Les printemps de l’espoir et de la mémoire

Partager

Que de chemin parcouru

Le 20 avril 1980 reste une date ayant indéniablement marqué l’histoire post-indépendance de notre pays et ce pour diverses raisons. D’abord pour avoir libéré les esprit des réflexes de la pensée unique et donné le coup d’envoi à une longue marche vers le pluralisme politique. Ensuite, cette date charnière du combat identitaire porté par une région entière a donné lieu aujourd’hui à des acquis arrachés de mains fortes. Des générations entière se sont relayées pour porter haut la cause berbère. Il faut dire dans ce sillage que le chemin a été très long, beaucoup de sacrifices ont été consentis pour que la culture berbère sorte de l’anonymat. Bien avant avril 1980, les prémices du conflit commençaient déjà à se faire “ sentir”. L’exemple le plus frappant de l’hostilité envers tout ce qui symbolisait le berbère a été celui de la crise dite “berbèriste” de 1949. A cette époque déjà, des militant au sein du PPA/MTLD exprimaient leur souhait de voir la question berbère incluse dans les textes qui définissent les différents segments de l’identité algérienne. Plusieurs parmi ces cadre d’origine kabyle se retrouvèrent exclus du parti et accusés de tous les maux, d’intelligence avec l’ennemi, entre autres accusations.

Cette donne a conduit a une sorte de “complexe” apparu chez la majorité de ceux qui ont porté la cause durant cette période et bien après l’indépendance. Il aura fallu attendre la fête des cerises à Larbaâ Nath Irathen, sur les hauteurs de Tizi-Ouzou pour assister aux premiers mouvements de rue ayant mis aux prises les jeunes d’un côté, les gendarmes de l’autre.

Toutefois, c’est à partir d’avril 1980, que la Kabylie se libère définitivement de ce joug. Le 20 fut organisée une action de rue pour dénoncer l’interdiction d’une conférence de Mammeri à l’université. Il s’agissait de la première action de protestation grandiose sous l’ère du président Chadli. Et c’est, bien évidemment, une autre page du combat identitaire qui s’est ouverte avec une génération de militants prêts à donner de leur vie pour les besoins de la cause. En réponse à toutes ces marches et autres rassemblements de protestation qui émanaient principalement de la communauté universitaire qui véhiculait un formidable esprit de solidarité et surtout de responsabilité, le pouvoir de l’époque préférait la répression et l’emprisonnement de plusieurs dizaines de militants engagés dans la lutte. Les revendication de ces jeunes avides de liberté étaient, en plus de la promotion de la langue berbère et son enseignement au sein des écoles de la République, démocratiques.

Après le douloureux événement sdu Printemps berbère, une appellation venue en référence au printemps de Prague, les militants de la cause berbère ont tenté d’ébaucher une feuille de route à l’occasion du séminaire de Yakourène du mois d’août 1980. Même si la constitutonnalisation de la langue amazighe n’a pas été clairement évoquée, les séminaristes de Yakouren ont revendiqué la constitutonnalisation des langues populaires, des dialectes, à l’image de tamazight et de l’arabe populaire. La naissance du MCB (Mouvement culturel berbère) s’est faite dans l’esprit de canaliser les efforts et d’organiser la lutte pour la reconnaissance de la langue berbère. La revendication linguistique sera aussi portée par les partis politiques, principalement le RCD et le FFS, après l’ouverture démocratique ayant résulté des événement du 5 octobre 1988. Le premier acquis du mouvement est indéniablement l’ouverture de département de langue et culture amazighes à l’université de Tizi-Ouzou en 1991 puis une année après à Béjaïa. Ceci a été l’une des premières concessions “ lachées” par le pouvoir, même si au début, ces deux départements formaient uniquement les postes gradués ( formation des licenciés à partir de 1997). En 1994, la Kabylie sera au rendez-vous de la grève du cartable. Le boycott de l’école auquel avait appelé le MCB à l’époque.

Une action qui finira par la “reprise” des cours, dégelés à la faveur d’un accord trouvé entre le gouvernement de l’époque et une partie du MCB qui se scindera à l’occasion en deux tendances, commissions et coordination nationales. L’accord signé un certain 22 avril prévoyait la création du HCA (Haut commissariat à l’amazighité). Un commission rattachée au gouvernement est chargée de promouvoir la langue berbère avec surtout son introduction dans le système éducatif national. Cette structure présidée par le défunt Idir Aït Amrane, a-t-elle pu répondre aux aspirations des milliers d’écoliers qui avaient sacrifié une année de leur cursus pédagogique ? La langue amazighe est- elle, aujourd’hui, complètement “intégrée” dans le système scolaire algérien ? Des questions qui méritent bien des réponse qui ne seront pas objectives tant ce bilan de l’institution n’est pas encore établi d’une manière exhaustive. 22 ans après l’interdiction de la conférence de Mammeri, la langue berbère a pu retrouver, en 2002, le statut de langue nationale après la modification de l’article 3 de la Constitution algérienne lors d’un vote à l’APN. Un acquis qui n’est pas négligeable surtout qu’il est venu juste après les douloureux événement de 2001.

La langue amazighe attend donc le passage à une autre étape, celle de son officialisation ce qui lui conférera l’ensemble de ses droits.

Ce n’est pas tout puisque le rêve démocratique suscité par les évènements d’avril 1980 continue également de bercer l’actuelle génération. 29 ans après la répression de la marche du 20 avril, la Kabylie se souvient toujours de ses sacrifices, même si beaucoup de choses ont changé, peut-être il est bien temps de comprendre…

A. Z.

Partager