«Les choses ont été prises à la légère !»

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La réunion organisée par les services agricoles de la wilaya de Tizi-Ouzou, hier, au niveau de la Caisse régionale de la mutuelle agricole (CRMA), en vue de l’élection du conseil interprofessionnel de la filière viandes rouges, s’est transformée en une réunion de crise, pour débattre de l’évolution de l’épizootie de fièvre aphteuse. 

Les agriculteurs en colère ont fait avorter la réunion élective, demandant aux représentants des services agricoles un fonds spécial d’indemnisation pour ceux dont le bétail a été contaminé. Les éleveurs de la wilaya de Tizi-Ouzou sont montés aux créneaux pour dénoncer les services d’agriculture « démissionnaires », selon eux, dans la gestion de cette crise. M. Rachid Chebah, représentant de l’Union nationale des paysans algériens déclarera : « il y a des situations urgentes et sérieuses que vit le secteur de l’agriculteur de la wilaya de Tizi-Ouzou. Les éleveurs vivent une situation chaotique, le secteur est sinistré et les agriculteurs n’étaient même pas au courant des dangers de la fièvre aphteuse. Les responsables sont absents sur le terrain ». « Cette réunion n’aurait jamais dû avoir lieu, elle est secondaire. Toute la profession est en deuil, les éleveurs n’ont pas la tête à des élections qui ne leur serviront à rien ! Les choses ont été prises à la légère, ni campagne de sensibilisation ni rien d’autre. Les agriculteurs naviguent à vue…».  M. Rabah Ougmat, secrétaire général de l’association pour le développement de l’agriculture de la commune de Timizart (ADACT) dira : « La situation est dramatique. Nous avons trouvé 07 bêtes calcinées à Aghribs. L’agriculteur propriétaire, certainement paniqué les a brûlées de peur que les services agricoles ne mettent en quarantaine son exploitation… ». M. Djamel Brahimi, président de l’association El Baraka de Ain Zaouia, nous indiquera à son tour que la situation est alarmante surtout dans le  versant sud de la wilaya : « les services agricoles sont en retard d’une quinzaine de jours. Les premiers cas sont apparus bien avant jeudi, date à la quelle ils ont fait signer l’arrêté au wali… En réalité il y a plus de 127 bêtes abattues dans le versant sud de la wilaya, 70 rien qu’à Boghni… ».  Le Dr Idres Nacer, expert vétérinaire assermenté agréé de la cour et des tribunaux et membre du Conseil national des paysans Algériens (UNPA), rappellera, lors de la conférence qu’il a improvisée avec les agriculteurs présents à l’élection avortée du conseil interprofessionnel de la filière viandes rouges : « La région a déjà été touchée par une épizootie de fièvre aphteuse en 1999. C’est une maladie très contagieuse qui se transmet dans l’étable par le lait de la vache au veau, les urines, la paille, la peau et aussi par l’air. Dès qu’un foyer est déclaré un premier cercle doit se former en urgence sur un rayon de 03km. Aucune bête ne doit ni sortir ni rentrer à l’étable. Sur 10 km, c’est une zone de surveillance qui doit se mettre en place. Dans les pays développés, elle est  surveillée par l’armé et la gendarmerie. L’abattage doit être systématique sur un rayon de 3 km. Voilà la procédure réglementaire ! », explique le docteur Idres.   « La vaccination n’a jamais été une garantie à 100%. Mon conseil aux agriculteurs est qu’il faut désinfecter les écuries et vivre chez soi en autarcie, pour éviter de véhiculer le virus, le temps que la situation soit maîtrisée… ».  Pour M.  Loucif Abtout, inspecteur chef principal et représentant du directeur des services agricoles « La fièvre aphteuse connaît une évolution lente au niveau de la wilaya, car nous avons un cheptel beaucoup plus laitier que d’engraissement. Et c’est un cheptel qui est habitué à la vaccination. Il y a un certain matelas immunitaire installé au niveau de la wilaya et le risque vient du cheptel introduit de la wilaya de Sétif. La plupart des cas de contamination déclarés ici sont des animaux venus de là-bas », a-t-il déclaré ajoutant que : « Notre cheptel est plus ou moins protégé. L’évolution de la maladie s’est faite à partir d’animaux non vaccinés. On arrive toujours à faire 70% de couverture vaccinale dans la wilaya, 30% de notre cheptel est plus ou moins à haut risque plus les bêtes introduites des autres wilayas, notamment de Sétif, pour les cheptels à viande … ». « Il y aura une indemnisation pour les agriculteurs touchés par la fièvre aphteuse, mais pour l’heure, nous n’en connaissons pas le montant et elle touchera uniquement les éleveurs qui ont déclaré leurs bêtes malades… », précisera-t-il.                  

Karima Talis

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