Sidi Hend U Yahia fut, hier, le socle de la fête pour les localités de la commune de Mekla, à l’occasion du rituel festif de l’Achoura. Le mausolée fut envahit dès les premières heures de la matinée par les citoyens de la région. Mais aussi de nombreux visiteurs venus d’ailleurs.
La Kabylie a accueilli, hier, à l’instar de toute la communauté musulmane, l’Achoura. Une occasion qui revêt un caractère particulier chez les habitants de la région. En effet, Taâchourth devient, le temps d’un jour, synonyme de communion, d’entraide entre les gens, mais aussi de pèlerinage vers les mausolées des marabouts, répartis ça et là à travers les villages de la Kabylie. Une fête que d’aucuns ne voudraient rater. C’est pour cette raison, d’ailleurs, que la plupart des régions ont préféré reporter la fête et la faire coïncider avec la fin de semaine. Ceci, laisse-t-on entendre, afin de faire profiter le maximum de gens qui, semble-t-il, ne font que guetter une occasion pour faire la fête, se retirer un peu de la routine et des aléas de la vie quotidienne, en se retrouvant ensemble autour d’un plat convivial et d’une fête joyeuse. Taliouine, village sis à quelques encablures du chef-lieu communal de Mekla, par contre, fait partie de ces rares régions qui n’ont pas souhaité se soustraire à la tradition. Ils ont, de ce fait, célébré Taâchourt à la manière des anciens et suivant les us et coutumes de la région.
Hier, les gens du village, mais aussi des autres localités environnantes, se sont retrouvés à Sidi Hend Ou Yahia. Perché sur une crête, entre Agouni Bouafir et Taliouine, Sidi Hend U Yahya fait partie de ces Aâssas (saints protecteurs) qui reçoivent chaque année des centaines de gens qui déferlent de partout. Le Marabout est venu, parait-il, d’Iferhounène et s’est installé à Taliouine entre le seizième et le dix septième siècle, se sont accordés à dire les habitants. Tout en précisant, d’ailleurs, que l’histoire de se saint, ancêtre des Chetti, est trop importante pour être relatée en quelque minutes.
Hier, le soleil était au rendez-vous, une journée propice à la fête. Il faut dire que côté météo, les villageois de Taliouine ont été gâtés.
A peine les pieds mis dans le mausolée du saint marabout Sidi Hend U Yahya, le visiteur est plongé dans l’atmosphère et l’ambiance de Taâchourt. Une ambiance qui a été pour ainsi dire, longtemps égarée, perdant un peu de son charme, mais que certaines régions tiennent à faire renaître. Quelques pièces offertes aux Chikhs installé à proximité du mausolée et ces derniers invoquent la bénédiction du marabout. Les organisateurs viennent à la rencontre des gens et les invitent à s’installer dans le respect des traditions et de l’hôte, les femmes d’un côté les hommes de l’autre. Sans pour autant s’interposer à la mixité notamment au cours des moments partagés en musique. Cette année, de jeunes organisateurs semblent s’initier au métier.
A l’image de Saâdi, qui semble à l’aise dans son rôle. Mais aussi de Hamza, qui sous le regard fier de sa mère, Nna Ouisa, fait des pieds et des mains pour arriver à satisfaire tout ce beau monde. Ces jeunes sont des « bleus » dans l’animation et l’organisation, mais rien pourtant ne semble leur échapper. Aussi, pas question de partir sans avoir goûter à El Waâda. Un couscous aux pois chiches bien de chez nous, avec des œufs et de la viande.
Les visiteurs peuvent se servir à satiété. El Waâda (l’offrande) vient de dons qui sont généralement faits par des citoyens du village à l’occasion de cette fête, nous explique-t-on, mais aussi de la quête qui se fait, quelques jours avant le jour J. Pendant cette quête, les villageois, souvent des jeunes, font le tour de toutes les maisons du village. Chaque famille y mettra du sien, selon ce qu’elle peut offrir. Les jeunes perçoivent les dons des villageois Taâelamt (drapeau) en main. Ce dernier, est par la suite hissé en haut du mausolée de Sidi Hend U Yahia. Place ensuite à la musique ancestrale. Les tambours fusent, à la joie des présents, notamment des plus jeunes qui n’attendaient, apparemment que ça. En fin d’après-midi, les gens se sont dispersés sur les ères d’une dernière mélodie de « Ebqaw Aâla khir » et des tambours.
Une façon de remercier les visiteurs, et autres invités, tout en leur donnant rendez-vous pour l’année prochaine.
Par ailleurs, et pour tous ceux qui n’ont pas eu l’occasion de profiter de la distraction que procure ce genre de cérémonies, rendez-vous est pris pour la fin de semaine, dans d’autres endroits où l’Achoura sera à l’honneur des festivités qui s’étaleront sur trois jours. C’est le cas à Aït Aïche et à Agouni Bouafir, dans la même commune de Mekla.
Tassadit Ch.