtés ne cesse de lui chuchoter à l’oreille : “A yelli Takfidh Thaddart ! Ma fille ! Tu vas exterminer tout le village ! Avoue, et épargne la vie à ces jeunes innocents. C’est mieux pour toi”.

« Elle vient de faire ce que beaucoup d’hommes n’auraient pas pu faire, en donnant une véritable leçon de patriotisme et de courage aux ennemis. D’ailleurs, en identifiant sa victime, qui n’est autre qu’une pauvre femme sans arme, le commandant qui a donné l’ordre de tirer, n’arrivait pas à admettre son crime atroce qu’il venait de perpétrer. »

Des minutes passèrent, et les soldats n’attendent que l’ordre pour tirer. Rezkia regarda sa fille pour la dernière fois, puis la donna à sa mère, en lui disant : “Djigham tsid d lamana”. Son choix est fait : sauver son village. Elle examina les présents, et à une minute de l’expiration du temps accordé, elle se lança de toutes ses jambes, mais pas très loin. Son corps a été totalement criblé de balles, à peine elle a couru une cinquantaine de mètres. Sa mère, suivie par toutes les femmes, lancèrent des youyous.Certes, elles savaient que Rezkia a été touchée, mais aussi, qu’elle avait sauvé son honneur, celui de sa famille, de son village, de son pays, et celui de la femme algérienne en général. Elle vient de faire ce que beaucoup d’hommes n’auraient pas pu faire, en donnant une véritable leçon de patriotisme et de courage aux ennemis. D’ailleurs, en identifiant sa victime, qui n’est autre qu’une pauvre femme sans arme, le commandant qui a donné l’ordre de tirer, n’arrivait pas à admettre son crime atroce qu’il venait de perpétrer. On racontait aussi qu’un colonel français qui s’est rendu sur les lieux quelques instants après, a ordonné de saluer la mémoire de cette femme héroïque, et dira au public : “Si j’avais été là avant, j’aurais épargné la vie à cette brave femme”. Ce qui est malheureux et méprisant pour sa famille surtout, c’est que 50 ans après l’indépendance, le nom de cette femme est presque ignoré de tous. Aucune stèle, ni boulevard, ni édifice public n’ont été baptisés en son nom. Faute de voir son visage, sa fille souhaite, au moins, voir le nom de sa mère placardé dans un lieu public.Voilà tout ce que j’ai pu récolter de cette histoire émouvante, auprès de ses proches, que je tiens à saluer et à remercier”. Ainsi, se termine l’histoire émouvante de cette jeune maman.Le nom de Rezkia s’ajoutera aux milliers d’autres femmes de ce peuple, qui ont écrit avec leur sang les meilleures pages de ce joli pays, qui est l’Algérie.Gloire à nos martyrs !

Farid. A

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