Perspectives des énergies alternatives en Algérie

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Le marché pétrolier est gagné depuis deux semaines un réchauffement inattendu dû en partie à la crise égyptienne. En effet, la canal de Suez assure une bonne partie des approvisionnements en pétrole de l’Europe. Les incertitudes qui le grèvent suite au soulèvement des populations du pays des Pharaons contre le régime de Hosni Moubarek ne pouvaient que susciter des inquiétudes chez les pays consommateurs de pétrole. Dans cette atmosphère bouillonnante et enfiévrée, la conduite de gaz desservant Israël à partir de l’Égypte vient de subir une explosion au niveau de la localité d’El Arich, dans le désert de Sinaï.

Le prix du baril de pétrole, qui vient de dépasser les 100 dollars pour la première fois depuis 2008, a aussi été boosté par un mouvement de reprise de la croissance de certaines économies (OCDE et Chine) après la dépression entraînée par la crise financière mondiale et par un hiver rigoureux dans l’hémisphère nord.

Par Amar Naït Messaoud

Ainsi, dans un rapport datant de janvier dernier, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) estime que l’année 2011 sera marquée par un surcroît de consommation. Ce différentiel de consommation sera d’environ 200 000 barils/jour supplémentaires par rapport à la consommation journalière moyenne de 2010. Cette dernière était de 86,1 millions de barils/jour.

En tout cas, la fragilité du marché de l’énergie fossile ne laisse pas de montrer sa face un peu plus chaque jour poussant les gouvernements et les techniciens à rechercher d’autres sources d’énergie moins aléatoires et, autre avantage ‘’collatéral’’, moins polluantes. Les efforts dirigés dans ce sens commencent à peine à se concrétiser par certains résultats. Ces derniers sont appelés à être multipliés et généralisés pour pouvoir espérer un jour en faire une source alternative d’énergie.

En attendant ce pic technologique, l’énergie pétrolière continue à bénéficier de toute l’attention voulue de la part des pays producteurs. Pour le cas de l’Algérie, les investissements à consentir dans l’énergie classique dans un intervalle de quatre ans, d’ici 2015, devront mobiliser un montant de 90 milliards de dollars (60 milliards pour l’exploration et l’exploitation pétrolières et 30 milliards pour l’électricité et le gaz).

Les prix actuels du pétrole sont « satisfaisants autant pour les producteurs que pour les consommateurs », soutient le ministre algérien de l’Énergie et des Mines, Youcef Yousfi. Le ministre de l’Énergie des Émirats arabes unis, Mohamed El Hamili, juge, pour sa part, que « les cours actuels sont de nature à assurer les investissements nécessaires pour développer l’industrie pétrolière, augmenter la capacité de production de réserve dans les pays de l’OPEP et promouvoir l’industrie des énergies renouvelables ».

En effet, la recherche des énergies alternatives est devenue un axe majeur de la politique énergétique de plusieurs pays du monde comme elle constitue un filon du travail académique assuré par des universitaires aussi bien dans les pays développés que dans les pays producteurs de pétrole en voie de développement.

Un essor fulgurant, un sort scellé

Le pétrole et le gaz étant des énergies fossiles, non renouvelables, et polluantes par-dessus le marché la réflexion a été engagée depuis plus de trois décennies pour leur trouver des énergies de remplacement. Le solaire, l’éolien, les biocarburants issus de l’agriculture, le nucléaire : la gamme de la recherche est variée, même si certaines sources paraissent d’emblée plus abordables et plus consistantes que d’autres.

Pour le cas de l’Algérie, la relation que le pays entretient avec le pétrole a débuté dans une belle épopée, il y a plus d’un demi-siècle. La nature a doté notre pays d’immenses réserves pétrolière et gazières dont on n’a sondé qu’une partie. Depuis le milieu des années cinquante, sous la domination coloniale, le destin économique et social du pays sera progressivement transformé en fonction de la fortune qui sera réservée à l’exploitation d’une énergie, certes connue depuis longtemps par l’homme, mais que l’humanité a toujours rêvé de produire à l’échelle industrielle.

C’est en 1859 qu’un audacieux entrepreneur américain fit forer par un forgeron, au voisinage des suintements d’huile de Oil Creek, en Pennsylvanie, un puits de 23 mètres de profondeur d’où sortit le pétrole par mètres cubes. Ce fut alors la ruée vers l’or noir. Les Américains en firent rapidement leur industrie nationale.

« C’était l’époque où l’on ne demandait au pétrole brut que son huile lampante, successeur, pour la lumière du soir, de l’huile de baleine ou de colza, et un peu de lubrifiant grossier. On se débarrassait comme on le pouvait, par le feu ou par l’abandon. La lampe dite « au kérosène » fit la conquête du monde jusqu’en Extrême-Orient », note Henri Weiss dans son ouvrage intitulé ‘’Le Pétrole’’.

Quelque vingt années plus tard, la ténacité des inventeurs rendra viable le projet de la voiture automobile fonctionnant au carburant fossile qu’est l’essence issue du pétrole. La demande en ce produit deviendra de plus en plus grandissante à travers l’Europe et l’Amérique. D’autres produits raffinés extraits du pétrole brut commençaient aussi à être utilisés.

Arriva par la suite le moteur diesel ainsi que le chauffage par brûleurs, à huile combustible, qui obtint ses premiers succès sur les chaudières de navires.

La gamme des huiles de graissage, de viscosités variées, fait son apparition, ainsi que paraffines et vaseline, brais et cokes de vaseline de pétrole.

La seconde Guerre mondiale jouera un rôle de premier plan dans le volume d’utilisation et la diversification des domaines d’application des carburants et combustibles.

L’extension du parc automobile, l’alimentation énergétique des chars et les nouveaux produits issues de l’industrie chimique ont donné un véritable ‘’coup de fouet’’ à l’industrie pétrolière et à la politique des nouvelles explorations.

Cette marche impétueuse de l’énergie pétrolière, avec les nouveaux besoins et les nouveaux rythmes de vie suscités dans les différents milieux de la société fera entrer l’humanité dans la période contemporaine que certains appellent l’ère chimique.

En l’espace de quelques décennies, le pétrole est devenu une source d’énergie indispensable à la vie économique moderne. Dans la plupart des cas, il est devenu tout simplement irremplaçable même si des efforts intenses sont fournis par les scientifiques pour mettre en place des énergies alternatives moins coûteuses, moins polluantes et surtout plus sures en matière de longévité.

Comment s’inscrire dans l’après- pétrole ?

Au cours de la session d’automne de l’Assemblée populaire nationale, la question du développement des énergies nouvelles et renouvelables a été abordée par le ministre de l’Énergie et des mines. Le constat a été fait que, pour l’instant, la croissance est quasi exclusivement tirée par les investissements publics, autrement dit par les recettes pétrolières.

Ce constat a été réitéré aussi par le directeur général du Fonds monétaire international lors de sa dernière visite dans notre pays en novembre 2010. D.Strauss-Kahn a mis en garde contre la ‘’malédiction’’ du pétrole et a insisté sur la nécessité d’asseoir une véritable économie de l’entreprise où l’entreprise privée devrait occuper une place de choix.

Le Premier ministre, lors de son discours de politique générale devant les députés, a laissé transparaître une vérité qui résume on ne peut mieux la situation générale du pays. « La prospérité dans notre pays est nourrie par le Trésor public », ce qui, en d’autres termes, revient à dire que c’est toujours l’argent du pétrole, le grand pourvoyeur du Trésor, qui sustente cette illusion de richesse. Tout, ou presque tout, a été dit à propos de cette maudite dépendance charnelle de l’Algérie par rapport à cette énergie fossile constituée de gaz et de pétrole. Un espoir fou a même été suscité chez nous au cours de ces dernières années par la dépendance avérée de l’Europe par rapport au gaz qui lui est fourni par la Russie et l’Algérie.

L’on a cette impression que le pays –autorités, partis politiques, médias et même de simples citoyens-intègrent de façon presque spontanée, en tout cas assez ‘’naturelle’’, l’héritage d’une rente constituée par la floraison du marché pétrolier qui situait le baril superbement au-dessus de 100 dollars il y deux ans de cela. Le pic de 150 dollars a été atteint en août 2008. Cette trop diligente façon d’ assimiler des données qui ne doivent pratiquement rien au génie algérien et de les prendre comme étant de nouveaux ‘’acquis sociaux’’ ne présente aucun avantage et charrie, en revanche, dans son sillage toute la symbolique des travers de la gestion économique du pays tels qu’ils sont connus jusqu’ici.

Pratiquement depuis le début des années 2 000, en dehors de quelques moments assez courts de flottements en dents de scie, les cours du brut n’ont pas cessé jusqu’en 2008 d’évoluer en courbe exponentielle. Cette situation qui a pénalisé les grands pays importateurs a quelque peu échappé aux prévisions des courtiers et économistes qui avaient pris l’habitude de lier toute évolution des prix aux facteurs climatiques, qui dopent la consommation, et aux aléas politiques qui risquent de compromettre l’exploitation ou l’acheminement de l’or noir. En effet, les menaces auxquelles font face les entreprises occidentales dans les pays de production, la diminution des stocks stratégiques aux Etats-Unis et la tension chronique au Moyen-Orient avaient presque toujours propulsé la bourse du pétrole.

En vue de gérer les contraintes liées à la géostratégie mondiale, pour s’inscrire également dans la nouvelle démarche de la lutte contre la pollution et les changements climatiques- démarche dictée par le protocole de Kyoto et par les recommandations du sommet de Copenhague et, enfin, pour se préparer à l’ère de l’après-pétrole, l’Algérie n’a d’autre choix que d’investir dans le créneau qui commence à s’imposer maintenant à l’échelle planétaire, celui des énergies nouvelles et renouvelables. Etant stratégiquement positionné par rapport aux deux grandes sources des nouvelles énergies, le solaire et l’éolien, notre pays suscite déjà des convoitises pour assurer aux pays de l’Europe leur avenir énergétique. La centrale électrique alimentée à l’énergie solaire prévue à Adrar par les Allemands n’est qu’un petit maillon de ce qui se dessine comme étant une grande chaîne de ‘’bons de commande’’. Il en est de même de la centrale hybride (double source énergétique gaz-solaire) de Hassi R’Mel, dans la wilaya de Laghouat. C’est ce qui apparaît dans le méga-projet Desertec prévoyant le désert du Sahara et le désert du Moyen-Orient comme les futurs pourvoyeurs d’énergie solaire et éolienne pour l’Europe.

1 km2 de désert =1,5 millions de barils de pétrole

« Le projet Desertec repose sur le principe que chaque km2 de désert reçoit annuellement une énergie solaire équivalent à 1,5 million de barils de pétrole. La surface totale des déserts sur la planète entière fournirait plusieurs centaines de fois l’énergie utilisée actuellement dans le monde ; couvrir 0,3% des 40 millions de km2 de déserts de la planète en centrales thermiques permettrait de couvrir les besoins électriques de la planète en 2009 (environ18 000 TWh/an) », écrit Wikipedia à propos de ce gigantesque projet. Cependant, pour ses phases d’études et de mise en œuvre, les pays ciblés comme devant accueillir les installations prévues, à l’exemple de l’Algérie, n’ont pas encore été associés.

La technologie envisagée est celle des « centrales solaires thermodynamiques à concentrateurs, c’est-à-dire utilisant des miroirs paraboliques pour produire de la vapeur d’eau à très haute température et sous forte pression, qui fait tourner une turbine et un alternateur produisant de l’électricité. Ces centrales consomment beaucoup d’eau douce (un problème en zone aride) et conduisent à modifier l’albédo du désert, d’où un forçage radiatif positif pouvant modifier la météorologie et contribuer à peut-être exacerber certains effets du dérèglement climatique. Les concepteurs du projet espèrent pouvoir utiliser de nouveaux types de lignes Haute Tension (lignes de transmission modernes en Courant Continu Haute Tension ou CCHT ou HVDC) devant permettre de transporter les électrons sur de grandes distances avec beaucoup moins de pertes en ligne (3% pour 1.000 km) qu’avec les lignes classiques à courant alternatif, et presque sans pollution électromagnétique ».

Vu l’ensoleillement dont bénéficie l’Algérie (moyenne annuelle variant de 2 550 heures dans le Nord à 3 819 heures dans le Sud), le potentiel de l’énergie solaire dans notre pays dépasse 5 milliards de GWh/an.

Les recherches n’ont pas cessé en Europe et en Amérique, dans le domaine des technologies devant aboutir à une utilisation de plus en plus avancée de l’énergie électrique. La dernière voiture électrique présentée en 2010 en France possède une autonomie de 80 km dans sa batterie d’accumulateurs. C’est un pas vers une reconversion plus poussée des appareils et des machines de façon à ce qu’ils fonctionnent aux énergies nouvelles et renouvelables. Ces dernières comprennent évidemment les bioéthanols qui, depuis 2008, ont quelque peu contribué à la crise des produits alimentaires dans le monde.

Premiers panneaux solaires algériens en 2012

En Algérie, les premiers panneaux photovoltaïques de production nationale sont prévus à l’horizon 2012. Les travaux de construction de l’usine de fabrication de ces panneaux commenceront dans quelques semaines à Rouiba sur un site de 4 hectares. L’investissement coûtera quelque 100 millions de dollars, montant mobilisé par la Sonelgaz. La capacité de production de l’usine va de 50 à 120 mégawatts.

D’après Youcef Yousfi, ministre de l’Énergie et des Mines, soutient que le programme national des énergies renouvelables qui commence en ce premier trimestre 2011 générera à terme 200 000 emplois. Ce sont 65 projets permettant de produire dans un premier temps 2600 mégawatts d’électricité. Des possibilité d’exportation existent. Elles se situent à hauteur de 2000 MW.

Le programme national de développement des énergies renouvelables est conçu, selon le ministre, « comme un vecteur de développement industriel ». Il sera réalisé selon un schéma qui « intègre la promotion des capacités nationales de réalisation, de production, d’exploitation et de maintenance».

Déjà des expériences à petite échelle dans des villages du grand Sud ont déjà montré les grandes possibilités de l’Algérie en la matière, y compris sur le plan de la maîtrise technique des procédés d’installation et de gestion des panneaux solaires. Certaines bourgades des Hauts Plateaux ont été dotées en énergie solaire par le Haut commissariat au développement de la steppe (HCDS). Certains foyers ont découvert la télévision par ce nouveau ‘’miracle’’ technologique qu’est l’énergie solaire.

De même, deux grands projets de production d’électricité avec des énergies alternatives sont lancés au sud du pays. Une centrale hybride (gaz-solaire) à Hassi R’mel, d’une capacité de 150 mégawatts, en voie d’achèvement, et une ferme éolienne à Adrar d’une capacité de 10 mégawatts.

Le ministre de l’Energie et des Mines a expliqué en automne dernier devant les députés de l’APN que, parmi les projets que l’Algérie compte initier, certains seront réalisés en partenariat, soulignant que « nous allons demander trois choses à nos partenaires étrangers : l’acquisition de technologies en ce qui concerne les laboratoires de recherche et l’expertise, la fabrication des équipements nécessaires au développement des énergies renouvelables en Algérie, car le coût de leur importation serait excessif, et l’exportation des excédents d’électricité produite à partir de ces énergies vers des marchés extérieurs, notamment européens ».

Le montage financier de projets de développement des énergies renouvelables est bâti sur le diptyque financement local (État)-partenariat. Le premier volet s’occupera de la satisfaction des besoins internes. Le second volet sera dédié à la partie destinée à l’exportation.

A. N. M.

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