Farouk Ksentini, président de la Commission nationale pour la promotion et la protection des droits de l’homme (CNPPDA), intervenu hier lors de son passage au Forum d’El Youm, a déclaré qu’une vingtaine de textes de lois seront promulgués dans les jours qui suivent le vote de la charte pour la paix et la réconciliation nationale. Ces lois viendront déterminer les contours dans lesquels ce projet de charte sera appliqué et également pour matérialiser les principes de cette nouvelle démarche pour « éviter au maximum les dérapages et les manipulations qui risquent de parvenir de part et d’autre ». Selon l’invité du quotidien arabophone, ces nouvelles lois prendront en charge toutes les personnes concernées par la charte présidentielle. Etant le chargé du dossier des disparus, l’orateur a indiqué qu’un texte global sera alloué à cette catégorie, un texte qui définira « l’éligibilité à la disparition ». Autrement dit, ce texte aura à définir les vrais et les faux disparus. Car, selon Ksentini, la commission chargée de ce dossier a recensé de nombreux cas de faux disparus. A titre d’exemple, il a indiqué que plus de 600 individus ont été déclarés par leurs proches comme étant des disparus alors qu’ils étaient incarcérés à la maison de détention d’El Harrach pour avoir activé, d’une façon ou d’une autre, dans le circuit des terroristes. « Ils étaient tous au maquis », précise l’orateur avant d’ajouter que 120 autres déclarations ont été recensées au niveau de ladite commission alors que les personnes qui ont fait l’objet de « disparition », ont rejoint leurs familles respectives, sans que ces dernières ne déclarent leur réapparition. Cela sans omettre, lança Ksentini dans la foulée, ceux qui sont à l’étranger. Plusieurs aspects seront déterminés dans le cadre des prochaines lois qui seront décrétées, tels que la procédure de l’indemnisation ainsi que le montant. « Le législateur doit statuer sur la façon d’indemniser les personnes concernées, comme il est de son ressort d’arrêter le montant de l’indemnisation », explique-t-il avant d’enchaîner qu’ »il est impératif que l’indemnisation substantielle soit consistante et sérieuse car la majorité des familles victimes du terrorisme vit dans une situation lamentable ». Poursuivant dans le même contexte, il estime « que l’Algérie a les moyens d’indemniser ».
« Il faut faire des concessions sur le dossier des disparus » Pour ce qui est du traitement de cet épineux dossier, Ksentini a estimé que la question est très « complexe », dans la mesure où il serait, selon lui, très difficile d’identifier les commanditaires de la disparition. « Il y a deux méthodes, soit de dire que le disparu est mort soit procéder par le traitement au cas par cas, ce qui est très difficile car nous n’avons aucune assise sur laquelle nous pouvons démarrer notre enquête », dira-t-il, tout en répondant à une question d’une journaliste que « les agents de l’Etat étaient traumatisés, c’est pourquoi ils ont fait des dérapages ». Pour en finir avec ce dossier, le porte-parole du de la CNPPDA a exhorté les familles victimes du terrorisme à « faire des concessions » en « renonçant aux poursuites » pour pouvoir « tourner la page de la tragédie et renouer avec la paix ». Un autre texte de loi portera, selon Ksentini, sur la prise en charge des personnes qui seront touchées par la réconciliation nationale. « Le choix qui a été pris est d’une connotation politique », dira-t-il. Pour ce qui est du retour des dirigeants du parti dissous à l’activité politique, Ksentini a estimé que « les mêmes causes produiront les mêmes effets ». Par ailleurs, l’orateur a souligné la nécessité impérieuse de recourir à la justice. « C’est incontournable », atteste-t-il.A la question de savoir quel serait le sort de Ali Benhadj, l’hôte d’El Youm a estimé « qu’il est contre les détentions préventives ». Sur la réintégration des repentis dans la société, Ksentini avance que « l’Etat doit respecter ses engagements ».
Wassila Ould Hamouda
