La pêche blanche d’Ath Mansour, ou le destin d’un «label» tombé en désuétude

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Que reste-t-il, aujourd’hui, de ces mythiques vergers qui faisaient, autrefois, la renommée d’Ath Mansour? Rien… ou si, une chose: les souvenirs! Ath Mansour, était connu pour ses verdoyants et étendus vergers où toutes sortes d’arbres, qui pouvaient pousser sur ses terres, étaient plantées. Des amandiers aux pommiers en passant par les orangers, les figuiers, les grenadiers et «la spécialité» locale: les pêchers. En effet, ces arbres fruitiers étaient plantés en exubérance dans cette localité laquelle se targuait d’avoir ce fruit, rare, faut-il le souligner, dans la région. D’ailleurs, ce fruit a un prénom, «la pêche blanche d’Ath Mansour». Comme un label, cette pêche bien du terroir, faisait saliver les gens, rien qu’à l’évocation de son nom, alors à l’avoir entre ses mains…! Charnue et «partagée» entre deux couleurs, le vert clair et le jaune mat, ce fruit, aux vertus médicinales insoupçonnées, mûrissait entre septembre et octobre, à l’inverse de l’autre pêche de couleur rouge. Ce qui fait prolonger la consommation de ce fruit de l’été à l’automne! La pêche blanche, jadis, était produite à profusion dans les jardins, jusqu’à alimenter les marché de la région. Cela ne fut possible que par le concours de ces paysans très connaisseurs en arboriculture et surtout qui affectionnaient le travail de la terre. Dans les marchés, ce fruit, qui, faut-il le souligner, se trouvait en haut de l’affiche des fruits produits dans la localité s’exportait bien et l’on commandait de partout, à l’avance, des quintaux pour la revente dans d’autres localités. C’était le temps où l’arboriculture était, presque, la seule source de rente et de vie pour les habitants de la commune d’Ath Mansour. Des vieux se souviennent de cette époque chargée d’émotion et d’amour pour la terre et le travail collectif! A Ath Bouali, dans la même commune, des jardins des cultures maraîchères et d’arbres fruitiers constituaient le décor paradisiaque de ce village, qui trône au sommet d’une colline. «Tibhirine» ou les jardins, c’est ce nom qui revenait d’une manière récurrente dans la bouche des habitants. Le jardin, c’était l’usine, l’école, la cantine, le lieu d’échange des dernières informations de la localité le lieu où l’on apprenait l’entraide et l’amour de son prochain…Aujourd’hui, le jardin, «le mythe» est tombé en désuétude! Le béton avance inexorablement. Les terres fertiles sont bétonnées à une vitesse vertigineuse. Des habitations poussent à tout bout de champs. Des oliviers centenaires sont arrachés, sans état d’âme, pour les remplacer par des tas de béton. Les fiers pêchers qui faisaient, autrefois, la fierté des habitants d’Ath Mansour meurent et ne sont pas remplacés. Il ne subsiste, à présent, que quelques dizaines qui produisent encore une petite quantité de pêches, qui n’iront, malheureusement, pas rejoindre les étals des marchés de la région, car la production est insuffisante. Les paysans, qui s’occupaient affectueusement de cette culture, sont tous partis et avec eux le savoir-faire arboricole autochtone. Les nouvelles générations, qui ont d’autres préoccupations, n’ont malheureusement pas continué dans la lignée de leurs aïeux, pour perpétuer cette culture et maintenir l’exceptionnel label de cette pêche blanche d’Ath Mansour. Toutefois, l’espoir demeure toujours vivant, puisqu’un paysan de Taourirt, propriétaire de quelque 200 pêchers, s’occupe toujours de cette pêche du terroir, en la cultivant pour la continuité. Mais, le problème auquel il est confronté nous dit-il, c’est le problème des eaux de l’oued Sahel, qui grignotent, à chaque crue, ses terres, et emportent des pêchers.

Y. Samir

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