Dix ans pour celle qui a poussé sa sœur au fond d’un puits

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La jeune H. a passé 4 jours pleins au fond d’un puits de 43 m, elle avait de l’eau jusqu’au cou. C’est sa grande sœur O. qui l’a poussée, sans mobile apparent, hormis la jalousie entre sœurs. Et pourtant le jour du jugement, au prononcé du verdict, la jeune H. n’arrive pas à se consoler de voir sa grande sœur condamnée à 10 ans de prison. C’est à gorge déployée qu’elle pleure pour réclamer sa libération. “Yak Dhe Neki Iy Dheker Guel Vir, Mantchi Dhaverani”. C’est moi qu’elle a jetée dans le puits et non un autre.Ces cris et ces pleurs de celle qui doit sa vie à un miracle n’ont laissé personne indifférent, mardi dernier, à la cour criminelle de Béjaïa à l’issue du procès de O. accusée de tentative d’homicide volontaire avec préméditation et guet-apens sur la personne de sa jeune sœur.Les faits de cette triste et malheureuse affaire qui se sont déroulés dans une commune de l’extrême ouest de la wilaya, remontent à la journée du 28 septembre 2002. Ce jour-là, l’accusée O., la trentaine, divorcée et mère de deux enfants avait supplié la petite sœur H. 25 ans environ, célibataire de l’accompagner récupérer une somme d’argent chez un voisin qui habite à l’autre bout du village. Les deux sœurs auront à traverser un champ désert où se trouve un puits.“Arrivées à cet endroit, précise H. sur interpellation du président de la cour, ma grande sœur s’est mise à trembler et à me demander si j’étais sûre que personne ne nous avait vues”. “Et comme je suis loin de penser que ma sœur me voulait du mal, poursuit-elle plus loin je me suis naïvement approchée du puits, elle m’y a poussée par le dos et j’y suis restée de jeudi à dimanche en ayant de l’eau jusqu’au cou”. Comment avez-vous fait pour résister tout ce temps au fond du puits ? demande le président — “En fait, explique la muiraculée, au fond du puits de 43 m, il y a un arbre qui a poussé et c’est à cet arbre que je me suis accrochée pendant ce jour”.Quant à l’accusée qui n’arrête pas de pleurer, aussi bien au box des accusés qu’à la barre, quand le président lui demande les raisons qu’il l’ont incitée à pousser sa sœur au fond du puits, elle répond que c’est par jalousie, simplement. Et à la question du président de savoir pourquoi elle est jalouse de sa sœur, elle soutient que c’est parce qu’elle est plus belle qu’elle et aussi, parce que son père n’accorde de l’intérêt quà sa sœur.L’unique témoin appelé à la barre est le sauveur de la jeune fille. Il dit que c’est la providence qui l’envoie puisque deux jours auparavant, il était encore à Dubaï, aux Emirats arabes unis et que d’habitude, quand il rentre au bled, il se rend rarement à son champ et à son puits. Mais cette fois-ci, déclare-t-il, quelque chose lui a inspiré l’idée d’aller jusquà son puits et d’y jeter quelques pierres et c’est ainsi, dit-il, que la voix fluette de la jeune victime lui est parvenue du fond sombre du puits.Le procureur, qui a requis la peine maximale prévue pour ce genre de délit, a insisté sur l’aspect prémédité du crime, crime que la jalousie ne peut en aucun cas justifier.L’avocat de la défense a axé sa plaidoirie surtout sur la condition sociale de l’accusée. Il souligne que ses problèmes sociaux qui sont dus au fait qu’elle a eu son premier enfant à 16 ans et qu’elle a été répudiée alors qu’elle était enceinte de son deuxième enfant, l’ont menée à un état dépressif chronique. Il termine son intervention en plaidant les circonstances atténuantes les plus larges pour sa cliente.

B. Mouhoub

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