“Contre le silence”

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Malika Mokaddem est née en 1949 à Kenadsa, elle est néphrologue à Montepellier (France). Pour fuir et échapper à l’emprise du Sahara. Elle éprouva le besoin de lire jusqu’à satiété. Ses lectures diverses la renseignaient et la nourrissaient, espaces différents des siens. Cela lui permettait de supporter sa vie. Adulant et abhorrant en même temps ce désert, sa solitude semblait insoutenable, aussi lisait-elle jusqu’à épuisement. “Nourrie par les mots des autres”, selon l’expression de Malika, comment échapper à l’écriture ? Par la force des choses, elle y parvient bien plus tard, grâce à une longue maturation. La naissance de son premier roman, Les Hommes qui marchent aux éditions “Ramsay” (mai 1990). “Ce n’est pas un roman de jeunesse”, dit-elle. C’est à 41 ans qu’un débordement d’idées se concrétisa de manière positive presque à son insu, tant de choses à dire, à raconter, qu’un second livre paraît en 1992 à la même édition, Le Siècle des sauterelles, L’Interdite aux éditions Grasset en 1993. Un quatrième roman, Des Rêves et des assassins, en 1995. Malika Mokaddem vient d’éditer un dernier roman sous le titre Mes Hommes ; aux éditions Grasset (2005), 293 pages.Dans “Mes Hommes”, Malika Mokaddem nous présente des “prototypes” d’hommes pour lesquels, elle garde de bons souvenirs. Dans le premier chapitre de cet ouvrage, son père qui l’ignorait et ignorait ses sœurs, qui n’accordait de paternité que pour ses fils (les frères de Malika) ressurgit de ses souvenirs. Déçue par ce monde gouverné par les hommes, où aucune place n’est réservée à la femme, Malika va combattre et dire son refus quant à cet état de fait. Elle dira haut et fort son refus à son père et tous ceux qui tenteront, de l’entraver dans sa marche de femme éprise de justice et de liberté. C’est dans ce sens qu’elle écrit sans ambages en parlant de son père : “Le silence remonte à dix ans avant mon départ de l’Algérie. J’écris pour mettre des mots dans ce gouffre entre nous…”. Elle continue de dire, en écrivant et en prenant son courage à deux mains : “Tous ces mots qui s’appliquent à ma vie de femme libre, relève de la honte, du péché, de la luxure”. Un récit dont le silence sur sa vie est à l’origine, un récit qui a su briser ce silence avec la force du verbe et des mots crus vidés de toute crainte, qui expriment fidèlement les sentiments, les émotions et les pensées de l’auteur.Pour Malika, il y a lieu pour les femmes de se réapproprier un espace pour l’écriture, car si elles s’y mettront, elles changeront et réhabiliteront le regard masculin sur leur vie. Affirmer leur existence est un principe qui lui tient à cœur. Ecrire pour Malika Mokaddem est une forme de liberté et une manière d’“être à part entière”.

Hamid Meradji

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