…52 taureaux et 10 béliers sacrifiés à Iwakouren

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C’est une distinction des Iwakouren, qui en compte deux villages Ighzer et Thaddarth Lejdid de célébrer en grande pompe ce rituel culturel et religieux, un rituel sacré qui n’a pas connu d’interruption depuis plusieurs siècles même durant l’occupation coloniale ou la décennie rouge au niveau de ce aârch. Une manière pour les Iwakouren d’opposer une farouche résistance à l’invasion culturelle des uns et aux tentatives d’entrisme des autres, tout en veillant à ce que soit pérennisée et profondément ancrée dans les mentalités cette tradition à l’origine d’une solide soudure de la communauté et de la tribu. La règle étant la présence obligatoire et l’implication de tous les membres du aârch, ceux qui résident en dehors de la région, sont tenus de rappliquer et manifester leur présence à Raffour pour célébrer Thaâchourth dans un esprit communautaire et sauvegarder ainsi les racines et les origines à travers cette tradition ancestrale. L’évènement s’étale sur 3 jours : la première journée est consacrée à la collecte des bêtes offertes et quelles bêtes ! Des taureaux adultes engraissés, par les plus aisés sous forme de dons, durant la seconde journée des bénévoles s’attèlent au sacrifice et le dépouillement des bêtes au niveau des deux maisons du aârch. Dans la nuit de la première journée, on procède au découpage des carcasses pendant qu’une autre équipe s’attelle à la préparation des parts dénommées  » Thakhamt ou Thount  » destinées à toutes les familles sans exception. C’est ainsi que 1 206 parts ont été dégagées au bénéfice de 8 adhroum (chaque adhroum compte 4 à 6 familles, chacune des familles compte de 12 à 15 foyers). Le troisième jour soit le jour de Thaâchourth (lundi) est réservé à la distribution des parts que vient récupérer chaque chef de famille ou son représentant. La viande cédée gratuitement et les sages du aârch aménagent une place à proximité du lieu de distribution pour recevoir des dons tant en nature principalement des denrées alimentaires à large consommation, semoule, huile, café sucre ou pâtes alimentaires qui seront à leur tour distribuées aux nécessiteux. D’autres offrent des sommes d’argent qui iront dans la caisse du aârch et seront utilisés plus tard dans des opérations d’utilité publique tels que l’aménagement des pistes agricoles, l’entretien et la rénovation des canaux d’irrigation et de sources et enfin le nettoyage et la clôture des cimetières. Comme il est aussi fréquent de puiser dans ces caisses pour aider des nécessiteux notamment, pour les soins ou encore les veuves et les orphelins sans ressources. Dans cet aârch, les vertus de la solidarité d’entraide et d’esprit communautaire sont palpables et apparaissent dans toutes leurs grandeurs. Un constat que confirme et retrace une importante exposition de photos et de projections d’opérations de volontariat au niveau des deux villages situés en haute montagne, des opérations d’utilité publique qui rivalisent sinon dépassent celles chapeautées par les services étatiques.

Pour revenir à cette grandiose Thimechret il y a lieu de souligner que tout citoyen résidant à Raffour et qui n’est pas originaire de cet aârch reçoit chez lui sa part de viande au même titre que les invités ou tout visiteur présent ce jour-là à Raffour dont des dizaines de mendiants en majorité des femmes, qui rappliquent des quatre coins de la daïra de M’chedallah. Pour agrémenter cette cérémonie et lui donner une ambiance de fête, des hauts parleurs et baffles géantes diffusent des chants traditionnels de manière discontinue durant trois jours et trois nuits sachant que pour la réussite d’une cérémonie d’une telle envergure, les bénévoles ont travaillé d’arrache pied et se relayent H24 pour que tout soit fin prêt le jour “J” et que chacun des 12 000 habitants de Raffour reçoit sa part de viande entourée de tout un mythe qui lui donne une valeur culturelle et une saveur exceptionnelle. Notons enfin pour conclure que le comité d’accueil qui nous a accompagnés durant notre tournée nous a fait visiter en parallèle une exposition de photos qui retrace les différentes étapes d’exécution du projet du captage et de canalisation de plusieurs sources qui serviront à l’AEP et l’irrigation d’Iwakouren, une opération, faut-il le rappeler, chapeautée par la commission européenne, une contribution financière du aârch doublée d’opération de volontariat. Un fait qui souligne la solide organisation d’Iwakouren.

Oulaid Soualah

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