Cela fait exactement 62 ans que l’armée coloniale a rasé le village Ath Maâmar, dans la commune d’Aïn Zaouia. Avant-hier, pour commémorer cette date tragique de l’histoire locale et nationale, le comité du village a tracé un programme d’activités consistant, en premier lieu, en le dépôt d’une gerbe de fleurs devant le monument érigé par les villageois à la mémoire des martyrs du village.
Sur place, des prises de parole ainsi que des témoignages ont été livrés par certains rescapés des bombardements des forces coloniales, lesquelles ont démoli tout village afin de dissuader les villageois à secourir et à envoyer des moyens de guerre et de subsistance aux combattants de l’Armée de libération nationale qui se réfugiaient dans ce village, situé pourtant dans une zone interdite. «Ce qui incita l’armée à intervenir violemment, c’était l’attaque perpétrée par le moudjahid Slimani Moh Ouslimane, devenu d’ailleurs capitaine de l’ALN, et son groupe contre le capitaine Moreau, en visite dans un camp militaire à Taourit.
Les militaires s’acharnèrent, à la mort de ce capitaine, sur la population civile. En plus des tortures pour soutirer des renseignements, ils leur donnèrent deux jours pour quitter le village qu’ils avaient décidé de rayer de la carte», raconte un habitant. Et de poursuivre: «Les 11 et 12 avril, ils utilisèrent tous leurs moyens, y compris l’artillerie lourde, pour ne laisser debout aucune habitation. Les villageois s’enfuirent vers les villages environnants et Maâtkas pour se réfugier chez des proches. Le retour ne se fera qu’après l’indépendance (…)». Pour lutter contre l’oubli, chaque année, les villageois se remémorent ces journées douloureuses qu’ont vécues leurs aïeuls.
D’ailleurs, à la maison de jeunes, réalisée entièrement par les habitants de ce village martyr, l’histoire d’Ath Maâmar est racontée à travers une série de photographies. «Nous avons des centaines de photos prises par des militaires venus passer leur service national en Algérie. C’est l’un de nos émigrés qui a pu les rassembler et les mettre à la disposition des nôtres. C’est un panorama de photos qui permet à nos jeunes de revenir sur l’histoire de notre village.
C’est un trésor», indique un autre habitant. Ath Maâmar est l’un de ces milliers de villages d’Algérie détruits par les forces coloniales et repeuplés petit à petit après l’indépendance. Si l’État a accompagné les habitants dans ce retour à leur bourgade, en dotant ces dernières des commodités garantissant des conditions de vie dignes, les habitants, ainsi que la diaspora originaire du village et installée dans l’Hexagone et ailleurs, ont significativement participé à ce retour aux sources.
C’est dire qu’Ath Maâmar est aussi un patelin où la solidarité et le volontariat ne sont pas de vains mots. D’ailleurs, le nettoyage de routes, les circoncirons collectives, la collecte de dons au profit des démunis… sont autant d’actions de bienfaisance que renouvellent, chaque fois que le besoin se fait sentir, les habitants, encadré par le comité du village.
Amar Ouramdane