La flûte, l’instrument qui personnalise la chanson kabyle

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Par Abdennour Abdesselam :

Le premier instrument paru dans le champ musical en Kabylie semble être la flûte. Elle a été taillée par des bergers qui avaient un grand besoin de se divertir durant les longues heures passées dans les pâturages. C’est sûrement l’observation du vent qui soufflait dans des creux de bois morts qui donna à l’homme l’idée de fabriquer un étui dans lequel il soufflait, à son tour, des airs au premier degré pour enfin évoluer vers la maîtrise des divers sifflement. Son perfectionnement actuel est le résultat d’une évolution qui a vu naître une multitude de formes et de genres de flûtes. Presque chaque musique au monde s’identifie par et à un type de flûte et au genre du son qui y sort. Ainsi, cette flûte est annonciatrice de la chanson chinoise, celle-là notifie la chanson indoue, celle-ci nous emmène vers le genre saharien… etc. Dans la chanson kabyle, c’est aussi la flûte courte à roseau, portant sept orifices (7 tefla), qui en est l’identifiant. Et pour cause, la plupart, pour ne pas dire toutes les premières anciennes chansons, s’entamaient par le jeu du son de la flûte, selon le flûtiste, comme avant-première (tazwara, tazwart ou stikhbar). Par la suite, l’instrument domine toute la glèbe musicale. Il arrive même que la flûte enveloppe le reste des instruments. Loin est l’idée de rejeter l’introduction des nouveaux genres de flûtes, arrivés aujourd’hui dans le monde moderne de la musique. Nous pensons, seulement, que notre flûte doit être permanente dans les ensembles et les genres musicaux kabyles. Elle est l’âme véritable de notre art. Sur ces mêmes pages, dans ces mêmes colonnes, nous avons évoqué le plus ancien flûtiste, connu du grand public en la personne de Mahmoud Ouazza, un virtuose, disions-nous, de la flûte à roseau. D’autres, encore inconnus hélas, ont laissé leurs traces. Grand merci à leur successeur, connu et reconnu en la personne de Salem, indispensable dans le jeu et l’entrejeu des orchestres avec ses flûtes auxquelles il fait produire des mélodies à vous faire couler des larmes. Nombre d’émissions radiophoniques d’antan, à la chaîne II, étaient personnifiées par le son de la flûte. Ainsi, la très regrettable émission « nnuba n yeghriben », animée par le talentueux Abdelkader, avait comme générique le seul souffle d’une flûte magique qui laissait « s’égoutter » un son en or. Feu le poète Ssi Lhoucine emplissait son émission poétique, toute aussi regrettable, par des intermèdes faits de sons de flûte qui accompagnaient admirablement les poèmes déclamés dans un style « Lhoucinien ». Alors, pour le cachet particulier, pour sa marque, pour l’empreinte indélébile de la chanson kabyle, la flûte à roseau devrait succéder à la flûte à roseau.

Abdennour Abdesselam (kocilnour@yahoo.fr)

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