Les reserves des assurés

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Depuis son lancement en 2009, la carte Chifa, un dispositif de couverture de la sécurité sociale, ne cesse de se généraliser et être adopté par de nombreux assurés sociaux. 

Au niveau de la wilaya de Bouira, on compte plus de 250 000 assurés sociaux et autant de détenteurs de cartes Chifa. La généralisation de l’usage de la carte Chifa a été facilitée, notamment, par les efforts déployés par la Caisse Nationale des Assurés Sociaux (CNAS) locale qui a organisé des journées d’information et de sensibilisation, quant au mode d’emploi et de l’utilité de ladite carte. Toutefois, certains usagers ne semblent pas trouver leur compte dans cette fameuse carte aux services finalement très limités, avec ce plafonnement de l’ordonnance à 3 000 DA. En effet, pour un travailleur, soi-disant payé au SNMG (18.000 DA), et père de famille qui a plusieurs enfants à charge, il n’est pas évident de respecter souvent ce plafond fixé à 3000 DA pour une ordonnance, deux fois tous les trois mois. Si l’on compte le prix pratiqué pour une consultation chez le privé spécialiste ou généraliste, il est courant qu’une ordonnance atteigne, voir dépasse, ce prix et même plus. Dans le but d’en savoir plus sur le sujet, contact a été pris avec le directeur de la Cnas de Bouira, M. Dridri Makhlouf. Ce dernier préfère mettre en avant les annonces positives qui n’ont rien à voir avec le quotidien de l’assuré utilisateur de cette carte. Il y a, en effet, un grand contraste entre le discours positif du responsable, qui loue les avantages de la carte qui a certes apporté un plus, et les plaintes des assurés. Disons le tout de go, toutefois, M. Dridri n’est responsable en rien dans ces contraintes dont se plaint l’usager, notamment ce plafonnement de l’ordonnance fixé à 3000 DA, puisqu’il s’agit d’une réglementation nationale, mise en place par les concepteurs de cette carte, à la base. De prime abord, notre interlocuteur a donc tenu à expliquer les avantages de cette carte: « La carte Chifa sert, en premier lieu, à rembourser sans avoir à en formuler la demande, ni à remplir et présenter une feuille de soins. Désormais, nos assurés ne sont plus dans l’obligation de dépenser des frais chez le pharmaciens ». Il ajoutera qu’avec l’ancien système (carnet du tiers payant), les malades étaient contraints, dans certains cas, de s’endetter, ou même lésiner sur certains médicaments, faute d’argent. Avec la carte Chifa, l’assuré et ses ayants droits bénéficieront, à l’avance, des frais dans les pharmacies, mais aussi auprès de tous les médecins et de tous les établissements sanitaires conventionnés ». Concernant la procédure à suivre pour l’obtention de cette carte, pour ceux qui ne l’ont pas encore, Dridri déclarera: « Nous avons reçu des instructions fermes, de la part de notre tutelle, afin de la simplifier au maximum. Pour ce faire, l’assuré doit se présenter dans un centre de paiement muni d’une photo d’identité sur fond blanc, une photocopie de la carte d’identité et une photocopie de la carte de groupage sanguin et c’est tout ». Interrogé sur les structures d’accueil mises en place à travers le territoire de la wilaya dans le but de garantir aux assurés une entière prise en charge dans leur démarche d’obtention de cette carte médicale, notre vis-à-vis notera que tout a été mis en œuvre dans ce sens. « Pour Bouira, nous avons 14 centres de paiement répartis à travers les grandes agglomérations de la wilaya. Ces centres communiquent entre eux à travers un réseau Intranet, ce qui facilite grandement le traitement des dossiers », a-t-il dit. Et de rajouter : « Depuis la généralisation de la carte Chifa à travers le territoire national, l’assuré de Bouira peut se faire rembourser à Adrar, Annaba, Oran… etc.».  A propos du montant du remboursement en pharmacie, le directeur de la caisse des assurés sociaux de Bouira nous a informés qu’il est de 2 000 à 3 000 DA. Concrètement, les assurés sociaux peuvent se faire rembourser une ordonnance de 3 000 DA, à raison de deux par trimestre. Ce plafond de 3 000 DA ne touche pas, selon M. Dridri, les personnes atteintes de malades chroniques et les handicapés. « Dans le but de garantir une prise en charge complète pour nos assurés atteints d’une maladie chronique ou encore les personnes handicapées, le montant de remboursement des médicaments n’a pas été limité. Notre orgiasme se fait un devoir, celui d’accompagner les malades et leur simplifier l’existence», dira notre interlocuteur. S’agissant des contrôles effectués par les médecins de la CNAS, dans le but de vérifier si le malade a réellement besoin de tel ou tel médicament, notre vis-à-vis a noté que les personnes âgées de plus de 75ans et les handicapés moteurs ne sont pas tenus de se présenter au niveau des centres de paiement, c’est la CNAS qui va vers eux. « Notre ministre a été clair sur ce sujet. Nous devons assurer un service public irréprochable, et ce, en nous déplaçant aux domiciles de ces deux catégories de personnes pour établir un diagnostic », affirmera le directeur de la Cnas de Bouira, M. Dridri Makhlouf.  Pour l’usager, c’est un tout autre discours qui est mis en avant. Pour le commun des assurés, certes, l’introduction de la carte Chifa présente des avantages, mais également quelques inconvénients. « Avec par exemple 4 enfants à charge, ce qui est chose courante dans les familles algériennes une simple grippe qui touche un peu tout le monde à la maison t’oblige à débourser les frais des soins et des médicaments. Entre consultations et antibiotiques, le plafond des 3000 DA est vite dépassé et je me retrouve à remplir les feuilles de maladies comme au bon vieux temps et de les déposer à la CNAS. De plus, à Bouira, on n’autorise que trois feuilles de maladie à déposer chaque jour. Une contrainte de plus… C’est franchement mieux qu’avant, mais on espère qu’on va vite relever ce plafonnement de l’ordonnance à 3 000 DA. Les médicaments coûtent plus cher, tout a été relevé… », affirme Hamid, fonctionnaire de son état. Notre interlocuteur relèvera une carence de plus, lors de l’utilisation de la carte Chifa : « Lorsque je me rends chez mon pharmacien, je lui remets l’ordonnance avec la carte Chifa, il colle les vignettes au dos de l’ordonnance et je suis, ainsi, dans l’incapacité de me faire rembourser la consultation médicale. Il est vraiment temps que les médecins privés, généralistes et surtout les spécialistes, adhérent à la démarche du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, visant à généraliser l’utilisation de cette carte ». De leurs côté les médecins, notamment les spécialistes, jugent que les tarifs des consultations fixés par la tutelle sont faibles. Un diagnostic qui risque de ralentir cette démarche. Toutefois, l’utilisation de la carte Chifa sera généralisée à tous les laboratoires d’analyses médicales et, également, au niveau des cliniques privées. De ce fait, les spécialistes réticents seront-ils, alors, contraints de se plier aux directives dudit ministère ? De toutes les façons ce n’est pas encore le cas.        

 Ramdane B. et Hafidh B.

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