Des hauts cadres de l’État devant les juges

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L’appareil judiciaire a accéléré, hier, la cadence des comparutions, devant les juges instructeurs, des personnes soupçonnées d’être liées à des «faits de corruption». Plusieurs hauts cadres de l’État, parmi lesquels figurent d’anciens ministres et walis, ont été entendus par les juges d’instruction du tribunal de Sidi M’Hamed et par le conseiller instructeur de la Cour suprême.

Les noms des personnes qui ont été présentées hier, -en plus de celles d’avant-hier devant la Cour suprême- renseignent sur les dossiers qui seront enrôlés ces jours-ci devant le tribunal de Sidi M’Hamed. Il s’agit, en fait, de deux grands dossiers impliquant d’anciens hauts responsables de l’État, notamment des ministres ainsi que l’ancien DGSN, Abdelghani Hamel, et d’anciens hommes d’affaires, dans ce qui s’apparente à l’acte II de l’affaire dite «montage automobile», mais avec l’introduction au banc des accusés de nouvelles têtes, à l’instar de Mahiedine Tahkout.

Hier, ce sont les trois fils du général-major, ancien DGSN, Abdelghani Hamel, qui ont été présentés devant le juge d’instruction de la 5e section du tribunal de Sidi M’Hamed pour complément d’audition, à la veille de l’ouverture du procès qui porte le nom de l’ancien patron de la police. Ils sont poursuivis pour, entre autres, «corruption», «dilapidation du foncier» et «enrichissement illicite» (lire notre édition d’hier). L’audition des trois frères Hamel devrait être suivie de l’audition de pas moins de 90 autres suspects dans le même dossier.

Le même tribunal a vu défiler dans la matinée d’hier l’ancien député et éphémère secrétaire général du FLN, Mohamed Djemaï, en détention provisoire depuis la mi-septembre. C’est le juge d’instruction de la 12e section qui l’a auditionné sur des faits relatifs à «menace» et «destruction de documents officiels». Comme il était question de son audition dans une nouvelle affaire de corruption. Dans le dossier dit «affaire Tahkout», le juge d’instruction du tribunal de Sidi M’Hamed est chargé d’auditionner près d’une centaine de personnes présumées impliquées dans «des faits de corruption» et «octroi d’indus avantages».

Tahkout est surtout concerné dans ce qui sera appelé «montage automobile» dans son deuxième acte, impliquant également un ancien Premier ministre, Abdelmalek Sellal, et l’ancien ministre de l’Industrie, en fuite, Abdeslam Bouchouareb, tous les deux condamnés respectivement à 12 et 20 ans de réclusion lors du procès de la semaine écoulée. Ce procès verra aussi comparaître le patron d’Ival, Mohamed Oulmi, condamné à 3 ans de prison dans le même procès de la semaine écoulée. Abderrahmane Achaïbou, entendu avant-hier par le conseiller instructeur de la Cour suprême en tant que partie civile, sera de la partie à l’encontre de Tahkout et compères.

4 anciens ministres et 7 anciens walis présumés impliqués

Le 10 septembre dernier, le juge d’instruction près le tribunal de Sidi M’Hamed avait ordonné le placement de dix-neuf personnes en détention provisoire dans l’affaire de Mahiedine Tahkout, dans laquelle 45 personnes sont impliquées. Au terme de l’audition, le magistrat instructeur a ordonné le placement en détention provisoire de 19 suspects, de 7 autres sous contrôle judiciaire et de remettre 19 suspects en liberté.

À signaler que six personnes morales en lien avec les activités du principal suspect ont été également accusées dans cette affaire. Les personnes poursuivies pénalement sont : Tahkout Mahieddine, son fils et deux de ses frères, en sus de 38 fonctionnaires de différentes administrations publiques et différents services ministériels et 3 salariés d’entreprises appartenant à Tahkout, avait alors fait savoir un communiqué du parquet de Sidi M’Hamed.

Concernant les 9 personnes restantes et compte tenu de leurs fonctions à la date des faits, il a été décidé de transmettre le volet de leur dossier au Procureur général près la cour d’Alger, «pour prendre les mesures nécessaires à leur encontre». Il s’agit d’un ancien Premier-ministre, de 2 anciens ministres, 1 ministre en exercice, 5 anciens walis et 2 walis en exercice, avait indiqué le communiqué.

Ces personnes sont poursuivies, ajoute le parquet, pour «blanchiment d’argent», «transfert de biens obtenus par des faits de corruption à l’effet d’en dissimuler la source illicite dans le cadre d’un groupe criminel», «incitation d’agents publics à exploiter leur influence effective et supposée dans le but de bénéficier d’indus privilèges», «bénéfice du pouvoir et de l’influence des agents de l’État, des collectivités locales, des entreprises et institutions publiques de droit public et des entreprises économiques publiques ou des établissements à caractère industriel et commercial (EPIC) durant l’établissement de contrats et marchés à l’effet d’augmenter les prix et de modifier, en leur faveur, la qualité des matières, services et approvisionnement».

Retenues contre les prévenus au terme de l’enquête préliminaire diligentée par la section des recherches de la Gendarmerie nationale d’Alger sur instruction du procureur de la République près le tribunal de Sidi M’Hamed, ces charges portent en outre sur «la dilapidation de deniers publics», «abus de pouvoir volontaire à l’effet d’accorder d’indus privilèges en violation des lois et réglementations», «conflit d’intérêts avec violation des procédures en vigueur en matière de marchés publics basées sur les règles de la transparence, de la concurrence honnête et de l’objectivité, outre la conclusion de contrats, de marchés et d’avenants en violation des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à l’effet d’octroyer des avantages injustes à autrui», avait encore souligné le communiqué du parquet.

L’autre affaire qui devrait être enrôlée incessamment est celle liée à l’homme d’affaires, patron de l’ETRHB, Ali Haddad, en compagnie d’une soixantaine de présumés inculpés. Par ailleurs, le conseiller instructeur de la Cour suprême a entendu, hier, l’ancien ministre de la Jeunesse et des Sports, et ex-wali de Béjaïa et de Sidi Bel Abbès, Mohamed Hattab, dans le dossier relatif à la société privée, AmanHyd. Hattab est soupçonné d’«octrois d’indus privilèges» à cette entreprise de canalisation hydraulique appartenant à la famille Chelghoum.

Aussi, dans la même journée d’hier, le conseiller instructeur de la Cour suprême a entendu le fils ainé de l’ancien secrétaire général du FLN et anciennement ministre de la Solidarité nationale, Djamel Ould Abbès, Iskandar Ould Abbès, en compagnie de l’ancien secrétaire général du même ministère, Khelladi Bouchenak. Il s’agit du dossier relatif aux faits reprochés aux deux anciens ministres de la Solidarité, Djamel Ould Abbès et Saïd Barkat, tous deux en détention provisoire. Ils sont poursuivis pour «dilapidation et détournement de deniers publics».

M. A. T.

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