La neuvième édition du Salon national du livre et multimédia amazighs a ouvert ses portes, hier, à la Maison de la culture Ali Zaamoum de Bouira.
Lors de notre présence sur les lieux, vers 9h30 du matin, il n’y avait qu’une faible affluence des visiteurs comme des exposants éditeurs. Il est vrai que ce salon, pourtant tant attendu par les éditeurs, les spécialistes et les lecteurs, n’offre que peu d’attractivité. Tout y est fait pour rebuter les visiteurs et les inciter à se détourner de la langue amazighe. Hier en effet, lors de son inauguration, les visiteurs ont pu assister à un spectacle des plus affligeants, qui n’honore en rien la culture en général et encore moins la culture amazighe. Une troupe de Zourna, tambour battant, dont les membres étaient vêtus d’habits traditionnels, ont donné pour ainsi dire le ton de ce salon, à savoir une «kermesse institutionnelle». D’ailleurs, un des passants, accompagné de sa petite fille et intrigué par tant de raffuts, s’est interrogé à propos de l’évènement : «C’est un spectacle pour enfants ? Si c’est le cas, j’emmène ma fille», a-t-il dit d’un air candide . Mais le ton a très vite changé quand il a appris qu’il s’agissait en fait, du salon national du livre amazigh. «C’est donc ça ! On continue à faire dans le folklore. C’est navrant !», lancera-t-il d’un ton désabusé. A l’intérieur de la Maison de la culture Ali Zaamoum, les éditeurs qui ont répondu à l’appel des organisateurs de ce salon, à savoir le Haut-commissariat à l’amazighité (HCA), étaient loin d’être nombreux. En effet, sur une trentaine de maisons d’éditions conviées, seule une quinzaine a répondu à l’appel, c’est du moins ce qu’il nous a été donné de constater sur place. La maison d’édition «Tafat», propose aux visiteurs de (re) découvrir l’ouvrage de feu Mohamed Boudiaf ‘’Où va l’Algérie ?’’ et d’autres livres dédiés à l’histoire de Tamazgha et ses rois, à l’instar de Jugurtha et Massinissa. «La production des œuvres en tamazight se porte relativement bien. Nous avons un lectorat qui va crescendo grâce à l’enseignement de cette langue, mais également à l’abondance de la production littéraire d’expression amazighe et à sa qualité littéraire», dira un éditeur rencontré sur les lieux. Certaines entreprises étatiques profitent de ce salon pour faire leur «promo». Algérie Poste par exemple a proposé aux visitateurs, durant la première journée, des timbres représentant la culture amazighe. Pour sa part, M. Djaffar Abdou, un militant invétéré de la cause et la culture amazighes, n’a pas hésité à fustiger le «silence complice» du HCA, vis-à-vis du seul et unique poste budgétaire accordé à l’enseignement de Tamazight à Bouira. «J’aurais aimé que le HCA ait des positions claires et nettes, notamment face à la marginalisation de l’enseignement de tamazight et le caractère facultatif qui lui est conféré. Mais hélas, cet organisme fuit les véritables problèmes et se concentre sur les futilités. C’est fort regrettable», a-t-il déploré. Toutefois, il y a lieu de souligner que M. El Hachemi Assad, SG du HCA, avait, lors de son point de presse, «condamné» cette situation, en la qualifiant d’«inacceptable». Les éditeurs, les invités comme les visiteurs s’accordent à dire que les organisateurs de ce salon, à leur tête le HCA, en collaboration avec la direction de la culture de Bouira, avaient mis les «bouchées doubles, mais dans le mauvais sens». «On ne peut promouvoir Tamazight avec une organisation qui s’apparente beaucoup plus à une kermesse populaire qu’à un salon digne de ce nom», fustigera Achène, un participant venu des Aurès, de Batna. Tous ces témoignages traduisent une exaspération quasi-unanime quant à l’organisation de ce genre d’évènement dans la wilaya de Bouira.
Ramdane B