L’eau se fait rare

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Les robinets sont à sec dans la wilaya de Béjaïa. Dans toutes les villes, des camions-citernes viennent à la rescousse des ménages.

Une nouvelle activité presque inconnue dans la région, qui  s’avère très florissante ces derniers jours. Des tracteurs et des camions-citernes sillonnent les quartiers de toutes les villes pour alimenter les foyers. 10 DA le bidon de cinq litres ou entre 600 et 1000 dinars la citerne de 1000 litres. Une situation jamais vécue. Malgré la réalisation du barrage de Tichy Haff, qui devait alimenter une vingtaine de communes de la wilaya et même certaines communes des wilayas limitrophes, la région continue à souffrir du manque d’eau potable, plus particulièrement en cette saison estivale. Les habitants d’Aït Melloul, de la commune de Tichy, n’ont pas eu une goutte d’eau depuis une quinzaine de jours. Ils disent ne plus pouvoir patienter plus longtemps. Pour se faire entendre, ils ont assiégé hier, la mairie et le siège de la daïra. « Le comble, c’est qu’il y a une importante fuite d’eau en plein centre-ville, et celle-ci date de plusieurs années, sans que les autorités ne bougent le petit doigt. Elle se situe à proximité du passage menant vers la route de la plage laquelle se déverse dans la mer alors que les robinets sont à sec dans les foyers », nous dira Nacer. Ironiquement, il ajoutera : « la commune de Tichy est en train d’augmenter le volume de la mer avec de l’eau potable ». À Aokas, une commune limitrophe, que ce soit en ville ou dans les quartiers situés sur les hauteurs, les citoyens recourent à l’achat d’eau par camion ou tracteur-citerne. Pour l’eau potable, les malheureux sont obligés d’avoir des stocks d’eau minérale. «  J’en suis arrivé à récupérer l’eau ayant servi au lavage du linge pour l’utiliser dans les toilettes », dira Abdelouahab, un père de famille habitant le centre-ville d’Aokas. Il ajoutera, d’un air dépité qu’il a utilisé depuis le début de l’été de la vaisselle jetable pour éviter que la maison soit envahie par la vaisselle sale.  Habitant le quartier de Taremant, Hafit lui déplore le fait qu’il soit obligé d’acheter une citerne d’eau à 600 dinars, chaque jour, alors que la fontaine publique d’Alliouen, un quartier limitrophe, coule à flot. Il suffit, préconnisera-t-il, de fermer cette fontaine pour avoir plus d’eau à la maison. Mais le maire de la localité ne l’entend pas de cette oreille. Il semblerait que certains citoyens tiennent à ce que cette fontaine, symbole historique de la région, continue à couler. À Tizi N’Berber, il y a tout le temps une file d’attente constituée de personnes, munies de jerricans et de bouteilles vides, qui attendent leur tour, à la fontaine publique de Bourbîa. D’ailleurs ce ne sont pas, tous, des habitants de la localité. Ils viennent d’Aokas et même de Béjaïa pour se ravitailler en eau, d’autant plus que cette eau de la source de Tadjeklayebth est réputée pour sa saveur. Toutes les communes de la wilaya sont touchées par le manque d’eau. À Souk El Tenine, le quartier d’Ath Boucherit est toujours confronté au problème d’eau malgré un projet de réalisation de deux réservoirs pour alimenter ce gros village. Le premier château d’eau est équipé mais, hélas, il attend, en vain, sa mise en service alors que le projet d’un deuxième château bute contre l’opposition d’un propriétaire terrien. Même si le maire avance le chiffre de 80 % des foyers qui seraient alimentés à partir du premier château, les habitants d’Ath Boucherit sont sans eau depuis plusieurs mois. Au quartier de Boulezazen, dans la commune de Melbou, une enveloppe de cinq milliards a été dégagée pour un projet de rénovation du réseau d’eau potable mais celui-ci tarde à se réaliser. Les habitants du quartier périphérique de Takliet (Béjaïa), dénoncent les pertes d’eau suite aux multiples fuites sur le réseau, alors que les robinets sont à sec et le projet de rénovation du réseau est à l’arrêt. Du côté de la vallée de la Soummam, ce sont les habitants de Taourirt, dans la commune de Béni Djellil, qui exigent de l’eau pour leurs foyers et l’irrigation de leurs vergers. Ils avaient déjà procédé à la fermeture de la mairie pour cette même doléance. Cette situation qui pénalise ainsi les citoyens de la wilaya de Béjaïa  a néanmoins fait le bonheur de certains, qui se sont vite reconvertis dans la vente d’eau par camion citerne provenant des  différentes sources. Pourtant, le projet de réalisation du barrage de Tichy Haff était perçu comme une solution définitive au problème d’eau dans la wilaya de Béjaïa. Ce barrage d’une capacité de 83 millions de mètres cube, réceptionné en grande pompe en 2010, n’a pas satisfait la demande des citoyens de la wilaya et de leurs hôtes saisonniers. En arrivant chaque été ces derniers quintuplent le nombre de consommateurs dans la wilaya. N’est-il pas temps de se pencher sérieusement sur ce problème épineux que vit la région hautement touristique donc appelée à satisfaire une demande croissante en été ?

A. Gana 

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