Le chef-lieu de la wilaya de Bouira concentre la majorité des emplois réservés au fonctionnaire des administrations publiques. S’y ajoutent également les postes d’enseignants et des entreprises publiques, ce qui donne, à la ville une image de fourmillière entre 7h 30 et 8 heures du matin et après 16 heures et demie. Il se trouve que la majorité de ce personnel n’habite pas la ville de Bouira. Ils viennent de Lakhdaria (50 km), Sour El Ghozlane (32 km), de M’chedallah et même d’Aghbalou (plus de 50 km). Ces travailleurs empruntent généralement les transports publics (cars, fourgons, taxis) ou font de l’autostop.Mais, en ces journées hivernales très courtes, les transporteurs préfèrent rentrer assez tôt chez eux laissant les voyageurs poireauter dans les stations ou sur le bord de la route.Pour constater le désarroi de ces serviteurs de l’Etat, il suffit de se rendre à la gare routière de la ville ou dans la station de fourgons située à la sortie est de Bouira. A 17 heures, aucun véhicule de transport public ne pointe le nez dans la station de M’chedallah. Un informaticien devant se rendre à M’zarir (20 km après M’chedallah, au pied de Lalla Khedidja) perd espoir après une heure d’attente. Il préfère rebrousser chemin pour passer la nuit chez un ami célibataire de la ville. Lui, il a déniché un “gîte” pour une nuit, et les autres ? Ce sont des dizaines de voyageurs angoissés, souvent convoités par les taxis urbains qui font des allers retours devant la station pour proposer leurs services, généralement des courses allant de 600 à 1000 DA. Un chef de service travaillant à la wilaya se résoud à quitter son poste à 16 heures pour prendre le fourgon de Lakhdaria, sous une pluie battante, il a attendu une demi-heure pour accèder au fourgon magique dans une bousculade générale mêlant hommes et femmes, jeunes et vieux. Le lendemain, il nous apprendra que le voyage a duré deux heures suite à un bouchon dans les virages d’Errich. Il rentre chez lui à 19 heures content quand même de retrouver ses enfants.Le cas le plus extrême est sans doute le cas de ce fonctionnaire passant la nuit dans son bureau, originaire de Lakhdaria, son salaire ne lui permet pas de faire la navette quotidiennement à raison de 80 DA par jour.Après 18 heures, la ville de Bouira se vide de ses travailleurs. Des groupuscules de voyageurs font encore les cent pas sur le pont de Oued D’hous dans l’espoir de dénicher une connaissance ou un taxi qui les prendrait sur Chorfa (50 km à l’est de Bouira). le voile de la nuit se fait plus pesant. C’est un bus de Sétif qui s’arrête pour embarquer tout le groupe. Il les déposera à Maillot-gare. Il leur restera presque 10 km pour arriver chez eux.
Amar Naït Messaoud
