Il était une fois Lghouznan

Partager

Par Abdennour Abdesselam

Lghouznan (ou Lghouzlan), voilà un chanteur kabyle des années 70 qui nous a sublimés avec pourtant seulement deux chansons diffusées de temps à autre sur les seules ondes de la chaîne II. « Toumoubil » et « Qqazen azekka » forment en tout et pour tout (du moins officiellement) le répertoire de cet artiste mais deux chansons ont suffit pour laisser une marque de réussite indélébile de cet artiste malheureusement inconnu aujourd’hui de la nouvelle génération et peut être même oublié involontairement par la précédente. Très proche à la fois du genre de Slimane Azem par quelques thématiques et l’orchestration et de Lhesnawi par la détermination du souhait. Lghouznan échappe à la capture de la production à l’emporte pièce. Sans doute qu’il n’avait pas le souci du nombre mais plutôt celui de la qualité dans une période se situant immédiatement après l’indépendance où il sentait les prémices de l’échec apparaître un à un. La radio n’était pas encore démocratisée en Kabylie et la musique était encore largement un tabou en milieu familial. Voici un autre désavantage qui n’a également pas préoccupé l’artiste. Les textes de ses deux chansons sont annoncés avec une certaine vitesse dans la parole et la rythmique. Ce qui nous donne l’impression qu’il voulait rapidement tout dire tout à la fois et en une seule fois. Il a sublimé le retour pour lui donner le sens d’une fixation recherchée à sa terre natale. Cette notion de retour a nécessairement envahi la chanson de l’exil laissant s’exprimer un déchirement non voulu mais imposé par les lendemains qui déchantent. La symbolique de la tombe chez Lghouznan tourne elle aussi vers le sens du déracinement imposé. Les deux seules et uniques chansons nous semblent solidaires et complémentaires l’une de l’autre. Elles sont un écho amplifié. Sa voix magique a certainement contribué à sa réussite. C’est certainement dans l’émigration qu’il s’est forgé à la musique chantée sur les deux faces d’un 45 tours, alors forme unique de production. La question reste posée sur cet arrêt très et trop précoce pour un jeune artiste dont l’avenir était déjà assuré.

Abdennour Abdesselam ([email protected])

Partager