Le dossier passe un cap

Partager

Le dossier de classement de la maison d’enfance de l’illustre compositeur algérien Mohamed Iguerbouchene a été présenté avant-hier, lors d’une cérémonie d’hommage au défunt artiste, par le service patrimoine de la direction de la culture, au niveau de la maison de la culture Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou.

La cérémonie a démarré dans la matinée, en présence des cadres de la culture, d’un public nombreux et du président de l’association ‘’Mohamed Iguerbouchene’’. Ce dernier dira d’emblée : «c’est la main dans la main que nous parviendrons à rendre à cet artiste de grand talent la place qui lui est due…». Deux expositions étaient installées dans le hall d’entrée de la structure. L’une proposait des photos et documents sur la vie et l’oeuvre du compositeur et l’autre des photos montrant la maison Iguerbouchen. En marge de cette journée d’hommage et d’étude sur la vie et l’œuvre de Mohamed Iguerbouchene, le dossier du classement de la maison de l’auteur compositeur fut présenté par les cadres du service patrimoine de la direction de la culture de Tizi-Ouzou. Le dossier a ainsi passé le cap de la commission de wilaya qui statue sur les biens culturels au niveau local. Il passera prochainement devant la commission nationale des biens culturels. La maison Iguerbouchene se trouve au village Aït Ouchène, à 8 kms du chef-lieu de la commune d’Aghribs, à 50 kms du chef-lieu de la wilaya de Tizi-Ouzou. Selon la présentation faite par un cadre du service patrimoine, «la structure de cette maison ne peut faire l’objet d’une description détaillée et exhaustive, car elle est complètement en ruine. Sauf quelques pans de murs et les soubassements restants donnent une idée sur son architecture». Il ajoutera : «Le plan de cette maison traditionnelle kabyle et de forme trapézoïdale épousant parfaitement la topographie du site, en pente. Cela est bien illustré au niveau du mur Nord qui repose sur une grosse pierre formant ainsi son soubassement. Le mur Est qui comporte la porte d’entrée mesure 7,20m, celui du côté Ouest 8,66m. Ceux des deux côtés Nord et Sud mesurent respectivement 6,25m et 5,80m. Les murs sont construits en pierres sèches régulières bien agencées sans aucun liant. Leur grande épaisseur (70cm) procure à la bâtisse une forte emprise au sol et permet de faire face à la rudesse du climat de la zone montagneuse d’Aït Ouchène. Malgré l’usure du temps, la structure portante de la bâtisse a parfaitement résisté ce qui permet aujourd’hui de restituer la forme originelle de la maison. Les quelques pierres encore visibles au niveau de la devanture laisse en effet supposer l’existence d’une dépendance attachée à la maison. Elle pourrait s’agir éventuellement d’une cour, dont la surface approximative serait de 22m2 ». Deux concerts de musique classique ont été présentés au niveau de la salle de spectacle de la maison de culture par l’institut régional de musique de Bouira. Ils ont interprété deux œuvres d’Iguerbouchène, ‘’Gazala’’ et ‘’Omri’’. Le deuxième spectacle fut animé par l’atelier piano de la maison de culture Mouloud Mammeri. Mohamed Iguerbouchene est un illustre compositeur algérien, né le 13 novembre 1907 à Aït Ouchène, dans la commune d’Aghribs. Il intégra l’école à l’âge de six ans et y découvrit la musique. Il passait le plus clair de son temps à jouer des airs du terroir algérien avec sa flûte en bois. En 1914, la famille Iguerbouchène quitte Aït Ouchène pour la Casbah d’Alger. Ce changement n’affecte nullement le virtuose. Bien au contraire, il continuera à briller dans ses études et sa musique. Très vite, il apprit le solfège et le piano. C’est sa rencontre, en 1919, à 12 ans, avec le comte Fraser Roth, un riche et puissant lord anglais, qui bouleversera sa vie. Subjugué par l’extraordinaire mémoire musicale de cet enfant, le comte Roth décida alors avec la bénédiction de son père de prendre le petit Iguerbouchène sous son aile et de l’inscrire au Norton Collège, ensuite au « Royal Academy of music » de Londres, où il a reçu l’enseignement du célèbre professeur Levingston. En 1924, il entre au conservatoire supérieur de musique de Vienne. Le jeune prodige donne son premier concert à l’âge de 18 ans, à Bregenz en Autriche, où il exécutera deux rhapsodies (pièce musicale instrumentale de composition très libre et d’inspiration populaire) mauresques sur des thèmes spécifiquement algériens. Il composera une partition musicale pour un film intitulé « Aziza » De Mohamed Zinet. Il composera également la musique d’un court métrage sur la Casbah intitulé «Dzayer». Mohamed Iguerbouchène a écrit plus de 160 rhapsodies, toute d’inspiration algériennes. Dans les années 1950, Iguerbouchène débute comme chef d’orchestre aux Elak (Emissions de langues arabe et kabyle) de Radio Alger. Il y fut également présentateur d’émissions musico-ethnologiques. Il léguera à la prospérité plus de deux cents œuvres modernes d’inspiration orientale et occidentale. Iguerbouchène n’était pas qu’un auteur compositeur, il fut aussi un homme de Lettres, initié par Albert Camus l’un de ses grands amis. Il s’exprimait couramment dans 18 langues dont le Russe et le Japonais. Il s’éteint à l’âge de 59 ans, en juillet 1966, des suites d’une langue maladie.

Karima Talis

Partager