Des recommandations salvatrices

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À l’exception de la parenthèse de feu Mostafa Lacheraf (ministre de l’éducation nationale de 1977 à 1979), le mouvement de chaises n’a porté à la tête du ministère de l’éducation nationale que des idéologues nourris à l’école unique et eunuque du FLN.

Et c’est tout naturellement qu’à la place d’un citoyen, dans l’acceptation démocratique du terme, que l’école algérienne «fabriqua» tour à tour, selon l’orientation idéologique du moment, un socialiste spécifique et discipliné un panarabiste déterminé et un islamiste schizophrène. La refonte du système éducatif promise par un Bouteflika résolu suscitera un grand espoir. Le dossier de la réforme sera pris en charge par une commission nationale présidée par Benzaghou.

Ce dernier établira un constat sans appel de l’école algérienne. S’en suivra le fameux rapport de la commission Benzaghou. Les résultats de la commission ne trouveront pas terrain favorable à leur concrétisation. La levée de boucliers islamistes aura le dernier mot. Le dossier de la réforme sera vite oublié. Arrivera à la tête du ministère l’indéboulonnable Benbouzid. Il y restera quatorze ans à tourner en rond. En 2014, succédant à Baba Ahmed, Nouria Benghebrit est devenue ministre de l’Education nationale. La ministre avait, faut-il le rappeler, fait partie de la commission Benzaghou. Spécialiste en sociologie de l’éducation (elle décroche son doctorat à l’université Paris V), Elle rejoint d’abord en tant que chercheuse et responsable du laboratoire de recherche sur l’éducation et les systèmes de formation qu’elle a montée, puis en tant que directrice de l’URASC de 1989 à 1992, année au cours de laquelle l’unité se transforme en centre de recherche. Son profil est tout indiqué pour diriger le ministère de l’éducation nationale. Mais à peine désignée à la tête du ministère que, sorti de leur engourdissement, un conglomérat d’islamo-conservateur se déchaîne contre les origines de Nouria Benghebrit.

C’était plutôt un signe que la ministre allait secouer le cocotier. Elle «déterrera» le dossier Benzaghou. De part son passif de chercheuse dans le domaine, la ministre avait forcément une idée sur les maux qui rongent le système éducatif. Cela étant, elle a désigné du doigt ces maux et s’est appliquée, à en trouver des remèdes. Des recommandations seront peaufinées. Il est question, entre autres, de la révision de la manière de s’approprier les langues étrangères, notamment le français, la suppression de l’examen de cinquième, la durée de l’examen du baccalauréat, le retour du bac professionnel. Cependant, deux recommandations, à elles seules, impulseraient un sursaut qualitatif à l’école algérienne. La première consiste, à ce que l’algérien, (le «dialecte», cette langue qui n’a pas d’armée et de drapeau) accompagne l’écolier dans le cycle primaire. Cette démarche empêchera la fracture traumatisante maison-école. Le petit algérien ne se sentirait plus dépaysé une fois le portail de son école franchi. Il n’évoluera pas avec ce que les psycholinguistes appellent «la haine de soi». «Une haine de soi» qui se traduit par la certitude d’une appartenance «identitaire» à la sphère arabo-islamique. L’algérianité est introuvable à l’école, c’est juste, un territoire, un drapeau et une équipe nationale. L’algérien à l’école va, donc, réconcilié l’enfant avec ses parents, son village, sa tribu… sa vraie identité. Ainsi, la deuxième consiste à revoir la matière «éducation islamique». Il est retenu dans les recommandations l’intitulé «la séance civilisation islamique» au lieu de «éducation islamique».

Les prêches seront interdits dans nos écoles. Nos enfants s’identifieront, désormais, aux Djaout et autre Dib et vomiront les daech et leur matrice idéologique. Espérons que la détermination de la ministre ne connaîtra pas le sort du dossier Benzaghou. Déjà«l’association des ulémas musulmans» a signifié son refus des recommandations, notamment celle ayant trait à l’Algérien. Elle (l’association) avertit Sellal: «il s’agit d’un précédant dangereux» et l’invite à revenir en arrière. Arrière, seul mot intellectualisé par la «oulémas» et leurs supporters.

T.O.A.

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