La crise politique au menu d’une conférence

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La commémoration des événements du 8 Mai 1945 à Kherrata a été l’occasion pour l’ouverture de débats autour de la situation politique actuelle du pays.

En effet, plusieurs personnalités en vue sur la scène de mouvement populaire ont été invitées dans la soirée du mercredi à la salle de cinéma de la ville pour animer une conférence. Le premier intervenant, Karim Tabbou, président de l’UDS (un parti politique non agréé), a réitéré la revendication d’une période de transition comme solution politique à la crise actuelle.

«La période de transition est une évidence (…). Elle permettra d’aboutir à la mise en place des mécanismes démocratiques la consécration du pouvoir du peuple», a-t-il souligné. «Je ne parle pas au nom du hirak, mais si on devait résumer les revendications du peuple en quelques points, je dirais : mettre fin à la politique du mensonge, à la médiocrité, au régionalisme, au tribalisme dans la gestion, à la confiscation du pouvoir et des instituions de l’État, à la corruption et la dilapidation des deniers publics, à l’esclavagisme du citoyen, à la falsification de l’histoire, à toutes ces méthodes utilisées par le système et qui nous ont menés à cette crise», résume-t-il.

«La crise est politique, elle n’est pas constitutionnelle», ajoutera Tabou. «La crise n’est pas dans l’application dans un article de la Constitution, c’est une crise de tout le système politique dans sa globalité, de ses institutions, de sa constitution dans son fonctionnement, ses lois, ces symboles,» dit-il encore en invitant, au passage, l’armée à s’en tenir «à ses missions constitutionnelles définies dans l’article 28». Le peuple lutte «pour un État de droit où la justice sera soumise à la loi et non aux ordres». Dans ce sillage, il qualifiera ce qui se passe actuellement de «mises en scène». «Le mouvement a certes demandé le jugement, la lutte contre la corruption à tous les niveaux et, la meilleure solution pour combattre ces fléaux, c’est de créer de nouveaux mécanismes et une nouvelle république». Plaidant pour une république du public, Karim Tabbou a appelé au maintien de la mobilisation comme étant le seul moyen pour aboutir à cet objectif.

«On ne répond à aucun agenda étranger»

Maître Mustapha Bouchachi, de son côté, lors de son intervention, s’est attelé sur les raisons qui ont poussé le peuple à sortir dans la rue. «On est sortis dans la rue car on avait un grave sentiment d’humiliation. Le 5e mandat était de trop, on ne pouvait plus continuer. Ce mouvement est notre moyen pour nous sauver et sauver notre pays», a-t-il indiqué tout en refusant de reculer. «On a une grande responsabilité aujourd’hui, c’est celle de ne pas reculer», souligne-t-il.

À propos des revendications du peuple, il a expliqué que ce dernier «demande une période de transition mais le pouvoir incarné par l’institution militaire refuse cette période et insiste sur la feuille de route constitutionnelle». «Le peuple demande une période de transition de 9 à 12 mois sans Bedoui et Bensalah. Ces deux-là, on ne les accepte pas pour encadrer les élections. On veut une période de transition qui nous permettra de s’organiser et d’ouvrir des espaces de débats pour débattre sur l’avenir de l’Algérie, c’est ce que nous voulons, on ne répond à aucun agenda étranger.

Quand nous demandons une période de transition guidée par des personnalités nationales peu importe les noms, c’est pour aller vers une vraie démocratie», a-t-il encore soutenu. Et d’enchaîner : «On a demandé une instance collégiale et un gouvernement consensuel pour nous permettre d’aller vers de vraies élections. A-t-on demandé quelque chose d’impossible ?» s’est-il interrogé. «Ils nous disent non et nous imposent des élections avec les institutions actuelles, par soi disant une feuille de route constitutionnelle.

Cette dernière a été violée des dizaines de fois. Ils ne veulent pas aller vers une vraie démocratie», a-t-il regretté. «On n’a jamais participé réellement à l’élection de nos présidents dans le passé», regrette-t-il encore. Maître Bouchachi a estimé que ceux qui sont sortis c’était «pour un vrai changement mais eux, ils veulent pérenniser le système actuel». Bouchacchi a appelé à la poursuite de la lutte pacifique. Il a refusé le discours de l’exclusion, précisant que «par le fameux Yetnehaw ga3, seules les symboles du système sont concernés».

À noter que des personnalités de marque, qui étaient annoncées à l’événement à l’instar des révolutionnaires Djamila Bouhired et Lakhdar Bouregaa, n’ont pas pu être présentes pour plusieurs raisons expliquées par les organisateurs. Les invités de Kherrata ont déposé une gerbe de fleurs au cimetière des martyrs des événements du 8 Mai 1945. Une marche nocturne a été également improvisée par les organisateurs à cet effet. Les manifestants ont scandé des slogans hostiles au système politique.

Kamela Haddoum.

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