émouvant hommage à Keltoum

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Un vibrant hommage a été rendu, hier au théâtre régional Kateb Yacine, par la direction de la culture, à l’icône du théâtre et du cinéma algérien, Aïcha Adjouri, de son nom d’artiste Keltoum qu’elle a adopté en hommage à la diva de la chanson arabe Oum Kelthoum.

En marge de cet événement, une exposition autour du parcours de l’artiste a été organisée. Un diaporama sur le même thème été projeté de même qu’il a été procédé à une séance de témoignages sur sa vie, par ses amis et artistes, tels Ouahiba Zekal, Mohamed Hilmi, Fatiha Berbere, Najet Taibouni, Said Hilmi, Tahar Laamiri et d’autres. Née un 4 avril 1916 à Blida, Keltoum fut découverte par Mahieddine Bachtarzi qui l’a prise sous son aile et lui a appris les rudiments du métier de comédienne. Elle joua dans beaucoup de pièces à succès et incarna des rôles divers. A côté du théâtre, elle excellait aussi au chant et en dance, d’ailleurs, elle a, à son actif, cinq disques. Elle connut le summum de sa gloire grâce au rôle qu’elle a interprète dans le film  « Le vent des Aurès », et fut propulsée au rang de star mondialement reconnue grâce à sa majestueuse interprétation dans le film « Chroniques des années de braises » réalisé par Mohamed Lakhdar Hamina qui a raflé la palme d’or au festival de Canne en 1973. Elle joua aussi dans Hassan Terro, Les folles années du twist… En somme, Keltoum était une grande comédienne dotée d’une grande intelligence, reconnue par ses pairs et par le public cinéphile ou amateur du 4e art. Le premier responsable du secteur de la culture à Tizi-Ouzou, M Ould Ali, et en présence de Nabil Adjouri, neveu de Keltoum, très ému par cette initiative, déclarera à l’occasion : « C’est un devoir pour notre département de rendre hommages aux hommes et aux femmes qui ont laissé une empreinte indélébile dans le paysage culturel algérien et qui ont beaucoup donné d’eux-mêmes pour son rayonnement…». Mohamed Hilmi, quant à lui, déclarera que « Keltoum a fait son baptême de feu sur les planches de Kabylie au niveau de la salle des fêtes de Tizi-Ouzou. C’est d’ici qu’elle a pris son envol vers une destinée artistique hors du commun, c’est ici que tout a commencé ». Il enchaînera : « Keltoum a été la clé qui a ouvert les portes du théâtre aux femmes algériennes… J’ai connu à ses cotés le bonheur des planches de l’opéra. Elle fut une vedette de la radio, des planches et de l’écran… ». L’intervenant déplorera, néanmoins, l’ingratitude qui a profondément affecté Keltoum, notamment quand ont lui avait signifié sa mise en retraite en 1987.  Mohamed Hilmi nous a confié en marge, qu’il finalisé la préparation d’un feuilleton traitant de l’histoire du théâtre algérien. « Ce feuilleton est un hommage à mes amis de la famille artistique et aux fondateurs du théâtre algérien, morts ou encore en vie, car j’ai peur de l’oubli. Il est impératif de donner un élan à la reprise de l’activité artistique et de donner à l’artiste le statut qu’il mérite…» ajoutera-t-il. Un autre homme de culture, Tahar Lamiri en l’occurrence, dira : « Keltoum était une artiste complète, à la fois chanteuse, danseuse et comédienne, mais également organisatrice de spectacles à grand succès. Ce n’était pas chose aisée pour une femme d’évoluer dans le milieu artistique, un monde réputé pour les préjugés qui l’entourent. Keltoum a réussi à s’imposer par son talent, c’est l’icône du théâtre algérien ». En marge de cet événement, Mme Ouahiba Zekal, comédienne, nous dira au sujet de la place de l’artiste dans la société et du fameux statut qui lui fait défaut, que « depuis l’indépendance, on attend ce fameux statut de l’artiste, mais jusqu’à présent, il n’y a que des promesses et rien de concret. On espère qu’un jour l’artiste aura droit à un statut ». Pour ce qui est de Keltoum, elle nous dira : « C’est une grande Dame. Elle a laissé son empreinte dans l’histoire du théâtre et du cinéma algérien, elle a marqué toute une génération, avec dignité talent et amour. Ce fut la première femme à monter sur scène et qui nous a ouvert la voie. Elle a partagé l’affiche avec de grands noms du cinéma et du théâtre, tels Rachid Ksentini et Mahieddine Bachtarzi ».  Said Hilmi, pour sa part, dira : « Keltoum a eu des débuts difficiles, car faire du théâtre n’était pas chose aisée pour une femme. Mais elle est allé jusqu’au bout de ses rêves… ».  Fatiha Berbere, autre grande figure de la scène artistique algérienne, nous déclarera à son tour :« Si je suis là devant vous, c’est grâce à Keltoum qui nous a ouvert la voie… j ai partagé l’affiche avec elle, à mes débuts, dans une pièce de Molière intitulée Les femmes savantes, elle m’a beaucoup encouragée, c’était une grande Dame, discrète et intelligente, toujours la main sur le cœur ». La présentation du diaporama fut très émouvante. Tous les grands noms de la scène culturelle algérienne qui ont salué le grand professionnalisme de Keltoum, à l’image des cinéastes Mohamed Lakhdar Hamina, Mohamed Slim Siad, Lamine Merbah. Pour clôturer cet hommage mémorable, une pièce de Fetmouche intitulée « tamettuth-ni », du théâtre régional de Béjaïa a été jouée sur les planche du théatre Kateb Yacine.

Karima Talis

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