à Bouira, comme ailleurs, les algériens s’apprêtent à accueillir le nouvel an comme il se doit.
Table garnie, mets en tous genres et autres confiseries «s’invitent» dans les chaumières pour régaler les gourmands, mais aussi et surtout pour commencer la nouvelle année sous de bons auspices. Parmi les gâteaux les plus prisés en cette période, on retrouve la fameuse « buche » en chocolat. Cette confiserie, composée d’une génoise et d’un nappage de chocolat et de crème chantilly, fait le bonheur des petits et grands. Mais à Bouira, une ville qui peine à se débarrasser de son conservatisme religieux, pour ne pas dire rétrograde, cette pâtisserie est en passe de devenir un produit qui n’a rien à envier à l’alcool du temps de la prohibition aux États-Unis. La cause ? Cette «buche» est perçue par certains, comme une tradition «importée» des pays occidentaux, et qui selon eux, «n’a rien à faire en Terre d’islam». Pourtant les Algériens dans leur ensemble et les Bouiris en particulier, n’ont pas poussé le «sacrilège» de déguster cette pâtisserie le soir du 24 décembre, synonyme de veille de Noël chez les Chrétiens. Elle est généralement servie le soir du 31 décembre, pour marquer le passage au nouvel an. Certaines boulangeries- pâtisserie, à l’échelle du chef-lieu de la wilaya de Bouira, ont carrément «banni» ce produit de leurs étalages. Certains, nous ont avoué sous couvert d’anonymat, qu’ils ont reçu «des menaces et des intimidations», afin qu’ils cessent de confectionner ce gâteau jugé par certains hurluberlus comme «Hram». «Depuis l’année dernière, j’ai arrêté de faire des buches. J’ai reçu des gens qui se prétendent salafistes et ils m’ont conseillé de ne plus propager la culture occidentale dans les foyers. Dès lors, je me suis abstenu», a témoigné ce boulanger-pâtissier, situé à Harkat. Pourtant, certains font encore de «la résistance» en continuant à proposer des buches à des prix attractifs, comme c’est le cas au niveau du Boulevard Zighout Youcef de Bouira. Certains citoyens, interrogés disent que le réveillon est avant toute chose une «fête conviviale, où toute la famille se retrouve. On le fait bien pour l’Aïd», dira Ahmed, un médecin généraliste implanté au quartier des 120 logements. Avant d’ajouter «Nous sommes musulmans comme nos ancêtres, mais accueillir la nouvelle année dans la joie autour d’un bon repas et une buche en guise de dessert, ne diminue en rien ni notre foi ni notre croyance». Pour d’autres, l’avis est tout autre. Cette buche est perçue comme une «agression» faite sur les traditions et les valeurs de la religion musulmane. Notre société s’est complètement occidentalisée. Notre pays est riche en tout, pourquoi doit-on encore importer des rites qui ne sont pas les nôtres ?», s’interrogera Madjid, un étudiant en sciences économiques. Avant de renchérir en déclarant «La buche, pour moi, est une bidaa (hérésie)» Pour certains imams de la République, fêter le réveillon s’apparente à un blasphème. Certains iront jusqu’à considérer les cartes de vœux comme un crime impardonnable et une injure à l’Islam. Quel est alors l’Algérien qui « oserait » fêter publiquement l’événement?
Ramdane.B