Un no mans land

Partager

Ahnif, l’une des localités hissées au rang de commune, en vertu du découpage administratif de 1985, se trouve, à ce jour, loin de satisfaire aux conditions les plus élémentaires nécessaires à une municipalité. Les citoyens, ou plutôt le peu de gens qui y demeurent semblent ne plus comprendre ce qui se passe pour que leur localité soit délaissée, au moment où elle offre plusieurs possibilités d’investissement. Le territoire de cette commune est considéré parmi les plus vastes au niveau de toute la région, toutefois, l’insouciance et le laisser-aller ont fait qu’il soit laissé carrément en jachère. En effet, un vaste territoire constitué de terres fertiles, de massifs forestiers et de champs d’oliviers à perte de vue, se voit abandonné par les siens. La situation sécuritaire qui y a prévalu au cours de la dernière décennie a certes précipité cet abandon, mais la raison la plus frappante est celle relative à l’absence totale d’infrastructures publiques, mais surtout des commodités les plus élémentaires, à savoir les routes, l’électricité, l’eau, le gaz, etc. C’est là un véritable no mans land, où il ne subsiste que quelques bergers, qui, contre vents et marées, s’accrochent à leurs terres. Les quelques villages habités sont tellement éloignés entre eux qu’il semble qu’aucune communication ne s’établit entre les citoyens de cette contrée abandonnée. D’ailleurs, hormis les faubourgs de Tamellaht, Ighrem et le chef-lieu de la commune où il y a un semblant d’activité et une densité de population, le reste du territoire est totalement déserté. Par ailleurs, une visite à travers le territoire de cette commune renseigne amplement sur l’état de déliquescence dans laquelle se trouve confrontée une population qui ne sait plus à quel saint se vouer. Du côté de Tamellaht, c’est la misère qui nous accueille ! Partout dans les faubourgs, que ce soit à Ighil N’Ath Aâmer (la plus importante bourgade), Tiqesray, Ighil N’Ath Rayou ou à Ighzer Oumeziav, les conditions sont lamentables. C’est le marasme au quotidien : manque d’infrastructures routières et de prise en charge de tout genre, manque d’eau et manque de tout en fait ! Car les gens d’ici semblent oublier jusqu’à l’existence d’un Etat dans cette contrée.Ainsi, les ramifications de la misère ne se limitent pas à Tamellaht, puisque la situation ailleurs n’est pas du tout reluisante. A Ighrem, c’est plutôt la mort dans l’âme. En cette période estivale, on n’a rien d’autre à faire que de suffoquer. Aucune infrastructure d’envergure et encore moins de commodités pouvant offrir aux jeunes l’occasion d’investir, d’autant que ce village est situé sur la RN 5. Par ici, on continue à subsister par la vente de l’huile d’olive sur le bas-côté de la route. C’est là une activité ancestrale à Ighrem. Ce qui lui a valu, d’ailleurs, le titre de “Taddert n’zzit”. Autrement, c’est tous les maux qui s’accumulent, rongeant les pauvres villageois qui y vivent. Sans infrastructures sportives et de loisirs, les jeunes d’Ighrem se trouvent, tout simplement, livrés à eux-mêmes.Même topo au chef-lieu de la commune qui continue à porter le nom de “la Gare”, en référence à la gare ferroviaire qui s’y trouve depuis l’époque coloniale. La misère est ici saisissante et les jeunes de surcroît, sont les plus touchés. Pour Halim, un jeune universitaire : “C’est depuis la nuit des temps qu’Ahnif n’offre rien pour ses enfants et c’est pour cela que l’exil est la finalité de tous par ici”.En somme, et contrairement à ce que le commun des gens puisse penser, à savoir qu’Ahnif est ce qu’on peut appeler une zone aride, une attention particulière doit lui être accordés. A voir sa situation géographiquement stratégique et les possibilités d’investissements qu’elle offre, cette région doit impérativement être inscrite au centre des intérêts particuliers des hautes autorités de l’Etat. Son développement sera d’un grand apport, que ce soit pour ses habitants ou bien pour toute la région, d’autant qu’elle offre des terrains qui peuvent servir à l’investissement, soit agricole, industriel ou encore le commerce et l’habitat. Espérant enfin que les hautes autorités puissent saisir l’importance de cette commune et prêter main-forte à ses responsables locaux qui doivent fournir beaucoup d’efforts pour faire sortir la population de sa misère et faire de la localité d’Ahnif un Eldorado.

Lyazid Khaber

Partager