Le taux de participation comme premier enjeu

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Le rendez-vous des législatives avance à grands pas. L’incertitude est sa caractéristique principale. Cela est vrai dans la mesure où, depuis 1997, une bonne décennie donc, il n’y a pas eu de scrutin de ce type qui se soit déroulé dans des conditions normales, y compris par rapport à la norme algérienne en la matière. Entre un FLN aux appétits démesurés, un RND qui a perdu l’atout de l’exercice du pouvoir mais qui veut à tout prix démontrer qu’il n’abdique pas, des partis islamistes égaux à eux-mêmes mais que les attraits du pouvoir ont quelque peu “corrompus” et des démocrates au creux de la vague, qui sera donc le grand bénéficiaire des joutes du 17 mai prochain?

Si tout ce passe à peu près normalement, c’est-à-dire avec le minimum de transparence requis, l’Algérie pourrait connaître de grandes surprises à la déclaration des résultats.

Le FLN, qui prétend tout écraser sur son passage pourrait être le premier à être surpris. Désagréablement. Si le FLN recule de manière significative, ce qui n’est absolument pas exclu, il le devra avant tout à son chef et à ses prétentions. M. Belkhadem, à la tête du gouvernement et du FLN, aura marqué la scène politique par des déclarations et des effets d’annonce tonitruants, régulièrement démentis par les faits et les centres de décision qualifiés. Cela a été le cas pour la révision constitutionnelle qu’il a annoncée comme imminente à plusieurs reprises, pour les législatives qu’il a souhaité jumeler avec les élections locales, pour le remaniement du gouvernement qu’il n’a cessé d’appeler de ses vœux, pour la prolongation du délai d’application des dispositions de la charte pour la paix et la réconciliation nationale… Démenti, désavoué sur de nombreuses questions d’importance, Belkhadem ne peut qu’en sortir affaibli, y compris et surtout au sein de sa formation où les “légalistes” semblent reprendre du poil de la bête. De belles batailles en perspective dans le cadre de la confection des listes !

Le RND pour sa part, fait l’apprentissage difficidu militantisme sans le sponsor et les moyens de l’administration et des moyens publics. Il n’abdique pas et c’est à son honneur. Mais en sortira-t-il indemne ? Rien n’est moins sûr…

Quant aux islamistes, cela ne se présente guère mieux pour eux même si, aussi paradoxal que cela puisse paraître, les nouvelles donnes sécuritaires peuvent leur profiter. En effet, le MSP semble usé par la participation au pouvoir et par les turpitudes de son premier responsable, tandis que la volonté clairement affichée du leader d’El Islah de participer au pouvoir pourrait lui valoir la désaffection de nombreuses troupes qui se recrutent parmi les islamistes radicaux. Mais, l’un dans l’autre, la représentation islamiste pourrait se maintenir au niveau actuel.

Restent les démocrates

Le FFS connaît la plus grave crise de son existence. Déjà exsangue, la structure de ce vieux parti est scindée en trois factions. Celle fidèle, contre vents et marées, au vieux leader Aït Ahmed, celle qui n’hésite plus à s’y opposer ouvertement et celle qui attend que cela se passe… Compte tenu de cette situation et des attitudes récentes de cette formation à l’égard des scrutins à caractère national- rappelons le boycott des dernières sénatoriales- sa participation le 17 mai est des plus hypothétiques. Quoi qu’il en soit, même sa participation risque de n’aboutir qu’à la confirmation de ce que tous les observateurs savent désormais : le FFS n’est que le fantôme de lui-même.

Le RCD vient de tenir, avec pas moins de quatre années de retard, son congrès. Si, médiatiquement, le coup est bien joué, le fond n’échappe pas aux observateurs avertis. Le RCD n’est plus qu’une force politique régionale qui refuse de s’assumer en tant que telle. Sa participation aux législatives étant acquise, il ne pourra néanmoins prétendre à un rôle majeur. Mais, comme trouble-fête, il jouera sûrement son rôle et il jettera ses dernières forces dans la bataille.

L’invité-surprise de ces élections sera, sans conteste, l’UDR. Ironie de l’Histoire, malgré son absence d’agrément, ce parti est le seul de toute la mouvance républicaine et démocratique à être sérieusement implanté à travers tout le territoire national. En tout cas, de toute cette mouvance, c’est la seule formation capable de présenter 48 listes en Algérie et une liste pour l’émigration; Il semble en effet que l’UDR ait trouvé les voies et moyens légaux de participer à ces prochaines élections. Rien ne permet de préjuger de ses résultats mais une chose est sûre. il imprimera son cachet à la nature de la campagne électorale.

En fait, il ne faudra sans doute pas attendre du scrutin du 17 mai des évolutions révolutionnaires. Mais un début de changement peut parfaitement se dessiner. A condition que les électeurs soient au rendez-vous. C’est pourquoi, semble-t-il, le taux de participation à ces élections, au-delà des résultats, est le premier enjeu.

Anouar Rouchi

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