L'agriculture familiale à l'honneur

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L’Algérie célèbre aujourd’hui, 16 octobre, la Journée mondiale de l’alimentation correspondant à l’anniversaire de la naissance, en 1945, de l’Organisation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture (FAO). Pour cette année, cette organisation a fixé le thème sous l’intitulé: « Nourrir le monde, préserver la planète », afin de promouvoir une agriculture familiale et de la petite exploitation. C’est là un axe majeur développé à travers plusieurs pays du monde afin de lutter contre la faim et la pauvreté et de renforcer la sécurité alimentaire et nutritionnelle. L’Algérie qui importe une grande partie de ce qu’elle consomme, la facture alimentaire tourne autour de 12 milliards de dollars, est bien placée pour apprécier dans ses dimensions la dépendance alimentaire qui équivaut à une forme d’insécurité nationale, induite par un comportement rentier de son économie basée essentiellement sur les hydrocarbures. De grands et méritoires efforts ont été pourtant fournis par les pouvoirs publics pour réduire la facture alimentaire. Des opérations d’assainissement du foncier agricole jusqu’à l’augmentation des surfaces irriguées, en passant par les divers soutiens dont bénéficient les différentes filières agricoles, l’argent public a été mis au service de l’agriculture sans que les résultats puissent révolutionner la donne. Il y a lieu de reconnaître que, globalement, la ration alimentaire de l’Algérien s’est améliorée, même si cela ne s’est pas fait avec un esprit de justice sociale. L’amélioration du pouvoir d’achat a malheureusement entraîné des comportements de consommation parfois anarchiques allant jusqu’au gaspillage. Le gaspillage qui frappe le pain est sans doute unique dans le monde. Ce triste spectacle est surtout visible pendant le mois du Ramadhan dans les poubelles. Certains hommes politiques et experts n’ont pas hésité à proposer de supprimer le soutien des prix dont bénéficie la farine boulangère. Pour les pouvoirs publics, c’est là un dilemme qui n’est pas encore tranché. S’agissant des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) dont la réalisation est fixée pour 2015 à l’ensemble des pays de la planète, l’Algérie s’enorgueillit de les avoir réalisés, particulièrement l’élimination de l’extrême pauvreté par anticipation dès 2013. Si les recettes pétrolières ont permis une certaine performance en matière d’alimentation et de la qualité de la nutrition, cela ne signifie pas que ces acquis sont définitifs. La FAO insiste sur le développement durable et l’auto développement du secteur de l’agriculture. Il s’agit «d’accroître la visibilité de l’agriculture familiale et des petits exploitants », selon les termes de cette organisation. L’agriculture familiale à laquelle elle fait référence est promise à jouer un rôle majeur dans la lutte contre la faim et la pauvreté le renforcement de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, l’amélioration des moyens d’existence, la gestion des ressources naturelles, la protection de l’environnement et la réalisation du développement durable dans les zones rurales. La contribution des petites exploitations et des jardins familiaux à la sécurité alimentaire mondiale est reconnue par la FAO. Cette instance internationale assiste un grand nombre de pays du Sud dans le développement de cette tendance. On estime que les jardins potagers familiaux continuent, à hauteur d’un tiers, à l’alimentation de plusieurs pays européens. Les jardins potagers installés et entretenus, jadis, en Kabylie, à Tlemcen, à Tablat, dans la Mitidja et dans d’autres régions d’Algérie ont malheureusement cédé sous les coups de boutoirs d’une modernité approximative qui a élevé le système de salariat en typologie quasi unique d’acquisition de revenu et poussé des dizaines de milliers de ménages à rejoindre les villes. Le jardinage s’est estompé presque dans un mouvement parallèle avec l’artisanat. Ce sont les produits du terroir qui en prennent un coup. La plupart d’entre eux sont devenus un simple souvenir. La production de la cerise dans les villages de Larbaâ Nath Irathen et Aïn El Hammam pendant les années 1970 a fait de cette région une zone d’exportation vers des dizaines de wilayas. Avec les figues d’avant-saison, les figues sèches, l’huile d’olive, le gland doux de chêne vert ainsi que d’autres produits, une économie familiale, propre à la zone de montage, s’était constituée sur plusieurs siècles, ce qui permettait des échanges avec d’autres régions du pays (céréales, sel, dattes,…) par la formule du troc. Avec la technologie moderne, un tel capital aurait pu être pris en charge sur le plan de la transformation agroalimentaire, comme le font et le réussissent bien des pays méditerranéens qui ont le même écosystème que la Kabylie, à l’image de la Turquie. Pour prendre en charge le volet de développement rural, en dehors des filières bien connues de l’agriculture professionnelle, le ministère de l’Agriculture et du développement rural a lancé des projets de proximité de développement rural intégré (PPDRI) depuis 2009. Ces projets, toujours en cours et qui ont fait l’objet de contrats de performance avec les instances centrales et les conservations des forêts de wilayas, butent sur d’énormes problèmes de coordination intersectorielle qui limitent sensiblement leur portée. Même si, en théorie, ces projets sont censés être conçus à la base par les ménages ruraux, les lourdeurs et l’interventionnisme maladif de l’administration ont souvent détourné l’esprit de cet idéal.

Amar Naït Messaoud

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