Repose en paix Achour !

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Pas facile de Dire la douleur qu’engendre la perte d’un être cher. Seules les larmes le peuvent. C’est déjà fait. Je (excuse le « je » expressif)  te dis « azul », le seul mot que ton kabyle approximatif contrôlait. Mais cela n’altérait en rien ta kabylité. Comment pouvait-il en être autrement pour toi, le digne fils de ton père ! Oui Achour, Dda Lmuloud, ton père, ce brave vieux Kabyle parti avec rien de Tiroual, ce village des Ouacifs, au début des années cinquante, avec la détermination de subvenir aux besoins de sa famille. Cet « aghroum », il va le chercher dans l’est du pays : Sétif, Chelghoum El Aid, Mila et Ferdjioua. La vie n’a pas été facile pour lui. Ta naissance, au tout début de la guerre de libération, sera l’avènement qui aidera Da Lmouloud à surmonter les petites et les grandes misères. Ton père, l’analphabète qu’il était, plaçait l’école au dessus de tout, y compris au dessus de cet Aghroum qu’il était allé chercher à l’est du pays. « Ulac i ifen leqraya (rien ne valait le savoir)», pensait-il. Et c’est ainsi qu’il consentira  tous les sacrifices pour te « caser » chez les Pères Blancs à Constantine. Il ne te lâchera pas d’une semelle, jusqu’à l’obtention de ton bac. Tu deviendras médecin et la fierté de ton père et ta mère, Achour. Tu étais conscient du destin exceptionnel  et du chemin parcouru par tes parents, depuis ce village Tiroual. A travers eux, c’est le sacrifice de toute une génération  que tu encensais. A ton tour et à ta manière, tu donneras le meilleur de toi-même pour faire avancer les choses. Le combat pour la démocratie sera ton credo. Pour ce faire, tu, venais cycliquement  dans le centre du pays, notamment en Kabylie, te remettre à jour. Tu y venais surtout pour rencontrer ton ami feu Djafar Ouahioune.  Dans les années 90, tu m’apprends, sans te départir de ton sourire, que tu avais été destinataire d’une lettre de menace. Cette lettre de mauvais augures t’est parvenue, quelques jours après l’attentat terroriste qui a eu lieu au centre-ville de Ferdjioua.  Cette nuit-là tu te trouvais dehors, lorsque des coups de feu partaient dans tous les sens. Pendant que tout le monde fuyait, tu t’es arrêté pour porter secours à un policier touché : tu le traînera dans le magasin familial et lui prodigueras les premiers soins.  Eté 2004, nous roulions sur Tunis. Il faisait chaud cette nuit-là. A mi-chemin de Sousse, tu ralentis, avant de t’arrêter,  à la vue d’un accident de la circulation. Tu vas tout de suite t’enquérir de l’état de santé des passagers. Parmi les passagers, deux Algériens d’Azeffoun à bord d’un « véhicule clandestin ». Ayant constaté que leurs blessures étaient sans gravité tu as décidé  qu’ils allaient continuer le voyage avec nous. Arrivés à Sousse, tu leurs apporteras les soins complémentaires à l’hôpital.Tu continueras à les surveiller jusqu’à notre retour. C’était là un exemple de ta bonté et de ta générosité manifestes. Politiquement, tu rejoindras l’UDR qui deviendra plus tard MPA. La dernière fois qu’on s’était vus, il y a près de deux semaines, tu me semblais enthousiasmé par la structuration du parti dans ta région. Tu étais aussi sur un projet dont tu devais me parler, dès ton retour du Maroc. Tu ne m’en parleras pas : Dieu a voulu qu’un taxi te heurte à Boudouaou, avant d’embarquer pour le Maroc.  C’est la volonté du Divin.  Repose en paix frère !

                       

Tahar Ould amar

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