Le tourisme entre mirage et réalité

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Parler de patrimoine et concomitamment de tourisme c’est, à bien des égards, aborder un sujet préoccupant pour la simple raison que l’un et l’autre s’entre nourrissent. 

Qu’en est-il de cette problématique en Kabylie. Le patrimoine matériel et immatériel, nonobstant les préoccupations, avérées ou du bout des lèvres, de qui de droit et qui sont, au demeurant, en deçà de ce qu’exige l’urgence. D’abord, parlons des conditions d’accueil, plus exactement du parc hôtelier public, il est dans un état lamentable. Sa clochardisation a atteint le seuil de l’innommable. «Bien que la tâche ne soit pas aisée, notre conviction est que le salut de l’établissement hôtelier face aux pressions nées de l’ouverture économique et des contraintes spécifiques à la profession (saisonnalité localisation de l’établissement, qualité des services et les faits sociaux) réside dans sa capacité à améliorer la performance de son management»,  décrète  Mme Djamila Fernane, maître-assistante en management des entreprises à l’université Mouloud-Mammeri de Tizi-Ouzou, dans un livre réquisitoire intitulé « Hôtellerie et le maillon faible en Algérie du tourisme », qu’elle vient de publier. Elle nous présente, de manière exhaustive, le bilan de la situation qui prévaut dans l’industrie touristique en Algérie. Les qualités de service, en amont et en aval, laissent à désirer : restauration infecte, état délabré des chambres, accueil froid, confort inexistant, en somme, c’est carrément la dilettante, le laisser-aller, le je-m’en-foutisme qui prévalent au grand dam des clients. Et pourtant, ce ne sont pas les attractions patrimoniales qui manquent dans la wilaya de Tizi-Ouzou. De par la variété de ses Richesses naturelles, la wilaya de Tizi-Ouzou est considérée comme une des régions les plus touristiques du pays. Elle renferme un potentiel naturel alternant entre un tourisme culturel, balnéaire (région côtière) et climatique (région de montagne) auquel il faut ajouter une richesse artisanale. La wilaya dispose d’un riche patrimoine archéologique dont une grande partie se trouve dans la zone côtière de Tigzirt et Azeffoun. Tigzirt a servi de site pour la construction d’une ville romaine. Parmi les restes du passage des romains, on peut citer le Temple du Génie qui date du IIIe siècle et la Basilique Chrétienne. L’agglomération d’Azeffoun (l’antique RUSAZUS) également recèle des vestiges de l’époque romaine, tels que les restes de muraille, conduite d’eau et d’importants thermes. Le massif du Djurdjura synonyme du massif kabyle constitue un immense gisement de pôles touristiques intégrant une infinie variété de produits. Tala-Guilef, Lalla-Khedidja, le lac d’Agoulmine, le Gouffre de Boussouil (1 259 m) les grottes du Macchabée, le Pic d’Azrou N’Thour, les cols de Tirourda (1 700 m) et de Tizi-N’koulal (1 600 m) sont parmi les sites les plus connus du Parc National du Djurdjura, favorables à la pratique du tourisme de montagne (sports d’hiver, randonnées pédestres, l’alpinisme et la spéléologie). Les forêts de Yakouren et de Mizrana sont propices également pour les randonnées sportives, les séjours écologiques et culturels. La faune endémique de la région est assez riche, celle giboyeuse en particulier (sangliers, lièvres, perdrix, étourneaux, grives et divers oiseaux de proie). L’attraction principale reste sans doute le singe magot (Macacus Sylvana), très prolifique dans les forêts de Yakouren et dans le massif du Djurdjura. En effet, pas moins de 213 sites ont été identifiés ces dernières années, mais leur sauvegarde et leur valorisation reste au-demeurant « balbutiante ». Ce patrimoine, notamment archéologique, est parasité surtout par le pillage par des personnes sans scrupules qui s’emparent de pièces aux valeurs historique, culturelle et mémorielle inestimables, soit pour orner leurs demeures ou s’en servir comme matériaux de construction. L’exemple est visible, comme le nez au milieu du visage, à Tigzirt aux abords des ruines romaines, des bâtisses dont les murs sont, ostentatoirement, au vu et au su de tout le monde, construites de pierres portant des sculptures et effigies antiques, en toutes impunités, ou encore les vendre au prix fort. Quand à la déperdition, la construction du port de Tigzirt sur un site archéologique, en dépit de la protestation d’archéologues, d’amoureux d’histoire et le mouvement associatif, qui leur ont proposé même un site de substitution, en vain, est significative des négligences qui affectent ce secteur névralgique, que ce soit pour l’histoire, la mémoire ou la culture de tous les Algériens. L’Algérie est membre de l’Organisation mondiale du tourisme depuis 1976, mais les revenus liés au tourisme ne dépassent pas les 10 % du produit intérieur brut et le pays se classe au 147e rang mondial. Le secteur du tourisme en Algérie représente 3,9 % du volume des exportations, 9,5 % du taux des investissements productifs et 8,1 % du Produit Intérieur Brut. Des chiffres, assurément, en deçà de ce qui pourrait être attendu, vu les grandes capacités patrimoniales et touristiques du pays, le plus grand d’Afrique et le 10e plus grand au monde. L’Algérie a ratifié la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel le 24 juin 1974. Le premier site protégé est inscrit en 1980. En 2013, l’Algérie compte 7 sites inscrits au patrimoine mondial, 6 culturels et 1 mixte. Le pays a également soumis 6 sites à la liste indicative, 5 culturels et 1 mixte. En dépit des potentialités touristiques dont pourrait se prévaloir notre pays, nous ne pouvons qu’être indignés par son classement actuel. Cependant, notre pays, ayant compris le rôle stratégique de ce secteur pour l’économie nationale, a mis en œuvre toute une panoplie de textes dont il est attendu la mise en valeur optimum de la destination Algérie. Cela écrit, des textes de loi existent autant pour la protection du patrimoine dans sa multi diversité quant à leur respect dans la pratique, il y a loin de la coupe aux lèvres.                          

                               

S.A.H      

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