Pour mémoire et en hommage à Hamid de Radio Paris

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Par Abdennour Abdesselam

Hamid Hamiti, originaire des Ouadhias, fut l’animateur de l’unique émission radiophonique libre, d’expression kabyle, d’une durée de 15 minutes, diffusée quotidiennement sur les ondes de l’ancienne ORTF (office des radios et télévisions françaises). Cela s’est passé durant les années 60 et 70. L’émission était dispensée depuis Paris, d’où son nom : « Radio Paris ». Malgré le très court temps accordé par les autorités françaises pour la diffusion de l’émission, Hamid a su exploiter cette opportunité pour transmettre des messages et des informations, alors interdites sur la chaîne II en Algérie. Slimane Azem, alors sournoisement interdit d’antenne sur toutes les chaînes, était souvent invité pour des débats autour de sa carrière et ses nouvelles productions qui inauguraient la naissance de la chanson politique kabyle post- indépendance. Il réalisera aussi la première interview radiophonique avec Chikh Ahesnaw (El Hesnawi). Toute la Kabylie était à l’écoute de l’émission qui passait de 19h à 19h15. L’on se souviendra que les autorités algériennes se sont plaints auprès du président Pompidou et ont, que de fois, réclamé l’annulation de l’émission devenue un véritable discours opposé à celui savamment distillé par le pouvoir de Boumediene et de Kaïd Ahmed, alors responsable de l’appareil du FLN, ennemis jurés de la berbérité du pays. Ce dernier a été jusqu’à déclarer dans les colonnes d’un journal français qu’il permettrait l’enseignement de l’hébreu en Algérie mais jamais celui du berbère. La note haineuse à l’égard de la Kabylie avait atteint le summum de l’inhumanité tout court. Hamid a tenu bon et a engagé plusieurs démarches auprès de l’Elysée pour empêcher l’élimination de l’émission. Mais, hélas, malgré tous les arguments qu’il a développés et déposés auprès des instances concernées, la France officielle, fidèle à sa position anti kabyle historique, cédera aux pressions du pouvoir algérien moyennant des négociations, encore non élucidées à ce jour. Radio Paris s’éteindra et la Kabylie perdra son seul canal privilégié d’expression libre. Hamid continuera sa lutte en procédant à des enregistrements filmés de Slimane Azem et autres documentaires qui constituent, aujourd’hui, les rares dossiers animés de l’époque. La voix majestueuse et imposante du militant de la cause berbère des années 60/70 résonne encore dans les mémoires. Atteint d’une maladie, Hamid Hamiti décédera à Paris et sera enterré au cimetière de son village natal de Tawrirt Abdellah dans le Aarch des Iwadhiyen. Des années après Radio Paris, d’autres radios verront le jour à l’image de radio Tiwizi.

Abdennour Abdesselam ([email protected]).

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