« Ce n’est que partie remise ». « Si notre tutelle campe sur sa position nous ferons de même ». Ces phrases qui sonnent telles des menaces, à peine voilées, émanent de la Coordination intersyndicale de l’éducation nationale (CIEN), l’initiatrice des deux jours de grève enclenchés depuis avant-hier qui ont connus un suivi massif des enseignants. En guise de réponse au département de Boubekeur Benbouzid, lors d’une conférence de presse animée hier, les cinq délégués des syndicats constituant la composante CIEN à savoir l’UNPEF, CLA, CNAPEST, SETE-Béjaïa et SATEF, ont indiqué que ce regain d’actions d’ores et déjà enclenché s’étalera dans la durée jusqu’à obtention de gain de cause. Pas de concessions, soulignent-ils tout en lançant un appel au ministère de tutelle d’amorcer le bras de fer en ouvrant les portes du dialogue et des négociations, faute de quoi, d’autres mouvements de protestations (rassemblements, grèves, sit-in …) seront déclenchés. « Nous ne voulons plus de promesses ni d’un dialogue alibi et encore moins de commissions insidieuses », lance un des délégués. Au-delà de la guerre des chiffres, la Coordination intersyndicale de l’éducation nationale, qui s’est abstenue de commenter le taux de suivi de 21% avancé par les collaborateurs de Benbouzid, afin d’éviter toute polémique a affiché sa réjouissance quant à l’écho favorable qu’a eu la grève. L’essentiel, est que le cri de détresse des travailleurs de l’éducation a été entendu, lance un des animateurs de la conférence. Le mouvement du débrayage qui a paralysé un nombre impressionnant d’écoles a, d’après ses initiateurs, mis en relief au moins deux choses. « La souveraineté de la base et l’échec de la tutelle à diviser l’action intersyndicale et l’unités des travailleurs de l’éducation ». La souveraineté de la base s’est traduite, d’après eux, par l’élan de mobilisation de tous les travailleurs de l’éducation qui « n’ont pas cédé devant les multiples intimidations de leur tutelle ». « C’est notre acquis » s’est réjoui Lamdani représentant du CNAPEST. Lui emboîtant le pas, Osmane du CLA estime que cette grève « confirme l’émergence d’un nouvel acteur social qui est la coordination intersyndicale et également la reconfiguration du champ syndical ». La convergence des trois paliers de l’éducation autour d’une action commune suffit largement pour « proclamer la réussite de la grève », indiquera en outre Osmane qui ajoute dans la foulée « une fois de plus, la base a démontré sa force et sa représentativité sur le terrain et c’est elle seule qui décidera des suites à donner après cette première action de protestation si la plate-forme de revendications ne sera pas satisfaite ». Sadali du SATEF, a enchaîné dans le même sens en disant que la « balle est désormais dans le camp de la tutelle ». Ce dernier, déplore sans aucun ambage la campagne de désinformation menée par la tutelle qui, d’après lui, avance « des chiffre erronés ». « Supposant que le taux de suivi est de 21%, cela imposera à notre tutelle d’ouvrir sine qua non le dialogue conformément à la loi qui stipule que dès que le taux de suivi d’une grève atteint les 20%, les négociations doivent être enclenchées », fait savoir Sadali. Le représentant du SETE-Bedjaia, Bekhouche en l’occurrence, souligne de son côté que « le combat continue tant que le marasme des enseignants n’est pas pris en compte. » Ce dernier, profite de cette occasion pour exhorter les sections du SETE de toutes les wilayas à rejoindre cette nouvelle dynamisation syndicale qui a « fortement réussi son premier coup ». Ider de l’UNPEF a dénoncé les intimidations brandies à l’encontre des grévistes. Il a fait savoir, à titre d’exemple, que le wali de Gelma a fait pression sur les enseignants de deux CEM à savoir, Mohamed Salah Zouaoui et Ben Djamil Abedelhamid, en les menaçant de représailles pour avoir suivi la grève. Pour ce qui est du gel de la prime de rendement décidé par la tutelle contre tous les grévistes, Ider ajoute que celle-ci » est calculée mensuellement et payée semestriellement, ce qui fait que notre tutelle n’a nullement le droit de la geler, c’est contre la loi. « . Devant l’insistance de la presse quant au taux de suivi, les animateurs de la conférence ont souligné que faute de moyens et surtout par « crainte d’induire l’opinion publique en erreur », la coordination souligne qu’elle n’a pas de chiffre exhaustif. Toutefois, elle souligne qu’approximativement, le taux de participation dépasserait largement les 65%. « C’est le taux avancé par les services de police », lançe l’un d’entre eux. Notons, pour terminer, que durant ces deux journées de grève, donc de grave crise dans le secteur de l’éducation, le ministre de tutelle, Benbouzid, était en conclave africain à… Addis Abéba.
Wassila Ould Hamouda
