Patrimoine : Le Mausolée de Massinissa à El Khroub livré à l’abandon

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Massinissa, roi amazigh légendaire est « vaincu » par les vaches et autres animaux errants qui viennent prendre refuge auprès de son Mausolée livrée à l’usure et l’abandon. C’est le moins que l’on puisse dire de ce site où repose depuis des siècles celui qui fut le chef des heureux Numides. Les scènes désolantes qui s’offrent quotidiennement, aux passants, dans les alentours de ce lieu témoin d’une grande civilisation, traduisent combien des pans de notre histoire sont négligés jusqu’à l’effacement. Des vaches broutent paresseusement les herbes folles qui « agressent » l’imposant monument de pierre trônant sur une colline dominant fièrement la ville d’El Khroub d’où viennent des chiens errants arroser le gazon qui l’entoure par leurs excréments ou leurs vomissements. La construction en question, servant de pâtis à des génisses, n’est autre que le tombeau de Massinissa, le roi légendaire de la Numidie heureuse. Le mausolée, situé à 16 km de Constantine et à 4 km au nord-est d’El Khroub est placé à l’intersection des voies qui reliaient, selon un document d’archives, Cirta, la capitale Numide, à Théveste (Tébessa), Calama (Guelma) et Sitifis (Sétif).

Un pan d’histoire

Les travaux de fouilles et d’explorations engagés après sa découverte en 1915-1916 par la société archéologique de l’époque, ont révélé un caveau de 2 m sur 1 m orienté du Nord-est au Sud-ouest. Ce caveau de 1,12 m de profondeur, établi au-dessus de l’assise des fondations, était couvert de dalles de 40 cm d’épaisseur, encadrées de pierres de taille. Le fond n’était dallé que sur l’angle Nord-ouest, lit on sur le même document. Le tombeau qui formait deux compartiments superposés, séparés par des dalles, contenait trois urnes intactes et les débris de plusieurs autres ainsi que divers autres objets oxydés et en morceaux, dont des armes, un casque, une tunique, des fers de lances et des javelots. Les pierres du mausolée étaient de style mixte gréco-punique, importées à Cirta par des ouvriers grecs et carthaginois qui y furent employés par les rois de Numidie, principalement par Massinissa et son fils aîné Micipsa (3e et 2e siècle avant JC), selon Mlle Chadia Khelfallah, directrice du musée national de Constantine.

Un monument en voie d’extinction

Le caveau où devait reposer, selon certains documents, la dépouille mortelle du roi numide Massinissa, qui régna pendant 60 ans avant de mourir, en l’an 148 à Cirta, n’a aucune communication avec l’extérieur. Il est situé au milieu d’un soubassement en pierres brutes de 10,50 m de côté et de 2,80 m de hauteur comprenant cinq niveaux de pierres taillées lesquelles, si elles ont résisté aux éléments naturels et à l’usure du temps, n’ont cependant pas pu se préserver des effets dévastateurs dus à l’inconscience de l’homme et à sa négligence. Bien qu’il ait fait l’objet d’une restauration somme toute assez sommaire, qui a néanmoins coûté une enveloppe assez conséquente au trésor public, ce patrimoine en « perdition », à défaut d’accueillir des touristes, demeure à l’état d’abandon, livré aux dégradations, sans aucune protection. Des troupeaux de vaches et de moutons, des meutes de chiens fréquentent les lieux en quête d’une nourriture devenue abondante en raison de la prolifération des déchets et des ordures de tout genre jonchant l’endroit. Un site qui se retrouve, la nuit tombée, plongé dans l’obscurité les lampadaires ayant été saccagés, ce qui contribue à créer un climat d’insécurité pour les visiteurs qui, de ce fait, se raréfient. Une situation qui devrait cependant connaître une « amélioration sensible », selon le président de l’Assemblée populaire communale (APC) d’El Khroub, M. Mohamed-Seddik Hemaïzia, qui a affirmé à l’APS que des contacts sont en cours avec une entreprise spécialisée pour le remplacement des lampadaires vandalisés, et qu’une « vaste opération de désherbage » allait être entreprise « dès cette semaine » tout autour du site. Une action qui constitue, selon un citoyen, « un minimum » pour un monument représentant un pan important du patrimoine matériel du pays.

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