La sollicitude, venir en aide à son prochain, la charité non ostentatoire, dans la discrétion et le respect de la dignité de ceux que la vie n’a pas gâté sont des valeurs ancrées dans l’esprit de l’Algérien. Cependant, on a constaté ces dernières années, que nous faisons tout, c’est-à-dire le bien ou ce que nous considérons comme tel, avec une tonitruante ostentation : «Oyez ! Oyez ! Bonnes gens venez voir, je suis charitable envers ces pauvres hères. Je leur offre de quoi se nourrir, de quoi calmer leur faim, je leur assure une rupture du jeûne digne». Certainement, le mois de Ramadhan est devenu l’opportunité idoine pour les démonstrations philanthropiques débridées. Même les services caritatifs officiels, tel le Croissant Rouge Algérien dont, à priori, c’est le rôle, la mission, d’être au service des démunis s’adonnent à ce jeu de la manière la plus retentissante dans la distribution de l’aide de l’État aux nécessiteux. Il va sans dire que ce comportement, faire étalage de sa bonté lorsqu’il s’agit de venir en aide à celui qui est dans le besoin, n’a jamais figuré dans la norme des valeurs de l’Algérien. C’est toujours dans la discrétion que la charité est la mieux ordonnée, la mieux appréciée tant par celui qui la reçoit que par celui qui l’octroi. Mais ceci est une autre histoire. La question qui s’impose aujourd’hui à tout un chacun est : les pauvres ne paraissent-ils qu’au mois de Ramadhan pour disparaître avec le croissant de l’Aïd ? Ces restaurants «Errahma» ou «Lhilal» ou toute autre appellation, qui ouvrent dès le premier jour du mois sacré et ferment le dernier jour, obéissent à quelle logique religieuse ou humanitaire ? À moins que, selon le dicton «qui donne aux pauvres prête à Dieu», on s’y attend, à posteriori, à quelque divine récompense au taux le plus fort. En tout état de cause, ces restaurant, puisqu’ils sont là rendent d’énormes services à toute une population de SDF, de démunis, d’étudiants et de passagers, en leur offrant la rupture du jeûne gracieusement. Nous avons rendu visite à plusieurs d’entres eux. Le premier restaurant que nous avions eu à voir est situé juste en face la CNEP et il a été ouvert par un particulier «Etablissement Aït Mouloud». Le tenancier nous apprend que le premier jour du Ramadhan ils avaient reçu pas moins de 340 convives et ils s’attendent à recevoir plus les jours qui viennent. Questionné sur le menu prévu pour le soir, il nous répondra : «Chorba, coucha et dessert». Ce qui saute aux yeux, c’est la qualité de la nourriture. C’est ce qui attire beaucoup d’étudiants, vu que dans les campus la qualité n’est pas toujours au rendez-vous. Même chose pour les restaurants du CRA. En tout, ils sont plus d’une dizaine à Tizi-Ouzou en plus des opérations qu’organise souvent la Direction de la sûreté de la wilaya en offrant au usagers de la route de quoi rompre le jeûne et rentrer doucement chez eux. Il faut saluer dans le geste de nos policiers une manière de prévenir les accidents. Il n’échappe à personne qu’à l’approche du maghreb, on a tendance à appuyer sur le champignon aux mépris des dangers qui nous guettent.
Sadek A. H.