Songes et mensonges de Soltani

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La campagne pour la charte pour la paix et la réconciliation nationale semble donner une occasion en or pour le leader du MSP, Abo Djerra Soltani, de s’étaler sur des sujets qui lui tenaient à cœur et qu’il a hérités de son prédécesseur, Mahfoud Nahnah. Cette aubaine — exploitée dans le cadre de l’Alliance présidentielle — a permis à Soltani de déblatérer contre tout ce qui n’est pas islamiste. Pis, il s’en est allé faire de la vile agitation et de la diversion la semaine passée à Skikda en s’en prenant violemment à la Kabylie à travers l’organisation des archs. “Qu’est-ce que c’est que ce Ulac smah ulac ? Pour nous, la devise est Ulac slah ulac”. Mauvais calembour s’il en est pour signifier que la culture belliqueuse est du côté de la Kabylie, et que lui et son mouvement seraient d’ingénus pacifistes. Ainsi, dans son délire verbal — tenant plus de la logorrhée que d’un discours discursif —, le chef du MSP inverse les rôles, faisant oublier à l’auditoire de Skikda la part non négligeable de son mouvement — qui, réellement, est une section de la confrérie mondiale des Frères musulmans — dans la tragédie algérienne, laquelle n’a pas commencé en 1992, mais remonte plutôt aux troubles universitaires des années 1970 et 1980 pendant lesquels est commis le premier assassinat d’un étudiant démocrate (Amzal Kamal, le 2 novembre 1982). La subversion islamiste culmina en été 1985 lorsque, le jour de l’Aïd El Kébir, le groupe de Bouyali s’attaqua à la caserne de police de Soumaâ en emportant des lots d’armes et de munitions. Ainsi, naquirent les premiers maquis islamistes sur les montagnes séparant Larbaâ de Tablat. Dans ses revendications historiques et légitimes, la Kabylie a su élever le niveau politique en organisant, dans la clandestinité, une opposition populaire pacifique. Les dérapages qui y ont eu lieu sont souvent dus à la réaction et à la manipulation des pouvoirs publics. En voulant se dédouaner vis-à-vis de ses alliés, de ses ouailles et de l’opinion, le responsable islamiste désigne maladroitement un bouc émissaire, la Kabylie. Déjà, le 30 août dernier, dans un discours prononcé à la salle Omnisports de Tlemcen, Soltani menace les opposants à la charte en ces termes : “Après le référendum, le président de la République prendra les mesures contre ceux qui rejettent la réconciliation nationale”. S’il fait allusion aux terroristes récalcitrants, la lutte antiterroriste, que l’on sache, n’a jamais cessé y compris en ces derniers jours qui nous rapprochent de la date du scrutin. S’il pense aux forces politiques légales qui rejettent la charte ou aux citoyens qui voteraient contre le texte présidentiel, Soltani n’est pas moins blâmable puisque l’auteur du texte lui-même, à savoir Bouteflika, rassure les Algériens en leur disant qu’ils sont libres de voter par “oui” ou par “non”. Voudrait-on discréditer la charte présidentielle que l’on ne s’y prendrait pas autrement.Le président du Hamas a récidivé mardi passé à Boumerdès en brandissant une argutie usée jusqu’à la corde, à savoir “la main étrangère” pour expliquer le chahut provoqué par un groupe de jeunes au stade de Tizi Ouzou pendant le discours de Bouteflika. “Des Algériens, dit-il, vivant en Algérie œuvrent dans l’intérêt des pays étrangers. D’autres personnes veulent carrément changer de drapeau”.Si, par le passé, l’Alliance présidentielle — dont se gargarise Soltani — dégageait des soupçons d’incohérence et des relents d’un rassemblement informe, l’actuelle campagne pour la charte en aura révélé les tares rédhibitoires et les jeux malsains qui risquent de parasiter les réformes en cours et de décrédibiliser la charte pour la paix et la réconciliation nationale.

Amar Naït Messaoud

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