Histoire et légende

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Avec ses 12 000 habitants, Takerboust est parmi les plus grands villages de Kabylie. Il représente la moitié de la population des neuf villages que compte la commune d’Aghbalou, dans la wilaya de Bouira.

Étendue sur les flancs d’une colline, Takerboust est située à 70 kms à l’Est du chef-lieu de la wilaya de Bouira où, de ses 906 m d’altitude, elle domine la vallée de la Soummam. Entourée d’Iferhounène, Selloum, Tirourda et Tazmalt, Takerboust est devenue chef-lieu de la commune d’Aghbalou après le découpage administratif de 1984. Depuis 1970 à ce jour, le village compte plus de 1 200 bacheliers. Les habitants sont tellement accueillants et conviviaux qu’il suffisait de passer une nuit au village pour que tu puisses accéder au statut de Takerboustois. Une pratique héritée de leurs aïeux.

Origine du mot ‘’Takerboust et Aghbalou’’

Le toponyme ‘’Takerboust ou Takerbouzt’’ viendrait, probablement, du mot ‘’Aqerbouz : aqerbuz’’ qui signifie le pommeau de selle (aqerbuz n tbarda). À l’origine, ce mot désigne une grande colline. En effet, on peut comparer la position géologique que forme le terrain de Takerboust Taqdimt (ancienne Takerboust) à un pommeau d’une selle (avant d’une selle). Mais, d’autres hypothèses ont été avancées, aussi. En ce qui concerne le mot ‘’Aghbalou : aghbalu’’, c’est un mot kabyle qui veut dire source.

La gestion du village

Depuis la fin des années 1980, le village de Takerboust est, plus au moins, transgressé dans sa gestion ancienne. En effet, depuis l’avènement des partis politiques et cette soi-disant ouverture démocratique, la localité subit quelques impacts de ces organisations. Des partis politiques censés être des générateurs d’idées et de démocratie, sont devenus, à la longue, des outils de discorde entre les villageois. ‘’Une grande responsabilité dans la dissolution de l’assemblée du village incombe aux partis politiques’’, nous dira ce citoyen qui est, pourtant, militant d’un parti politique. Cette vision des choses n’est pas partagée par tout le monde. ‘’Nous sommes toujours attachés à nos valeurs ancestrales. On organise Tichemlit, lewziâa et autres. Nous sommes solidaires à chaque occasion. On se rencontre à Tajmaât comme le font les anciens. Mais avec l’extension du village, j’avoue que ce n’est pas chose aisée d’avoir un seul comité de village. Alors, les citoyens ont opté pour des comités de quartiers que je trouve plus indiqués et plus pratiques’’, rétorqua un autre citoyen. Le président de l’APC d’Aghbalou, lui, semble avoir une bague magique qui consiste à se déplacer vers les citoyens et non le contraire, en méditant le dicton suivant : ‘’résoudre les problèmes avant d’être posés’’. D’ailleurs, lors de notre déplacement sur Takerboust, nous l’avions trouvé sur le terrain. ‘’Ce sont les villageois qui me proposaient des projets et non le contraire. Moi, je ne suis qu’un exécutant. Je me déplace vers eux. On discute des problèmes des citoyens sur les lieux, à la place publique, et non dans mon bureau’’, nous dira Mr Nacer Bellal, président de l’APC d’Aghbalou.

Le déplacement de Takerboust Ufella vers le bas

Jadis, les Takerboustois habitaient Takerboust Ufella avant leur décampement vers Tizi n Lekhmis, sous la protection d’un marabout au nom de Sidi Youcef à qui on a érigé par la suite, un mausolée. D’après le récit des vieux que nous avions rencontrés à la place du village (tajmaât), le déplacement des anciens habitants de Takerboust Ufella vers le lieu actuel, est lié à plusieurs facteurs : la rudesse de l’hiver, l’austérité de l’environnement et les agressions répétitives et les rivalités des autres âarchs, entres autres les Ath Melikech. ‘’Ils sont souvent en conflit par rapport aux terrains d’en bas. Alors, un jour, le saint Sidi Youcef décida de mettre fin aux querelles de ces frères ennemis. Sur le dos de sa jument, il descendit en contre-bas de la colline. Et quand sa jument s’arrêta, il s’installa dans ce lieu en le désignant comme étant la limite Est du territoire des Takerboustois. Et depuis, ils descendirent et s’installèrent sous sa protection’’, nous dira un vieux. En plus de ces ‘’guerres’’ fratricides, le village connaîtra plusieurs épidémies : la lèpre, le typhus, etc. Des familles entières disparaitront par la suite.

La légende d’Adidi Oulefsih

Depuis le début des austérités entres confédérations, Ath Melikech était l’ennemi juré des Ath Tqerboust, au point où même des légendes et des mythes les plus imaginaires possibles ont été racontés au sujet de leur confrontation. Parmi ces légendes, figurait celle qui a trait à la poétesse Adidi Oulefsih. En plus d’être une poétesse engagée, Adidi Oulefsih était d’un courage exceptionnel et exemplaire. Elle accompagnait les guerriers en les encourageant et en les stimulant avec ses poèmes qu’elle déclama au début de chaque bataille. On disait que juste avant la confrontation physique des guerriers d’Ath Melikech et ceux de Takerboust, au 19ème siècle, on précédait, d’abord, à une confrontation poétique entre Adidi Oulefsih et le poète Mohand Said Amlikech, représentant des Ath Melikech, où chaque partie fait les louanges des siens et dénigre la partie adverse. Et pour dissuader les indécis et les moins audacieux, Adidi Oulefsih les marquait par derrière à leur insu avec de la chaux (Tumlilt), tout en leur lançant ce sobriquet ‘’Lexlas ar Tmeqbust’’ (le châtiment s’en suivra à Tmekboust).

Un village aux 132 martyrs

En une seule journée, l’armée française tua 54 personnes en 1958, et ce, en représailles à une désobéissance civile. En effet, les villageois et comme un seul homme, opposèrent une fin de non-recevoir au vote proposé par De Gaulle en 1958. Des militaires français entrèrent au village pour l’imposer, mais ils essuyèrent des foudres des maquisards. La vengeance de l’armée française ne s’est d’ailleurs pas fait attendre. Et c’est comme cela que le village paiera un lourd tribut (132 martyrs) durant toute la durée de la guerre de libération.

Le geste de Zidane

En décembre dernier, la fondation Zinedine Zidane a offert une ambulance médicalisée à l’association des handicapés de la commune d’Aghbalou, à l’occasion de la célébration de la journée mondiale des handicapés. ‘’Ce n’est pas le premier don de Zidane, il nous a déjà envoyé des chaises roulantes et des fauteuils pour handicapés’’, nous dira Bouâraba Tarik, président de ladite association.

Quelques personnalités de la région.

Slimane Amirat : ancien moudjahid, président du parti MDRA. Terrassé par une crise cardiaque juste au moment de recueillement sur la dépouille du président Boudiaf.

Zerrouk : ancien compagnon de Slimane Amirat. Il a tiré sur le président Boumediene en 1967.

Afḍis : ancien bras droit du colonel Amirouche.

Cheikh Lhocine et Ihaddaden Mourad : deux chanteurs très connus dans la région.

Adidi oulefsih : poétesse et guerrière

H. Moula

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