Une énième démission collective ébranle le RCD. Pas moins de 28 militants, dont trois élus à l’APC de Tizi-Ouzou, ont annoncé, avant-hier, leur démission collective des rangs du parti.
L’hémorragie continue dans cette section de Tizi-Ouzou, jadis poumon du parti, et risque d’être fatale pour l’avenir de cette formation dont la ligne est désormais ouvertement décriée par les plus chauvins et les plus anciens militants qui quittent ainsi le navire quasiment l’un derrière l’autre. Il s’agit là d’une énième démission collective qui vient creuser la plaie au sein du rassemblement pour la culture et la démocratie de Mohcine Belabbes, qui se retrouve confronté à une situation des plus délicates à l’approche des élections locales. En effet, à peine quelques jours après la démission d’Ouahab Aït Menguellet, l’emblématique président de l’APC de Tizi-Ouzou, suivie de celle du président de la section de Tizi-Ouzou, ainsi que de celle de deux autres membres, avant-hier, ce sont 28 militants qui ont claqué la porte du rassemblement. «Le RCD était pour nous plus qu’un parti politique, c’était une école où nous apprenions les principes de base de la politique, de la vertu et du sens des responsabilités et du devoir. Nous y avons connu des hommes et des femmes de haute qualité intellectuelle et morale. Nous en tirons, aujourd’hui, fierté et prestige. C’était une période d’euphorie et d’espoir». C’est ce qu’on peut lire sur la déclaration rendue publique par le groupe démissionnaire et dont nous détenons une copie. Une introduction narrée au passé, à l’imparfait, pour marquer sans doute la rupture avec une époque, vraisemblablement révolue selon les démissionnaires. «Soudainement, le présent semble narguer le passé et l’avenir s’en retrouve contrarié. La nostalgie devient onirisme», regrettent-ils. Expliquant dans le détail les raisons de leur démission, les signataires de la déclaration usent d’ironie pour dire ce qu’il est advenu du slogan du parti : «Au RCD, le courage de dire n’était pas une baliverne. L’indifférence, la neutralité et le silence porteur n’apportent ni or ni honneur. Nous, nous voulons rester fidèles au slogan du parti ». «Décisions unilatérales, violation manifeste des statuts et du règlement intérieur, mépris affiché envers la base militante, ignorée et cantonnée dans des tâches simplificatrices d’affichage, de battement de mains et d’acclamation, rétrécissement des espaces d’expression, suffocation et étouffement. Telle est l’ambiance ressentie et vécue, depuis quelque temps, au sein de notre rassemblement», assène-t-on encore à la face des responsables actuels du parti. Individuellement, Mme Djazia Asmani, élue à l’APC de Tizi-Ouzou, a déclaré à la Dépêche de Kabylie que sa démission a été motivée notamment par «le manque de démocratie et de transparence au sein du parti».
Dans le sillage du maire Ouahab Aït Menguellet…
Pour illustrer ses propos, elle évoque le cas des dernières législatives : «Je n’étais pas d’accord avec la liste établie qui, contrairement à ce qu’ils disent, n’émanait pas de la base, elle a été décidée d’en haut ! Je n’ai rien contre les personnes désignées, mais on aurait pu avoir une meilleure représentativité». Et paf pour les députés élus. Et d’ajouter : «Il n’y a plus de contact entre la base et les dirigeants». M. Boultache Mohamed, autre élu APC démissionnaire, pour sa part, affirme : «J’ai été élu sous la houlette du RPR, j’ai rejoint le RCD en 2014, il y avait des hommes avec qui on pouvait travailler. Aujourd’hui, ils ne sont plus au parti, je n’ai d’autre choix que de quitter moi aussi». Boultache rend ainsi hommage au maire Ouahab Aït Menguellet qu’il cite nommément : «Ce sont les hommes qui font le parti, et non le contraire», appuie-t-il à travers sa déclaration à la Dépêche de Kabylie. Dans ladite déclaration collective, les militants démissionnaires ont tous déploré que «le jacobinisme tant décrié et combattu semble devenir le mode de gestion privilégié, l’anathème, l’avanie et l’exclusion, la panacée». Les démissionnaires parlent d’une fin historique pour le parti : «Jouissant de la mansuétude de la direction nationale, un groupuscule de personnes, à l’allure de nouveaux caïds, fait main basse sur les structures du parti à Tizi-Ouzou. Les dérives dont il se rend l’unique responsable sont annonciatrices d’une fin historique d’un parti originellement porteur de tant de promesses et d’espoir», prédisent-ils en dénonçant «la gestion chaotique, pernicieuse et mercantiliste du dernier rendez-vous électoral qui en a constitué les prémices». «Prendre un échec (ndlr résultats des dernières législatives) pour un triomphe est une méprise, en faire une réjouissance relève du cynisme». «Dommage ! Nous aspirions à mieux», soutiennent-ils. Et d’expliquer que cette démission, la leur, «a été prise la mort dans l’âme». A signaler enfin que les signataires de la déclaration-démission, en l’occurrence, Abahri Hocine, Abahri Malika, Adlani Nadia (élue APC), Aït Kaci Ali, Aksas Djamal, Asmani Djazia (élue APC), Attar Lynda, Bachouche Madjid, Benameur Toudert, Boultache Mohamed (élu APC), Cherouak Mahmoud, Cherrak Ali, Chotbi Ouardia, Guettouche Rachid,Hadid Ouassila, Hadjer Djilali, Hamadache Brahim, Ibrahim Kahina, Khellil Nadia, Kolli Riad, Laich Marzouk, Lilani Karim, Madjbour Mohed, Mammar Boualem, Ouahioun Amar, Oukil Arezki, Bouchafa Malika et Makhtour Nassima, ont voulu, selon leurs dires, par le biais de cette action, «Dénoncer le totalitarisme, l’aventurisme, le clientélisme et l’esprit clanique érigés en mode de gouvernance du parti ; Refuser et ne pas cautionner les desseins inavoués de certains à porter le parti au reniement de ses valeurs et principes fondateurs ; Condamner les campagnes d’exclusion, de dénigrement systématiques et violences verbales, menées contre certains dirigeants et élus du parti ; Dénoncer les dénigrements criminels et calomnieux contre des militantes et militants ayant décidé librement de rompre avec le RCD».
Kamela Haddoum.