Le «bientôt» qui dure

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Le dossier des haouchs de la ville de Bouira est au point mort. Les autorités locales, à leur tête le wali, ne cessent de demander aux locataires de «faire preuve de patience», en attendant le règlement de leur situation.

Mais selon les locataires, les pouvoirs publics les ont «oubliés». Ils disent avoir perdu l’espoir qu’un jour, ils puissent bénéficier d’un logement décent. Les résidents desdits haouchs n’exigent pas un relogement dans l’immédiat, mais un document qui attesterait que leur cas a été pris en charge, ce qui les aiderait à patienter. Une sorte de «preuve de bonne foi» des autorités. En effet, au mois de janvier dernier, des actes de propriétés devaient leur être délivrés, mais pour des raisons qui demeurent encore obscures, il n’en a rien été. D’après certains habitants des haouchs, les autorités locales «se moquent d’eux», comme nous le dira M. Rachid Ouchène : «On nous a bercés de fausses promesses. A chaque fois, on nous dit que c’est pour bientôt, mais ce bientôt dure depuis presque une année. Nous commence sérieusement à nous impatienter». Il ajoutera : «La wali, à travers ses déclarations dans la presse écrite ou à la radio, nous dit de patienter, mais je voudrais qu’il sache que nous ne réclamons pas des logements dans les prochains jours, mais juste un document. Est-ce trop demandé ? Demande-t-on l’impossible ? Non, je ne crois pas !». Pour d’autres habitants, le ton est carrément menaçant : «Jusque-là nous avons été très calmes, trop calme même ! Nous aurions pu, comme le font d’autres, bloquer la route, enflammer des pneus et semer la pagaille. Mais non, nous avons privilégié la voie de la sagesse et de la retenue», diront des habitants du haouch Abane Ramdane, sis au plein cœur du chef-lieu de la wilaya. D’autres enchaîneront, plus virulents : «Mais à ce que nous voyons, la sagesse ne nous mène nulle part. Comme nous l’avons constaté dès qu’on entreprend une action de rue, les autorités accourent et prêtent une oreille attentive. Et bien, si c’est la seule solution pour nous faire entendre, c’est une chose aisée», ont-ils menacé.  M. Azzedine Aït Kaci, l’un des membres actifs de la coordination des locataires des haouchs de Bouira, nous dira néanmoins que leur mouvement se voulait «pacifique et légal» : «Vous savez, nous sommes des citoyens qui ne réclament que leur droit au logement. Un droit qui est, à ma connaissance, garanti par la constitution. De ce fait, nous avons préféré laisser de côté les marches et autres manifestations afin d’entamer un dialogue serein et apaisé avec les autorités», a-t-il tenu à préciser. Par la suite, notre interlocuteur soulignera le fait que lui et ses camarades sont prêts à s’acquitter de leur d&ucirc,; pour peu que les pouvoirs publics daignent entamer le processus de livraison des actes de propriétés : «Cela fait près de 11 mois que nous attendons ! Nos logements sont quasiment achevés et conformément aux directives de M. Sellal, à partir d’un taux précis d’achèvement des travaux, les souscripteurs peuvent recevoir leurs affectations. Dans notre cas, nous constatons et déplorons le silence radio des autorités». Il faut dire que ces locataires vivent, ou plutôt survivent, dans des conditions des plus déplorables. Insalubrité et exiguïté sont le lot quotidien de ces habitants. «Nous vivons comme des animaux en cage», dira M. Laalami, locataire au niveau du haouch Hadda. Il ajoutera : «Cela fait près de 60 ans que notre situation va de mal en pis, sans qu’aucun responsable ne lève le petit doigt pour nous ! Je suis las de cette misère, las de cette vie ! Je suis désespéré de voir mes enfants grandir parmi les rats ! Pourquoi tant de mépris, pourquoi tant de négligence et de souffrance. Pourquoi?», s’est-il indigné. Son voisin M. Kamel Iddiri abondera dans le même sens, en soulignant l’extrême précarité qui caractérise leur quotidien : «Personnellement, la seule raison qui me maintient en vie, ce sont mes enfants ! Sans eux, j’aurais mis fin à mes jours. Vivre dans la précarité la misère et la vétusté ce n’est pas une vie. Même la plus vile des créatures ne voudrait pas de cette vie-là», s’est-il exclamé. 

Ramdane Bourahla

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