La notion de service public est devenue quasi-inexistante chez certains fonctionnaires de ce secteur, pour qui le mot «service» semble avoir pris le sens de faveur,”mziya” en langage populaire.
En effet, les exemples ne manquent malheureusement pas pour illustrer ce phénomène typique d’une bureaucratie et d’un excès de zèle sans nom. A titre d’exemple, cet employé à la poste centrale de Bouira, qui selon toute vraisemblance s’est découvert une vocation de petit despote en puissance, en lançant un formulaire à la figure d’une vielle dame. Cette scène indigne et abjecte a provoqué le courroux des citoyens présents sur les lieux, l’un d’eux, dira : «C’est inadmissible ! D’où sort ce crétin ?». Pis, encore, cet employé zélé se permet un autre outrage, en faisant d’un signe de la main à toute l’assistance, voulant dire : «Fermez-là !». Puis, s’éclipse comme si de rien n’était, en laissant les citoyens bouillonner de colère. Dans un autre guichet, toujours à la même poste, un citoyen cherche à s’informer auprès d’un guichetier, ce dernier fait la sourde oreille, en continuant à lire son journal tranquillement. Le pauvre client, trouve enfin une oreille attentive, auprès d’un autre citoyen qui dit : «Comme vous venez de le constater, ces employés sont payés pour lire leurs journaux. C’est le comble du mépris et de l’indifférence. Autant que je sache, la poste fait partie du service public et ses employés doivent fournir un minimum de prestations aux citoyens. Trouvez-vous que c’est le cas ? Moi non !». Autre lieu de services et prestations publiques, l’agence commerciale d’Algérie Telecom. Au niveau de cette agence, le simple fait de s’acquitter de sa facture de téléphone relève de l’exploit. «Je suis ici depuis près de 2h, juste pour payer ma facture téléphonique, et d’autres qui sont là avant moi attendent encore. On n’est pas sortis de l’auberge », dira Athman, un client croisé sur place. Au guichet de l’ADSL, une file interminable d’abonnés qui sont au bord de l’implosion en voyant l’employée chargée de ce service prendre tout son temps pour s’installer devant son ordinateur, puis s’éclipse à nouveau pour un certain temps tout en parlant au téléphone. Bref, un mépris total pour la clientèle. Rachid, un abonné las d’attendre, s’insurge : «C’est pour aujourd’hui ou pour demain !?». Une autre abonnée fustige l’employée zélée, en déclarant : «Ecoutez, si vous n’avez pas l’intention de travailler, dites le clairement, au lieu de nous laisser attendre indéfiniment. C’est honteux ! On a d’autres choses à faire que vous regarder palabrer au téléphone». Avec un petit air agacé l’employée prend enfin place à son bureau. Ahmed, un citoyen trouvé sur place, explique : «Le service public n’a de service que le nom. On est otage du bon vouloir de certains fonctionnaires, qui profitent de leur petit pouvoir afin de mener la vie dur aux citoyens. A croire que c’est réjouissant pour eux, Allah yahdihoum !». Dans l’objectif de faire un diagnostic qui se veut complet sur le service public et les institutions qui l’incarnent, quelle meilleure institution, que celle de La mairie dont la devise est : «Par le peuple et pour le peuple». Qui dit mairie, dit service de l’état civil. Ce point sensible et névralgique des prestations publiques doit être le faire-valoir d’une administration saine au service des citoyens. Cependant, c’est tout le contraire qui vient à l’esprit des citoyens. A son énoncé les mots les plus utilisés pour la qualifier, sont : hogra, maârifa et passe-droit. Rien de bien reluisant. C’est ce que confirment les quelques citoyens interrogés aux abords de l’état civil de Bouira. «On est encore loin du compte concernant les prestations de ce département. Pour retirer un simple extrait de naissance ou un autre document officiel, on doit jouer des coudes, avoir quelques relations bien placées à l’intérieur et s’armer de beaucoup de patience. Cependant, il y’a une légère amélioration», dira Mayssa, institutrice. Ces avis sont pour ainsi dire unanimes quant à l’état de santé de notre système du service public. En conclusion, le diagnostic qu’on peut établir est plus qu’alarmant. Il fait état d’innombrables carences, qui peuvent être fatales à la société si on y remédie pas à temps.
Ramdane B.