Taâchourt en Kabylie : Une fête et un rite toujours vivaces

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C’est l’une des rares fêtes à être célébrée avec autant de faste dans les cantons de la Haute Kabylie et dans la haute vallée de la Soummam (Iwakourène). On n’est certainement pas près de percer le mystère de l’exception et du privilège dont bénéficie cette journée, ces journées devrions-nous dire puisque les cérémonies s’étalent parfois sur trois à quatre jours.

Une grande partie de l’ancienne fédération des Igawawène fait de cette fête une occasion de réjouissance, de retrouvailles familiales et de parades galantes. Aïn El Hammam, Larbaâ Nath Irathène, Ath Menguellet sont à la tête du peloton pour donner tout son faste et toutes ses couleurs à une fête unique dans le calendrier festif de la région. Comme certaines régions fêtent bruyamment le Mouloud (naissance du Prophète), la Haute Kabylie a jeté on ne sait pourquoi, son dévolu sur l’Achoura, qu’elle se fait un point d’honneur de célébrer d’une façon fort expressive et très chatoyante. Les points de ralliements sont généralement les mausolées des saints marabouts disséminés à travers les crêtes de nos montagnes. A cette occasion, celui qui a emporté les suffrages de le fête, est incontestablement Jeddi Menguellet dont le mausolée se trouve au cœur du aârch des Ath Menguellet, dans la commune de Aïn El Hammam. Perché à 900 m d’altitude entre Taourirt Menguellet/Ouaghzène et Tililit/Aourir, Jeddi Menguellet est le saint patron vénéré de cette région dont l’aura et l’influence rayonnent sur plusieurs dizaines de kilomètres. On vient de Mekla, Azazga, Larbaâ Nath Irathène, Iferhounène, Akbil et même d’Aghbalou et Aït Melikèche (situés de l’autre côté du Djurdjura) pour festoyer à l’occasion de l’Achoura et invoquer la puissance et le pouvoir d’intercession du saint. Le déplacement sur ces lieux est vu parfois comme un devoir auquel on ne peut pas se soustraire. C’est l’un des rares moments d’expression de joie collective en dehors des fêtes estivales de mariage ou de circoncision. Dans d’autres villages de la Kabylie, ce sont des sacrifices d’ovins ou de bovins qui sont faits à l’occasion de l’Achoura. Il en est ainsi de l’aârch Iwakourène dans la petite ville de Raffour (wilaya de Bouira) où deux anciens villages, Ighzer et Taddart Lejdid, célèbrent d’une façon fastueuse ce rendez-vous. Pour avoir couvert l’événement, l’année passée, pour La Dépêche de Kabylie, nous avions eu l’occasion de rendre compte du caractère grandiose des cérémonies pendant lesquelles soixante veaux ont été sacrifiés dans le rite qui s’appelle Timechret. Les veaux ont été acquis soit par des dons de particuliers soit par l’achat au moyen de la caisse collective du aârch. A cette occasion, tout le monde mange de la viande, y compris les éventuels invités qui viennent rendre visite à leurs familles pendant cette période. Des cérémonies de prières et de vœux de bonheur se déroulent également dans des parterres spécialement conçus pour ce rite. Actuellement, d’intenses préparatifs sont menés par les deux associations locales pour faire du week-end prochain, un rendez-vous festif digne des traditions ancestrales.

A.N.M

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