La sardine toujours intouchable

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Le prix de la sardine est reparti à la hausse, avant- hier. Au marché du poisson de la ville de Tizi-Ouzou, elle est cédée à 500 dinars le kilo, contre 400 dinars la veille, et seulement 250 à 300 dinars, lundi, mardi et mercredi derniers. L’espace réservé à la poissonnerie, près du marché couvert de la ville de Tizi-Ouzou, était très bien achalandé avant- hier matin. Les poissons pélagiques, entre sardines, anchois et maquereaux, dominent les étalages. Ils sont nombreux à proposer à la vente ces poissons bleus dont les consommateurs locaux raffolent. Ça crie de tous les coins : «la matinale !» ; « la vraie sardine, la bleue… des anchois de premier choix !». Les vendeurs rivalisent en qualificatifs rien que pour attirer les clients. Mais ce vendredi matin, ça ne se bouscule pas comme tous les vendredis. Les vendeurs ont beau arroser leurs marchandises d’eau fraîche et encenser les passants de belles paroles, les affaires sentent très mauvais : «Monsieur, je vous la cède à 450 dinars le kilo, rien que pour vous !», tenta désespérément un vendeur devant un sexagénaire. Celui-ci balaie d’un regard furtif les cagots de sardines et d’anchois près desquels il s’est furtivement arrêté. Le vendeur tente de «trainer» l’homme vers ses étals. Le sexagénaire ne bronche pas. Sa mine n’est pas joviale. «Elle est vraiment chère, aujourd’hui, alors que nous ne sommes pas encore en période de reproduction. La pêche de la sardine et d’anchois n’est pas encore interdite », nous dira t-il. En face, il y a un très grand étalage de toutes sortes de poissons. Ils sont trois à se mettre derrière et à énoncer les espèces qu’ils ont étalées, mais pas les prix. Ces derniers ne sont annoncés que lorsque le client s’approche. «500 dinars la sardine, c’est la bleue de Béni K’sila. Monsieur, voilà l’anchois de Dellys, elle est fraiche et matinale », nous annonça un homme trapu, tenant une bassine de couleur verte servant d’ustensile pour la pesée. «Si vous aimez le thon rouge, je vous le cède à 1500 dinars le kilo ou bien l’espadon à 2000 dinars le kilo ?». «Rien que ça !», réplique un homme qui vient juste de s’arrêter pour voir les produits et sonder les prix. Sur la gauche de ce grand étalage, un autre vendeur tenta, lui aussi, de nous drainer vers sa marchandise. Bien que la période de reproduction des pélagiques n’est qu’à un mois, les prix ont pris un réel envol qui a surpris les habitués de ce marché. C’est devenu une tradition culinaire hebdomadaire pour nombre de fonctionnaires que de mettre de la sardine, ou du poisson, dans le plat du midi de chaque vendredi. Mais beaucoup d’entre eux semblent avoir renoncé pour le «vendredi» d’hier. Le maquereau, cédé habituellement entre 600 et 800 dinars le kilo, était proposé à 1400 dinars hier. Très prisé par les parents qui aiment gâter leurs enfants et s’occuper de leur santé en raison de ses apports en gras et en oméga 3, ces acides gras insaturés à la mode dans le jargon «conso» des bourses moyennes, ce poisson bleu que l’on peut également acheter à la pièce, était inaccessible hier. Il n’était d’ailleurs proposé qu’en petites quantités. Plus chère encore, la crevette est proposée à 1500 dinars, alors que la royale est à 2000 dinars. D’ailleurs, dans tout ce marché de poissons, ces deux espèces ne sont étalées que dans deux cagots. Un des vendeurs au niveau de ce marché nous a livré quelques raisons de cette envolée soudaine des prix. Lui qui ne tenait que quatre caisses, avant- hier, nous dira que les pêcheurs des ports de Dellys, Azeffoun, Bouharoun et Béni K’sila ont été contraints de rallier les ports plus tôt que prévu à cause d’un courant marin oriental très puissant. «Ce matin, la marchandise était très rare dans ces ports. D’ailleurs, nous avons eu du mal à négocier le prix de gros de la sardine, proposée sur place à 450 dinars le kilo, ils avaient une très mauvaise pêche, la nuit, alors, ils négocient le peu qu’ils ont ramené du large au prix fort. Quand à la marchandise acheminée depuis deux jours, de Mostaganem, elle est moins chère, mais elle est moins fraiche aussi», nous dira notre interlocuteur. Celui-ci prévoit une autre envolée pour les semaines à venir, en raison de l’interdiction de la pêche des pélagiques, à la faveur de l’entame de la période de reproduction, dés le mois le juin qui s’annonce.

M.A.T.

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