Nadia Aït Mançour ou le refus d’être autre chose qu’une femme à part entière

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Par Abdennour Abdesselam :

Dans son album dominé par la chanson phare Our lligh (non je ne suis pas, je ne suis point ceci ou cela), Nadia défile une suite de prismes déformants à travers et dans lesquels la femme est présentée, représentée aux grés du vouloir et du désir les plus fous de l’homme. Naturellement, elle refuse tous les polyèdres et tous les fantômes aussi fantasmatiques qu’ils puissent être, et ce, avec force de fermeté. Par le truchement de la chanson et parfois même de la poésie, l’homme fait dans l’allèchement, l’attirance et l’appétence tel un solide aimant guettant toute fragilité même momentanée pour ensuite se servir de sa proie. C’est contre toute cette faune et cette flore dont est «glorifiée» la femme que Nadia rejette tout, d’un seul bloc. Insistante dans son Our lligh (non je ne suis pas, je ne suis point ceci ou cela) l’artiste ne cesse de dénoncer cette gabegie dans laquelle on veut enfermer la femme. Elle ne veut même pas qu’on pense pour elle, que l’on parle à sa place et que l’on prenne des positions ambiguës pour elle et sa condition. Elle refuse même l’expression classique et sournoise du discours sur «la condition de la femme». Nadia ne veut pas que la femme soit justement conditionnée car elle considère que c’est là un piège abominable qui la présente encore plus facile à conduire et à accommoder dans un rôle taillé sur mesure par l’homme et pour l’homme. Pour Nadia, la femme est femme en tant que statut social naturel, acteur et auteur dans cette ambiance générale où elle est abusivement réduite. Sa voix n’est pas un cri de détresse, loin s’en faut. Ce n’est pas non plus un appel au «secours». C’est une affirmation, une détermination, une position de principe, un «j’accuse» qui met à nu toutes les entourloupettes d’une «odeur alléchée» qu’un renard humecta un jour d’une lointaine composition d’une fable. Accompagnée du seul son de sa seule guitare sèche, le seul timbre de sa voix transperce le mur du silence qui a pendant longtemps été fait à la femme, contre la femme comme une torture insupportable. Le souhait est que son album soit diffusé ou même re-diffusé et mieux distribué pour que cette douce rage contestataire soit entendue partout et de tous.

Abdennour Abdesselam

([email protected])

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