Les villages se vident de plus en plus

Partager

Peu à peu les villages, jadis denses, se vident inexorablement. Le chômage donne des fessées quotidiennement à une jeunesse désemparée par mille et une embûches: éloignement, mauvaise formation, bureaucratie… Hormis les bruits des dominos, il est impossible d’entendre une voix joyeuse.

Le temps est frais, le ciel est bleu, la nature se veut en vallonnée, hérissée de milliers d’arbres entre lesquels les villages bourgeonnent, sériés par la loi d’un vénérable voisinage où les liens du sang et l’amour de la terre rendent les chaînes du respect et de la solidarité encore plus forts. En tout, vingt cinq villages s’agglutinent à l’épaule de l’Akfadou. Jadis, l’agriculture et les métiers artisanaux ont connu un essor flamboyant et marqué l’histoire de la région d’une empreinte indélébile, comme en témoigne les vestiges du marché hebdomadaire et quelques échoppes qui font toujours de la résistance. Les villages denses se vident peu à peu, inexorablement. Le chômage donne des fessées quotidiennement à une jeunesse désemparée par mille et une embûches, éloignement, mauvaise formation, bureaucratie… Hormis les bruits des dominos, il est impossible d’entendre une voix joyeuse. Les mines sont défaites et les sourires ont désertés les visages depuis belle lurette. Quelques uns se disant veinards, ont rejoint les villes d’Akbou, Sidi Aïch ou Bgayeth. D’autres héritent la chaleur du soleil et l’inconfort de la vie, en attendant l’appel du destin pour des jours meilleurs. Les écoles se vident de leurs substances. Peu de naissances, peu de mariages, peu d’habitants. Crucifiés sur l’épaule large de cette montagne majestueuse qu’est l’Akfadou, ces villages vivent un désastreux abandon. Leurs sources d’eaux jouissent d’une belle réputation, coulant à flots, mais les habitants meurent de soif, même l’hiver, une soif accentuée par les morsures d’un froid, en l’absence de gaz de ville, dont les bûches, déjà chères à l’acquisition, ne pouvaient faire face ! Pourquoi gaz de ville ? Pourquoi pas gaz pour tout le monde? Se demande-t-on, avec des pointes d’agacement.

Le développement, un vain mot

Le prix du transport est cher et les abribus sont inexistants. Les trottoirs sont mangés par des routes anarchiques et des constructions sauvages. Les caniveaux sont crasseux et les poubelles sont devenues des jouets pour chiens errants pendant la belle étoile. La saleté défigure le paysage. Et dans ce décor subsistent encore quelques cafés, échoppes et taxiphones…

Mais, en vérité les habitants méritent mieux et demandent plus. Un hôpital digne de ce nom, une unité de Protection civile, une banque, une inspection des impôts. Et pourquoi pas des usines après le désenclavement de la région vers les quatre points cardinaux ! Le jumelage de la commune avec des districts des pays avancés pour de précieux échanges d’expériences. Faire reculer le chômage est un défi quotidien, mais, au demeurant, aucun programme, du secteur privé ou du public, ne se profile à l’horizon. Il est vraiment difficile de se frayer un chemin avec aisance dans une région où même l’électricité s’évapore au moindre coup de vent. Le temps est frais, la nature est luxuriante, mais la région n’attire pas de touristes; il n’y a ni hôtel, ni auberge, ni complexe touristique qui donneraient à l’Akfadou une stature économique pour devenir un repère de vacanciers. Les années passent. Le désespoir gagne les esprits. L’exode rural est devenu un réflexe quotidien et une activité gagnante. Pour aller où ? «Mais, le monde est vaste !», se disent les gens dans un excès de colère. Colère retenue pour le moment, mais qui risque de chavirer vers l’innommable à tout moment. Cette population est assise sur une poudrière; ils ont une dent contre le Pouvoir, deux dents contre l’administration et trois dents contre les élus !

T. D.

Partager