Quel rôle pour le pouvoir législatif ?

Partager

Par Amar Naït Messaoud

Les débats au sein de l’Assemblée populaire nationale ont lieu dans une atmosphère de quasi démission. En effet, pour poser des questions orales aux membres du gouvernement, les députés n’arrivent pas à remplir les sièges qui leur sont affectés dans l’enceinte de l’hémicycle. En matière de discipline, les structures politiques du pays, y compris celles où la représentativité populaire est censée jouer en faveur d’une participation maximale, sont sans doute en train de vivre le même degré de relâchement que les administrations publiques pour lesquelles la composition du nouveau gouvernement a prévu un ministère dit de la Réforme du service public. Ira-t-on jusqu’à interpeller les députés en les soumettant à une feuille de pointage, ou bien mobiliser à leur endroit les services du nouveau ministère ? Pourtant, la conjoncture que vit le pays sur tous les plans invite à une discipline de fer dans tous les domaines. Elle invite surtout à une profonde réflexion collective sur le devenir immédiat du pays aussi bien sur le plan politique que sur le plan économique. Dix-huit mois après l’élection de la nouvelle Assemblée populaire nationale, avec moins de 50 % de participation, les citoyens sont en droit de se poser la question de savoir qu’est-ce qui a changé dans le paysage politique dans notre pays, et surtout quelle est la contribution des nouveaux députés dans l’effort du pays à donner une meilleure visibilité pour son économie. Car, qu’on le veuille ou non, et ce malgré l’excès de matraquage qui se fait à propos des prochaines échéances, présidentielle et la nouvelle Constitution, l’économique demeure le facteur déterminant par excellence dans la vie nationale et la stabilité générale du pays. Mieux encore, la médiocrité politique que vit l’Algérie depuis plus de vingt ans, un pluralisme formel qui n’arrive pas à s’agréger en un corpus viable ni à évoluer en pratiques quotidiennes, est elle-même goulûment sustentée par la perversion économique qui a pour nom la rente. Cette dernière a octroyé une longévité exceptionnelle au sous-développement politique qui prend en otages le pays et ses hommes. Depuis la semaine passée, les députés de l’APN ont, dans le cadre de la discussion de la loi de finances de l’année 2014, adressé des questions aux membres du gouvernement sur le retard de la diversification de l’économie algérienne. Ce sont des interrogations d’autant plus importantes que des signes d’essoufflement de notre économie commencent à se manifester au grand jour. La dévaluation du dinar, que le gouvernement, dans une inutile subtilité de langage appelle ‘’dépréciation’’, est un des signes qui ne trompent pas. Les experts ne se sont pas trompés en indiquant que la vraie valeur du dinar est au square Port-Saïd et non à la Banque d’Algérie. Le glissement de la monnaie nationale, dans le sens de la régression, ne fait, en tout cas, que traduire une amère réalité celle d’une économie ‘’minière’’, basée sur l’extraction et l’exportation brute, et qui n’arrive pas à faire le bond salutaire de fructifier son argent dans une heureuse diversification basée sur l’agriculture, l’agroalimentaire, le tourisme, les nouvelles technologies de l’information et de la communication et d’autres activités qui puissent inscrire notre économie dans l’effort de création et de production. Le gouvernement de Abdelmalek Sellal, en voulant juguler le désinvestissement industriel et installer un nouveau climat des affaires, est sans doute mal servi par la conjoncture politique, faite d’échéances importantes, de manœuvres de tout acabit et de spéculations sans fin. En supplantant le président de la République dans ses contacts avec les populations, il semble être sur tous les fronts. De même, n’importe quel geste de sa part, aussi banal ou ingénu soit-il, est interprété ipso facto  comme politique et est jugé comme ‘’cas pendable’’. La vie institutionnelle du pays n’a pas été fondamentalement bouleversée par l’augmentation du nombre de députés à 462, alors qu’il était de 389 dans la législature précédente. Ce qui a été retenu par l’opinion publique, c’est surtout la rétribution de ces représentants du peuple dont on dit qu’elle atteindrait les 40 millions de centimes, soit plus de 22 fois le salaire nationale minimum garanti. En ‘’enjoignant’’ au gouvernement de diversifier l’économie du pays, les députés sont supposés accompagner les pouvoirs publics dans la facilitation de l’acte d’investissement, dans le règlement des assiettes foncières et dans d’autres questions aussi cruciales qui conditionnent cette nouvelle et saine ambition qui a pour nom diversification de l’économie nationale. L’idéal d’une modernité politique dans notre pays ne peut pas faire l’économie d’une contribution du pouvoir législatif au rehaussement de nos performances économiques et sociales.

A. N. M.

Partager