30% des insuffisances rénales sont évitables

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Les insuffisances rénales chroniques terminales (IRCT) font partie des cas de pathologies les plus lourdement supportées par les malades et les pouvoirs publics, en matière de coût. C’est pour assurer dans la plupart du temps un traitement dit de suppléance (dialyse) qui consiste à remplacer transitoirement les reins malades par des dispositifs médicaux quasiment importés en devises. Un constat réel par lequel le service de néphrologie du CHU de Béjaïa, a sa tête le Pr Boubechir initiateur de la journée, a abordé le sujet, lors de la 2e Journée nationale de néphrologie de Béjaïa, tenue vendredi dernier, au campus d’Aboudaou, en présence d’une douzaine de professeurs de néphrologie des CHU d’Alger, Tizi Ouzou et Béjaïa.

Et pour y faire face, sinon réduire le fardeau, il est question de discuter des insuffisances rénales évitables, dont la prise en charge efficace pourrait réduire le nombre de malades arrivant au stade final de 30 %, juge le professeur Rayane du CHU Parnet (Alger), en appuyant cela par une réduction du coût d’une valeur de 6 millions d’euros. Le même professeur évoque par des chiffres le côté économique de la prise en charge des IRCT, comme un véritable gouffre pour les caisses de l’État avec comme coût annuel 200 milliards de DA pour une année de traitement sous hémodialyse, l’équivalent de 200 millions d’euros, sans compter les malades traités par la dialyse péritonéale (poches) ou par la transplantation.

Toujours selon l’orateur, l’Algérie compte, aujourd’hui, 24 000 malades dialysés, dont 1 000 dans la wilaya de Béjaïa, par les deux procédés, en attente d’une greffe qui reste le traitement définitif et de choix assurant une insertion sociale du patient et un meilleur cadre de vie, avec une réduction importante du coût de la prise en charge de 50 %, et ce à partir de la 2e année de greffe. Mais vu les difficultés et les tracasseries à même de mettre ce procédé sur les rails afin d’atteindre actuellement le chiffre de 2 000 greffés de rein, durant les trente dernières années, il est impératif, préconise le professeur Boubechir chef de service de néphrologie au CHU de Béjaïa, de s’occuper parfaitement des causes susceptibles d’être évitées avant d’arriver au stade de la dialyse.

«Il faut savoir que le rein est un organe vulnérable, qui demande le respect de quelques règles dans nos habitudes quotidiennes, à savoir éviter trop de sel, de sucre et de médicaments pour le protéger», précise-t-il. Ainsi, outre les pathologies rénales proprement dites, dont celles relevant des maladies génétiques ou de l’appareil urinaire, en général, le diabète, l’HTA ou d’autres maladies du cœur font partie du lots des causes connues pouvant détruire les reins qui, à leur tour, auront à perturber d’autres fonctions surtout vitales. Un véritable cercle vicieux qui s’installe dans le corps du patient, lequel exigera une prise en charge pluridisciplinaire.

Concernant les nouvelles recommandations à même de protéger le rein, le Dr S. Kherraz, néphrologue au CHU de Béjaïa, n’ira pas avec le dos de la cuillère pour évoquer le risque majeur de la prise de certains médicaments très nocifs. «Il est demandé aujourd’hui aux médecins d’abord de rationnaliser la prescription des antibiotiques et autres anti-inflammatoires, car le nombre d’IRC causés par ces médicaments est en exponentielle augmentation», met en garde ce néphrologue. D’autre part, selon le Dr F. Saidi du CHU de Béjaïa, plusieurs traitements des insuffisances rénales et leurs diagnostics mais aussi certains symptômes accompagnateurs, dont les anémies graves observées lors des insuffisances rénales chroniques, nécessitent toujours un traitement.

Même le volet dépression a été évoqué, lors de cette journée de néphrologie, étant donné que cet état de souffrance psychique est fréquent, lors des maladies chroniques, comme le cas des IRC. Dans ce sens, le professeur Adja, psychiatre au CHU de Béjaïa, a mis l’accent, lors de son intervention, sur «l’importance à donner à ce tableau clinique qu’il ne faut aucunement négliger». Il dira à cet effet : «La prise en charge d’un malade chronique déprimé est plus complexe et compliquée, ce qui demandera un effort supplémentaire de la part des professionnels de la santé.»

Beaucoup d’autres thèmes ont aussi été abordés, autour du rein et ses souffrances, en l’occurrence : les néphrocalcinoses par le Pr Belkacemi du CHU Parnet d’Alger, la toxicité rénale par les produits de contraste iodés par le Pr Hamouche du CHU de Bab El Oued (Alger) ainsi que les IRA postopératoires par le Dr Madiou et l’IR obstructive par le Pr Yebdri du CHU Nedir Mohamed de Tizi Ouzou. En somme, tous les intervenants à ce rendez-vous médical insistent sur la prévention des maladies causant les IRC, tout en plaidant pour une prise en charge pluridisciplinaire et efficiente autour des néphrologues. Cette 2e Journée nationale de néphrologie, rappelons-le, est organisée par le CHU de Béjaïa avec le concours de la Faculté de médecine de Béjaïa et l’Association des médecins généralistes locale (AMGLB).

Nadir Touati

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