Hamid Grine possède l’art de l’aphorisme. C’est ce que l’on décèle dans son dernier livre “Cueille le jour avant la nuit”. Sa large érudition qu’il nous fait découvrir avec humilité nous impose la réflexion et nous donne à juger à leur valeur les actions, les pensées et les passions de l’homme. Il n’emploie pas les mots comme des incantations mais comme une monnaie d’échange de pensées clairement conçues.Son ouvrage nous livre des tableaux dont lesquels l’auteur s’expose courageusement en nous disant ce qu’il pense de la vie. Il ne nous fait pas la morale mais il tente de percer tout le secret de formation morale. L’auteur essaie sur sa propre conscience cette analyse pénétrante avant de la porter sur les autres en nous faisant promener dans les plus extraordinaires voyages à travers l’histoire avec en plus ses propres expériences illustrées par quelques souvenirs qui l’ont fait rire. Et puis quelle audace de convoquer sur la même scène Epicure, Montaigne, Matzneff, Abu Nuwas, Edith Piaf et Oum Kelthoum, en des récits de longueurs variables, dans lesquels sont cités d’autres personnages oubliés et qu’on a plaisir à retrouver.Avec “Cueille le jour”, Grine s’attaque à un genre (Nouvelle ?), mais reste tout aussi pointilliste. En épinglant un détail, il sait capter les ambiances et saisir l’air du temps. C’est un feu-follet qui écoute aux portes de la vie afin de restituer toute la fragilité, tous les fulgurants secrets. Epictète disait : « Si l’anse de ton amphore se brise, ne t’emporte pas, prend-la par l’autre anse ». Comme le philosophe, Grine nous conseille de prendre la vie du bon côté, tout en avertissant quand même que la vie n’est pas un amusement, mais un contrat sérieux.On ne s’appesantit pas à ses textes en voltige dont la prose est une guirlande d’instantanés ou de souvenirs que chacun a en soi. En même temps qu’il nous instruit, H.Grine dans son livre nous assène des vérités qu’on a tendance à oublier. »Dans l’antiquité certains empereurs romains mettaient à mort les émissaires porteurs de mauvaises nouvelles ». Hamid Grine en réchappe, il nous porte les bonnes.
Abderrahmane Zakad
