«C'est le fruit de longues nuits d'écriture»

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Dans sa préface, le professeur Koussaila Alik l'a si bien écrit " Seg umenugh gher thira&quot,; en d'autres termes du "domaine de la revendication à l'écriture&quot,; ou encore ce qu'a énoncé Ahcène Mariche, l'illustre encore plus de "seg usirem gher tilawt&quot,; c'est-à-dire" de l'espoir à la liberté&quot,; tels sont les paroles qui décrivent M. Mohand Naït Abdallah.

Ce dernier est un infirmier exemplaire, un militant de la cause amazighe, un prisonnier du printemps berbère et maintenant un poète parce qu’il vient d’éditer son deuxième recueil de poésie  » awal d wawal » après son premier opus  » adref » ou encore  » le sillon » paru en 2013.

Il est né en 1956 à Tifilkout (Illilten), infirmier de profession de la promotion 1975-1976, a été arrêté le 29 mars 1980 avec les 24 détenus d’avril 1980. Il passa de la prison de Boufarik à Berroughia. C’est un militant de la cause amazighe et des libertés démocratiques.

Dans  » Awal d wawal », il rend hommage à la femme et plus particulièrement à sa mère, veuve de chahid, à Abane Ramdane, à d’autres héros de la révolution et traite plusieurs sujets sociétaux.

La Dépêche de Kabylie: qui est Mohand Naït Abdallah?

Mohand Naït Abdallah: tout d’abord, je suis infirmier. Je me suis mis à l’écriture depuis longtemps. Mais, c’est en 2013 que j’ai édité mon premier recueil de poèmes en tamazight dont le titre est  » Adref ». C’est un travail de longue haleine. Il m’a fallu rassembler tous mes poèmes que j’ai soigneusement gardés dans mes cahiers. J’ai ensuite arrangé certains d’entre eux parce qu’avec le temps il fallait les revoir.

Quels sont les thèmes que vous avez insérés dans ce recueil?

C’est beaucoup plus sur la révolution  » tagrawala » d’autant plus que je suis fils de chahid. J’ai connu la souffrance et la misère. Les veuves ont beaucoup enduré durant la guerre et après l’indépendance. D’ailleurs, j’ai rendu un hommage à ma mère. J’ai aussi composé des poèmes au tour de la revendication identitaire.

Si on revenait quelque peu sur votre manière d’avoir appris Tamazight. Cela relève à quelle période?

Eh bien tout comme les autres militants, je l’ai apprise alors que j’étais encore collégien. C’était l’ère de la clandestinité. D’ailleurs, au fil des années, j’avais intégré les mouvements revendicatifs jusqu’en avril 1980 quand je fus arrêté justement, durant les événements. J’étais déjà infirmier. En tout cas, quand je me replonge dans le temps, je suis toujours convaincu qu’à cette époque-là nous étions vraiment avides de reconquérir toutes les libertés. Nous en avons vraiment besoin. La prison, c’est dur mais comme nous étions épris de justice, nous savions que nous allions vaincre.

M. Mohand Naït Abdallah, parlons un peu de votre deuxième recueil. Qu’est-ce que vous en dites?

Tout d’abord, c’est aussi le fruit de longues nuits d’écriture. Parce que, sincèrement, les poèmes qui le composent sont sortis de mes entrailles. Au total, il renferme 24 poèmes.

Pouvez-vous nous citer quelques uns?

Ce sont surtout des hommages à ceux qui ont libéré notre pays du joug colonial et à ceux qui ont milité pour la cause amazighe. Tout d’abord, le titre du recueil  » awal d wawal ». Quant aux autres, j’évoquerai  » Amghar azemni » c’est-à-dire le sage, temutt,  » la femme », lbatel « l’injustice », ayrad n’djerdjer  » le lion du Djurdjura, c’est Amirouche, un hommage à Lounès Matoub, un autre à Aissat Idir et de nombreux autres thèmes tels, Ighriben  » les émigrés », tuggdi » la peur ». En somme, j’ai touché à de nombreux thèmes de notre société.

Aujourd’hui que même le prix Assia Djebbar a été décerné à un roman écrit en tamazight. Quel constat faites-vous de l’avancée de cette langue?

Nous ne sommes plus dans la clandestinité. Tamazight a fait de grands pas grâce, bien sûr, aux militants. C’est une cause juste, et les causes justes atteignent leurs consécrations. Même l’édition dans cette langue commence à foisonner, c’est très réjouissant. Mais, il reste encore du chemin à faire. Ce que je dirais au haut commissariat à l’Amazighité dont les efforts pour la promotion de notre langue sont considérables de veiller à faire une large diffusion des manuels, des ouvrages et des romans édités dans les établissements scolaires, dans les bibliothèques communales, dans les foyers pour jeunes… C’est un autre combat qu’il faut mener.

Quel appel voulez-vous lancer?

C’est un appel de cœur à l’intention des parents qui devront encourager leurs enfants à étudier Tamazight. Elle ne doit pas être facultative puisqu’elle a un caractère de langue nationale. Et espérons qu’elle sera bientôt langue nationale.

D’autres projets?

Bien sûr, j’ai un recueil de nouvelles en cours. Comme j’ai l’intention de traduire certains de mes poèmes en pièce théâtrale, ce sera une autre aventure pour moi.

Et comme conclusion?

Je vous remercie de m’avoir ouvert vos colonnes pour présenter mes recueils. D’ailleurs, votre journal consacre chaque lundi des pages pour Tamazight. C’est une initiative louable à plus d’un titre. Ensuite, je ne cesserai d’appeler tous ceux qui ont les moyens de soutenir l’édition en Tamazight de soutenir toute initiative allant dans

Entretien réalisé

par Amar Ouramdane

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