Accueil Reportage A la découverte du lac Tamda Ouguelmine

Tizi-Ouzou situé du côté de Boghni, à 1 745m d'altitude : A la découverte du lac Tamda Ouguelmine

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Le Djurdjura attire de plus en plus  de personnes. rien que, depuis le début de l’année, selon des recoupements que nous avons pu avoir, pas moins de dix mille personnes sont venues à Tala Guilef.

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C’est un record car, depuis l’avènement du terrorisme, il n’y avait même pas des téméraires qui osaient s’avancer sur ce terrain. La montagne redevient une destination de prédilection des jeunes. À Boghni, c’est l’association Eco-Environnement  » Ithri » n’Ath Mendès qui prend cette avant-garde non seulement sur le plan écologique, mais aussi sur le plan de la sensibilisation qui se fait autour de  » la découverte de la montagne ». En l’espace de quinze jours, cette association a organisé deux randonnées jusqu’au lac dit Tamda Ouguelmine, à 1 745m d’altitude. Avant-hier, c’est un groupe d’une vingtaine de personnes qui a pris la route vers ce plus haut lac d’Afrique, non seulement pour l’objectif de savoir le plaisir de la découverte, mais c’était surtout, comme l’autre fois bien sûr, pour nettoyer les lieux. Avant de commencer ce périlleux déplacement, aux environs de sept heures, Abdelkader Hamzaoui, en sa qualité de président d’Eco-environnement, fait la lecture de la liste des présents et commence alors à donner les instructions au groupe d’éboueurs de la montage. « Vous savez, aujourd’hui, les éboueurs de la mer vont nettoyer nos plages. Nous allons nettoyer notre belle montagne. Alors, ne laissez rien sur votre itinéraire », leur recommande-t-il. Le fourgon prend alors la route d’Ath Bouadou. Car, la randonnée débutera à partir d’Ibadissen, un village au pied du majestueux Djurdjura. C’est sur la place du village que notre guide, Dda Ahmed, connaisseur de tous les recoins de cette réserve naturelle, arrive et instruit le groupe en lui rappelant quelques précautions d’usage qu’il faudra respecter, surtout que le trajet est long et qu’il se fera sur de petits chemins sinueux et abrupts, notamment pour ceux qui n’ont pas encore fait une telle randonnée. 

D’Ibadissen à Tamda Ouguelmine 

Et c’est en file indienne que les randonneurs ont pris la route. L’un d’eux regarde sa montre et dit:  » il est sept heures et quarante-cinq minutes ». Pliés sous le poids de leurs sacs à dos, ils arpentent péniblement ces sentiers de montagne que seul Dda Ahmed connaissait. Les jambes commencent à s’alourdir. Et à Dda Ahmed de les arrêter devant une source d’eau:  » le chemin est encore long. Faire une randonnée, ce n’est pas du tout un cross. Donc, non seulement vous devez gérer vos forces, mais vous devez aussi savoir donner le rythme à la marche. En tout cas, je vous ferai découvrir beaucoup de choses ». Se servant d’un bâton en guise d’appui, notre accompagnateur s’arrête et montre les pics aigus en donnant quelques fois leurs noms. Dda Ahmed, pour permettre aux randonneurs de se relaxer quelques moments, leur recommande  d’observer une halte devant une autre source où  » s’abreuvent » les amis de la nature. Il leur raconte même des anecdotes et ses aventures dans cette montagne qu’il dit connaître comme sa maison. Et au président d’Eco-environnement d’intervenir:  » ne laissez rien sur votre passage. Déjà nous avons rempli un sac poubelle ». Le groupe reprend son périple.  » Nous avons fait deux heures de marche », dit un jeune homme qu’on surnomme Amghar « le vieux ».  » Il ne reste pas beaucoup pour y arriver. Peut-être encore trois petites heures. La dernière fois, nous avons fait beaucoup plus de temps. Vous savez, nous sommes arrivés à seize heures au bord du lac », ajoute Abdelkader.  » Du courage encore « , leur enchaîne-t-il. Arrivés à une troisième source, avant même de goûter à son eau glacée, limpide et claire, Dda Ahmed, avec tout son sens de l’humour, égrène quelques petites histoires de son enfance. Il pointe alors son doigt vers un pic.  » Une fois arrivés là-bas, il nous restera encore à peu près une heure de marche », les encourage-t-il. Un autre jeune entièrement épuisé s’allonge de tout son corps et interroge notre guide:  » Dda Ahmed, c’est vrai qu’il ne nous reste qu’une seule heure de marche, ou bien c’est juste pour nous encourager à marcher. Je n’en peux plus ». Ce n’est que vers treize heures que, finalement, du sommet d’un pic de plus de 2 100 mètres d’altitude qu’apparaît le lac.  » Oh, le voilà. C’est magnifique, qu’il est beau! », s’exclame une voix du premier peloton du groupe. Et chacun déploie son téléphone portable, sa caméra ou encore son appareil photos. Il faudra dire que parmi le groupe, il y avait un cameraman-reporter d’une chaîne de télévision. Malheureusement, sa caméra a fait défection en cours de route. Après moult tentatives de la faire fonctionner, en vain, il décida alors de prendre quelques vidéos avec son téléphone portable en espérant de revenir le vendredi prochain parce que Abdelkader Hamzaoui l’a rassuré qu’il y aura une autre sortie à la montagne le vendredi prochain.  » Voilà nous y sommes! « , s’écrient d’une seule voix les randonneurs. 

Le lac Tamda Ouguelmine, un site touristique à promouvoir 

C’est un lac qui s’étend sur trois hectares. Il est à 1 745 mètres d’altitude. C’est le plus haut lac d’Afrique. Cette étendue d’eau limpide et étincelante est à la limite entre les wilayas de Tizi-Ouzou et de Bouira. D’ailleurs, il est plus proche de Haizer (Bouira) que d’Ath Bouadou. Bordé d’une vaste prairie, les pasteurs y laissent leurs bêtes (vaches, taureaux, veaux) durant presque la moitié de l’année. Tout comme d’ailleurs dans toute cette montagne, on voit des dizaines de bêtes y paître, libres sans aucune surveillance.  » Du mois d’avril jusqu’à octobre, ces troupeaux arrivent sur les lieux. Ils sont laissés à leur guise. Les bergers ne viennent que rarement pour leur rendre visite », explique un pasteur que nous avons approché sur les lieux. Un peu plus loin, des jeunes se livrent à un match de football alors que d’autres s’allongent sur le gazon et goûtent aux caprices de la nature sous une température ne dépassant pas les 15°. « Vous voyez, dans les années 80, nous dressons nos campements au bord du lac et nous y passons tout l’été. Pendant la journée, il fait moins chaud qu’ailleurs même si la température atteignait les 40 degrés dans les villes de Boghni, de Tizi-Ouzou. Ici, elle ne dépassait pas les 30 degrés, mais la nuit, elle baissait jusqu’à deux degrés en dessous du zéro. Il nous fallait des couvertures. C’était la belle époque », se rappelle soudainement une quinquagénaire que nous avons rencontré en compagnie de ses enfants. Tout de même, en dépit des difficultés pour y arriver, il y avait quand même beaucoup de personnes venues y passer une journée et admirer la beauté de ce lieu paradisiaque qui mérite beaucoup d’attention de la part des pouvoirs publics, en mettant tous les moyens nécessaires pour sa promotion pour qu’il devienne la destination de touristes. Au moment où les éboueurs de la montagne remplissaient leurs sacs-poubelle, Abdelkader Hamzaoui allume le feu et prépare un thé. Tout le monde est invité à le déguster.  » Dda Abdelkader, vous l’avez très bien réussi. Peux-tu nous montrer la recette? », lui dit un jeune homme après seulement deux gorgées. Le groupe se divise ensuite en sous-groupes et c’est la séance photos qui commence. Ce qui a attiré surtout certains qui ont fait cette randonnée pour la première fois, ce n’est pas seulement la beauté du lac, mais ce sont ces singes qui, sur des pics de plus de deux mille mètres d’altitude, se donnent l’ordre tout simplement en sifflotant afin de se grouper et prendre les crêtes afin de se défendre s’ils venaient à être attaqués. « Attention, quand ils sont furieux, ils se mettent à l’attaque et ils jettent même des pierres », leur explique Dda Ahmed. Il est dix-sept heures. Après avoir marché le long du lac et après avoir grimpé certains rochers, l’appel est lancé pour le retour. 

Au retour vers Ath Bouadou 

Abdelkader Hamzaoui rassemble tous les randonneurs, et c’est la descente vers Ath Bouadou. Pour le retour, c’est un autre guide qui prendra la relève car Dda Ahmed était rentré un peu plutôt accompagnant le reporter de la télévision privée qui devait rallier Tizi-Ouzou. Un jeune homme robuste et sportif qui semble connaître un raccourci commence alors à expliquer aux jeunes les précautions à prendre parce qu’il s’agit d’une descente. Bien qu’ils aient été au bout de leurs forces, les éboueurs de la montagne ne ratent pas de ramasser tout sur leur passage. « Ah! comme les Kabyles aiment leur Kabylie! », s’exclame Abdelkader Hamzaoui qui venait de ramasser deux canettes de bière. Et d’interroger le groupe:  » comment ces pollueurs osent-ils salir même la nature protégée par des lois? » Tout en descendant, par petits groupes, ils moissonnent des plantes aromatiques qui ne poussent que dans ces lieux-là. Le deuxième guide leur montre une cascade. De l’eau qui se projette de plus de quinze mètres de haut. Là aussi, ils profitent de prendre ce beau décor en photos. A plus de mille cinq cents mètres d’altitude, on voit des bergers paître leurs troupeaux de chèvres accrochés sur ces rochers rocailleux.  » Avancez, n’ayez peur de rien », crie une voix du haut de la montagne lorsqu’un chien fonce en direction d’un jeune homme. Le chemin du retour a été moins long. Deux heures trente minutes de marche sur une pente parsemée de cailloux et d’embûches. Enfin, c’est l’arrivée à Ibadissen. Dans ce village, on nous raconte que l’eau arrive tout droit d’ « adrar  » la montagne ». Effectivement, au chemin du retour, nous avons vu une ancienne conduite qui descendait du haut. Il est presque vingt-heures. Les sacs-poubelle sont chargés dans le fourgon. Personne ne manque à l’appel, la randonnée est terminée. A vingt-heures trente minutes, c’est la séparation. Personne ne regrette d’avoir fait partie de cette randonnée.                            

 Amar Ouramdane    

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